« Ouvrons les yeux il y a urgence »

C’était le titre de la journée du 3 Novembre organisée au Secours Catholique pour répondre à cette question : Que feront les exilé.e.s de passage à Calais pendant la période hivernale ? Depuis Novembre 2016, (et même avant!) ils et elles se retrouvent dehors, sans toit, sans aucune structure d’accueil. Elles n’ont même pas le droit de garder leurs tentes.L’Etat fait ses propositions et mène ses plans « grand froid », mais ce n’est pas suffisant, pas adapté, et pas suffisamment efficace.Nous avons donc proposé un temps de réflexion pour tou.te.s : bénévoles, citoyen.ne.s calaisien.ne.s., exilés. Ce fut une très belle journée qui a réuni une centaine de personnes, des calaisien.ne.s se sont proposé.e.s pour un hébergement éventuel.

Il y avait des ateliers divers et variés. La cabane juridique a informé sur les droits des citoyen.e.s à héberger, il y a eu des témoignages d’hébergeurs et un échange par Skype avec Mexico, dans le cadre du Forum Social Mondial des Migrations (FSMM), où nous avons reçu Antoine Paumard, directeur du Service Jésuite des Réfugiés (JRS) en France. La journée fut agrémentée par une séquence de « théâtre de l’opprimé », une lecture de Véronika Boutinova, un atelier autour de « C’est quoi le froid ? ». Le (bon) repas avait été préparé et servi par une équipe de choc dont Ahmadullah, Abdeen, Heshmat, Noor, Ibrahimet Obeidullah. La journée s’est terminée par un concert de Lou Blaster et Omar. Un groupe de personnes exilées s’étaient joints à nous. Ce fut une superbe journée.

Message d’une personne soudanaise expulsée d’Angres

La vie est pleine de moments magnifiques et d’autres difficiles. Quand tout va bien, vous avez beaucoup d’ami.e.s pour partager ces moments, mais rares sont ceux qui sont présents dans les temps difficiles, pour alléger votre souffrance… Je saisis cette opportunité pour remercier tous les ami.e.s pour tout ce que vous nous avez apporté pendant la durée de notre séjour à Angres, même si les mots me manquent pour décrire votre grandeur… Nos ami.e.s, même avec toute l’eau de toutes les mers du monde en guise d’encre, et tous les arbres de toutes les forêts comme crayon, je ne trouverais pas de mots assez forts pour vous remercier.Thank you all my wonderful friends! »

Tatinghem, Longuenesse, Salperwick, expulsions!!

Tatinghem, expulsion! Longuenesse, expulsion! Salperwick, expulsion! Les exilé.e.s qui (sur)vivent dans l’audomarois dans l’espoir de franchir la Manche subissent eux et elles aussi la politique de lutte contre les points de fixation. Après l’expulsion d’un campement situé dans un fossé de Tatinghem en décembre 2017,  les personnes exilées avaient réussi à se réinstaller 300 mètres plus loin sur un terrain vague de la ville de Longuenesse. En septembre, les habitant.e.s sont expulsé.e.s, et les abris et tentes détruits au cours de ce que les autorités ont appelé une opération de lutte contre les réseaux de trafic d’êtres humains; opération qui aura surtout permis de vider le campement de ces habitant.e.s et de le détruire…Un mois plus tard, après quelques autres tentatives d’installation, une dizaine de jeunes hommes, originaires du Kurdistan irakien, se sont installés sur un terrain situé sur la commune de Salperwick. Quelques jours après, le propriétaire accompagné des gendarmes locaux est parvenu à faire partir les personnes exilées. Une nouvelle mise à la rue, une nouvelle fois sans base légale. Les personnes exilées reviendront peut-être. Sans doute même. Les bénévoles locaux continueront à les soutenir comme ils et elles le font depuis plus de 10 ans.

Journée Inalco, PSM, Secours catholique

Traduire, comprendre, partager : les langues dans le parcours migratoire.

« Comment dit-on exil dans ta langue ? »

Exilé ou autochtone, vous connaissez les malentendus liés à la traduction, ou à l’absence de traduction, à la diffusion de l’information, la méconnaissance de certains gestes, de certaines attitudes qui sont différentes d’un pays à l’autre. Venez à la rencontre organisée par LIMINAL, le Secours catholique et la PSM toute la journée du 24 Novembre, ou à l’un des ateliers.

Venez dès 10 heures, le samedi 24 novembre 2018 au local du secours catholique, 47 rue de Moscou à Calais. La journée est ouverte à tous et évidemment gratuite, mais il faut s’inscrire pour le repas.

Vous avez envie d’en savoir plus sur la situation dans les pays de la Corne de l’Afrique (Erythrée, Ethiopie, Soudan) ? C’est à 10h.

A midi si vous voulez participer à la confection puis au partage du repas.

A 14h, il sera question de l’accueil dans les langues (mots, langues, façons de faire). Avec une question subsidiaire : existe t-il une langue de la migration, inventée au croisement des parcours et des rencontres ?

Cette journée sera animée par des chercheur.e.s, anthropologues, interprètes de l’INALCO avec la PSM et le Secours Catholique,  mais les discussions se feront avec tous les acteurs  : associatifs, bénévoles, exilé.e.s.

 

Programme :

 

Atelier 1 : 10h-12h Comprendre les situations dans la corne de l’Afrique 

10-11h : Présentation par pays par des membres de Liminal (programme de recherche) de l’INALCO (Institut national des langues et des civilisations orientales) et par des médiateurs : Ethiopie, Erythrée, Soudan.

11h-12h : Discussion sur les cultures, façons de faire, règles et habitudes

 

12h- 14h : Atelier cuisine et partage du repas

 

14h-17h Atelier 2 : L’accueil dans les langues (Exilé.e.s / associatifs / médiateurs)

Comment accueillir dans les langues ? (information, droits, besoins)

Attentes croisées (des accueillis / des accueillants)

ncompréhensions et difficultés  (en général, dans le contexte calaisien et des Hauts de France, dans le contexte de Paris).

Qui traduit ? Traducteurs, médiateurs, « traduisants »

Retours sur expériences (bénévoles, associations, exilés)

Discussion finale Fin  de la journée à  17h30

 

avec des chercheurs du programme LIMINAL (Linguistic and intercultural mediation in a context of international migration)

 

 

 

Traduire, comprendre, partager : les langues dans le parcours migratoire.

 

« Comment dit-on exil dans ta langue ? »

 

Exilé ou autochtone, vous connaissez les malentendus liés à la traduction, ou à l’absence de traduction, à la diffusion de l’information, la méconnaissance de certains gestes, de certaines attitudes qui sont différentes d’un pays à l’autre. Venez à la rencontre organisée par LIMINAL, le Secours catholique et la PSM toute la journée du 24 Novembre, ou à l’un des ateliers.

Venez dès 10 heures, le samedi 24 novembre 2018 au local du secours catholique, 47 rue de Moscou à Calais. La journée est ouverte à tous et évidemment gratuite, mais il faut s’inscrire pour le repas.

 

Vous avez envie d’en savoir plus sur la situation dans les pays de la Corne de l’Afrique (Erythrée, Ethiopie, Soudan) ? C’est à 10h.

 

A midi si vous voulez participer à la confection puis au partage du repas.

A 14h, il sera question de l’accueil dans les langues (mots, langues, façons de faire). Avec une question subsidiaire : existe t-il une langue de la migration, inventée au croisement des parcours et des rencontres ?

 

Cette journée sera animée par des chercheur.e.s, anthropologues, interprètes de l’INALCO avec la PSM et le Secours Catholique,  mais les discussions se feront avec tous les acteurs  : associatifs, bénévoles, exilé.e.s.

 

Programme :

 

Atelier 1 : 10h-12h Comprendre les situations dans la corne de l’Afrique 

10-11h : Présentation par pays par des membres de Liminal (programme de recherche) de l’INALCO (Institut national des langues et des civilisations orientales) et par des médiateurs : Ethiopie, Erythrée, Soudan.

11h-12h : Discussion sur les cultures, façons de faire, règles et habitudes

 

12h- 14h : Atelier cuisine et partage du repas

 

14h-17h Atelier 2 : L’accueil dans les langues (Exilé.e.s / associatifs / médiateurs)

Comment accueillir dans les langues ? (information, droits, besoins)

Attentes croisées (des accueillis / des accueillants)

ncompréhensions et difficultés  (en général, dans le contexte calaisien et des Hauts de France, dans le contexte de Paris).

Qui traduit ? Traducteurs, médiateurs, « traduisants »

Retours sur expériences (bénévoles, associations, exilés)

Discussion finale Fin  de la journée à  17h30

 

avec des chercheurs du programme LIMINAL (Linguistic and intercultural mediation in a context of international migration)

 

 

Note de lecture sur le livre de Smain Laacher par Martine

Croire à l’incroyable    Un sociologue à la Cour nationale du droit d’asile

Smaïn Laacher     coll NRF essai  Editions Gallimard

Tout est dans le titre et surtout le sous titre : Smaïn Laacher, dont je connaissais le rapport fait au centre de Sangatte[1], a été juge assesseur à la  CRR (commission de recours des réfugiés) puis à la CNDA[2]  (cour nationale du droit d’asile)de 1999 à 2014.

Il partage ici ses réflexions sur sa pratique. Et il reste sociologue. Il décrit  le fonctionnement de la CNDA, son cadre, ses acteurs ce qui est déjà intéressant pour le profane que je suis, et les questions que lui pose ce fonctionnement. A cet égard, le propos est très nuancé,  scrupuleux. Ce livre n’est pas dogmatique, l’auteur observe, décrit, analyse, explique et questionne, il garde une posture modeste et honnête. Pourtant son analyse du fonctionnement est très précise, et répond à beucoup de questions que je me posais. Cela porte d’abord sur les limites de la convention de Genève : « Le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui craint avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité,  de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques… » Pour l’auteur, il manque  un 6eme motif de persécution, celui lié au genre. D’autre part, il admet que la misère est bien souvent utilisée et organisée sur des raisons politiques, ou racistes. La distinction entre réfugié politique et migrant économique n’est donc pas pertinente. Enfin il déplore l’absence du critère de changement climatique.

Il souligne le taux assez constant de rejet de la décision de l’OFPRA, « autour de 20%, avec  quelques rares cas autour de 35-40% » ce qui laisse entendre l’existence d’un quota d’admission de réfugiés.

Un chapitre expose, en évoquant certaines personnes rencontrées, ce que c’est être parti, être exilé, avoir perdu son foyer, sa langue et sa culture : c’est fait avec finesse, sans pathos, et de manière respectueuse.

Il y a aussi un chapitre  « Les femmes, des persécutées à part ? » où il souligne, à l’aide d’exemples, les très grandes difficultés pour les femmes à faire reconnaître des persécutions : les violences faites aux femmes n’entrent pas dans les motifs de la convention de Genève, le récit en est particulièrement difficile, voire impossible car la méfiance des femmes vis a vis des institutions est encore plus forte, et reconnaître être une victime de crime sexuel ne peut parfois être affronté,  le « silence est une procédure de survie. »

Il observe chacun des acteurs de cette cour de justice : la « formation de jugement » (quel terme étrange) constituée par le juge et ses deux assesseurs, puis : la secrétaire, le rapporteur, l’interprète éventuel, le requérant, c’est le nom qu’il donne au demandeur d’asile. Il souligne le  rôle majeur du rapporteur :sa connaissance documentée du requérant, de son pays d’origine, et de la jurisprudence. La qualité inégale des acteurs, en terme de connaissance, d’attention, de bienveillance. C’est un univers « socialement hiérarchisé » qui doit « produire de l’inclusion et de l’exclusion ».

Sur quoi décide le juge : «  Pas seulement d’après ce que prescrit la loi, mais bien plus d’après l’opinion propre qu’il se forge . » Or la situation du demandeur d’asile  est difficile à saisir pour le juge, bien qu’il dispose d’un centre d’information géopolitique, avec fiches, cartes,  rapports de ministees, d’ONG. L’auteur  donne la mesure  de ce qu’est une demande d’asile. Il faut la faire par écrit en fournissant des documents, et il faut  ensuite la soutenir en personne, en affrontant des personnes culturellement et socialement éloignées. C’est une véritable épreuve et  une performance, et en plus, elle est soumise à l’aléatoire, on le comprend entre les lignes.

Comment, pour le requérant, construire et présenter à la cour un récit crédible ?  Histoire et récit sont deux registres qui ne se confondent pas : une même histoire peut se raconter de plusieurs manières. Il faut un récit compréhensible et crédible. Or le parcours de l’exil est chaotique, traumatisant.  La manière de  raconter les souvenirs en est le reflet : c’est difficile de se représenter clairement ce qui est arrivé, et plus encore de le transmettre. De plus le requérant peut raconter son histoire personnelle, mais il n’a pas la capacité d’expliquer par exemple,  que la pénurie vécue est liée à la politique économique du pouvoir en place ! Le requérant est considéré comme demandeur d’asile uniquement, et pas  comme sujet, avec une histoire singulière, un statut social. Son statut est d’évidence, un statut « inférieur » lors de son passage devant la cour. L’auteur s’interroge également sur le silence, à plusieurs reprises :  « Le silence peut renvoyer à une intériorité anéantie ».

C’est un livre « chimère » qui raconte des souvenirs très vivants, sensibles et bienveillants sur des vraies personnes, qui dit les émotions de l’auteur, selon les cas :  pitié, empathie  colère, désolation parfois et  regret. Et dans la même page, pour expliquer le contexte des demandes d’asile, il inclut  des statistiques, des considérations juridiques , une réflexion sur la diversité des politiques d’accueil et sur  l’évolution du droit : du droit  à quitter son pays, vers le droit à rester dans son pays, ce qui conduit à faire de la protection des victimes sur place (par des ONG) un mécanisme privilégié de prévention de la mobilité des populations déracinées. Il met à jour le pouvoir des institutions internationales : HCR[3],OIM[4], Nations Unies, pouvoir partagé avec les Etats, pour contrôler la circulation des personnes.

 

Smaïn Laacher se défend de faire un ouvrage de sociologie scientifique et objective, et revendique  le point de vue personnel et l’emploi du « je ». Mais il ne dénonce pas, et ça mettra peut-être certains en colère. Nous sommes un certain nombre à l’attendre au tournant : est-ce vraiment honnête et éthique de contribuer au fonctionnement d’une institution qui règle le sort  ou au moins qui oriente le cours de la vie de centaines d’hommes et de femmes chaque année ?  Institution qui contribue ainsi au mensonge qui n’est dénoncé par personne :  ils sont des centaines de mille à périr au cours de la migration et « nous » ne faisons pas ce qu’il faut, pas assez, et « nous » ne voulons pas le savoir.

 

[1]« Après Sangatte… Nouvelles immigrations, nouveaux enjeux » Editions La Dispute 2002

[2]Une personne étrangère  qui veut demander l’asile dépose une demande en  prefecture, elle constitue un dossier qui sera examiné par l’OFPRA, qui est une instance administrative. En cas de refus de l’OFPRA de lui accorder le statut de réfugié, la personne peut faire un recours à la CNDA qui est une cour de justice. La CNDA va statuer à nouveau sur la demande : soit elle confirme la décision de l’OFPRA, soit elle rejette cette décision (et accepte le statut de réfugié, les termes sont trompeurs;). 38674 recours ont été déposés en 2015

[3]Haut commissariat aux réfugiés

[4]Organisation internationale des migrations

Retour sur la fête de l’entre deux à Calais

Vous ne l’avez peut-être pas su : à Calais, entre le 23 et le 30 Septembre, s’est déroulée une fête, une fête qui portait plusieurs noms : Fête des tentes (une fête religieuse juive) , Fête de l’entre-deux, (pour célébrer entre deux pays, ou entre deux situations de vie,) Fête des possibles, parce que ça collait avec cette fête qui avait lieu (presque) partout.Nous écrivions pour la présenter dans la newsletter de Septembre :

« Entre deux pays, entre deux langues,

Temps suspendu ? Temps arrêté ? Arrêt de jeu ? Temps de préparation ?

Entre plusieurs impossibilités,

Calaisiens et exilés, ensemble, pendant quelques jours, dans la cour de l’église Saint Joseph.

hébergement sous tente (la votre ou une tente prêtée, à monter sur place)

Ce sera un temps pour vivre ensemble : cuisiner, jouer, bricoler, discuter, dessiner, écrire, boire du thé  et du café, découvrir des patisseries, s’informer sur les droits, réfléchir à la prévention… Et toutes les propositions faites par les participants eux mêmes. »

La préparation avait été soignée, faite par une dizaine de bénévoles. La logistique, soutenue par le SC, la paroisse saint Joseph, Utopia, L’auberge des Migrants était bien élaborée. Les exilés avaient été informés de la proposition  de vive voix et par des flyers à l’accueil de jour, il y avait même eu une réunion la semaine précédente où ils avaient discuté de leurs attentes. Le déroulement de la fête a confirmé ce qui s’était dit à cette réunion : dans l’ensemble, cela ne les intéressait pas. Ils n’étaient pas preneurs de cette idée de fête, avec partage : partage des tâches, des animations, des rencontres. Un hébergement sous tente, sans douche, ni WIFi ne les intéressait pas, fut-il « sécure », car dans un lieu privé, à l ‘abri des interventions policières. Au total sur 7 nuits, il y eut 77 nuitées, et les personnes repartaient dans la journée. Les « habitants » n’ont pas été les personnes vivant à Calais, mais des « primo-arrivants », eux très contents de trouver  un lieu tard dans la nuit, avec de  la lumière, un accueil, et où casser la croûte. Un lieu où se retourner. Et parfois s’en retourner. Les autres « habitants » furent des MIE sans place au refuge pour mineurs de Saint Omer. Ni les uns ni les autres ne désiraient participer à des animations ou à une fête. Ils ont été très discrets, polis, prenant leur part dans l’organisation matérielle du lieu. Il aurait fallu pour eux de l’information précise sur la manière dont on peut survivre à Calais, cela n’avait pas été prévu. Les riverains, eux, n’ont pas été dérangés. Certains avaient exprimé leurs craintes au début de la période, ce dont la presse locale s’est dépêché de parler, mais, par la suite, aucune plainte n’a été déposée. Il y a eu la visite de 3 policiers municipaux, qui furent reçus avec politesse et humour. Le format a été discret, pas de contact avec la presse, pas de banderolles ni de déclaration.

Que « tirer » de cette expérience ? Ca s’est bien passé, ce n’est pas « un nouveau Sangatte », et, bien que quelques tentes aient été dressées, ça n’a dérangé personne… Ca donne envie de recommencer ! Les fêtes religieuses sont un bon filon,  dit un des bénévoles. Mais on a bien compris que ce qui est nécessaire au 1er chef, c’est un lieu d’accueil pour ceux qui arrivent, qui ne connaissent rien à la situation locale, ni personne. Que ce lieu doit rester de petite taille et discret, voire caché. Le travail de sensibilisation, de communication est évidemment nécessaire, mais il doit être distinct, à distance de ce lieu, pour des raisons de survie !

La Voix du Nord // Migrant.e.s: quelle est la situation aujourd’hui à Steenvoorde?

Amélie Vermeulen | 13/10/2018

Depuis les démantèlements successifs, il n’y a plus de camp de migrants à Steenvoorde. «  À chaque fois qu’ils essaient de poser des tentes, c’est systématiquement emmené  », relève Damien Defrance, président de Terre d’errance, une association d’aide aux migrants. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a plus de migrants. Certes, depuis les démantèlements et l’arrêté pris par l’État pour interdire le stationnement des poids lourds sur l’aire d’autoroute, ils sont beaucoup moins nombreux. Terre d’errance estime qu’ils sont actuellement «  une dizaine  ». Des chiffres que nous confirment les forces de l’ordre. Comme c’était le cas avant, ils arrivent des pays d’Afrique de l’est, du Soudan, d’Erythrée…

S’il n’y a plus de camp au Saint-Laurent, ce hameau de Steenvoorde éloigné du centre-ville continue pourtant de servir de refuge, une fois que les portes de la salle Saint-Joseph se referment, à 20 h. Les riverains que nous avons interrogés le confirment. «  Les migrants passent le matin et le soir, j’entends le chien aboyer  », rapporte un Steenvoordois. «  Cet été, j’ai dû m’arrêter net avec mon tracteur car il y avait un migrant qui dormait là, dans le champ, dans un sac de couchage  », raconte un agriculteur.

Terre d’errance continue d’assurer l’accueil de jour à la salle paroissiale Saint-Joseph, mais pour l’association aussi, le quotidien a évolué. «  Notre rôle a changé, confie Anne-Marie Defrance. Avant, on devait surtout gérer l’urgence, désormais on est davantage dans l’accompagnement individuel. J’aide actuellement des Érythréennes dans leur demande d’asile.  »

Un tournant dans l’accueil des migrants ?

Autre changement important, la convention signée en début d’année entre Terre d’errance et le Secours catholique. Celle-ci pourrait bien marquer un tournant : «  On entre dans une phase de normalisation  », nous confie une personne très au fait du sujet.

Cette convention, c’est une façon de pérenniser l’accueil de jour à la salle paroissiale. Mais on peut aussi y voir une volonté d’apporter un cadre plus strict, de régulariser l’accueil des migrants tout en limitant leur nombre. On sent également une volonté de mieux les intégrer, maintenant qu’ils sont moins nombreux. C’est un peu le sens des vestiaires que le Secours catholique veut mettre en place dans la Maison des sœurs, et qui seraient accessibles aussi bien aux migrants qu’aux Steenvoordois. Une tentative de rapprochement, en somme.

La Voix du nord // Migrants de Calais, un point de distribution de repas bloqué par des enrochements

Ce mercredi, des enrochements ont été installés route de Saint-Omer, là où chaque jour des repas sont distribués pour les réfugiés. 

Ce mercredi, des enrochements ont été installés route de Saint-Omer, à proximité du boulevard des Justes et de l’ancienne aire de covoiturage. À cet endroit, chaque jour, midi et soir, des repas sont distribués aux exilés par des associations d’aide aux migrants. «  On veut empêcher les regroupements et les squats qui peuvent s’y installer. L’endroit doit rester une zone naturelle et paisible.

« L’endroit doit rester une zone naturelle et paisible. Plusieurs riverains ont fait part de leur mécontentement »

Ces rochers ont pour but d’empêcher ces distributions. «  On veut empêcher les regroupements et les squats qui peuvent s’y installer. L’endroit doit rester une zone naturelle et paisible. Plusieurs riverains ont fait part de leur mécontentement  », explique Philippe Mignonet, adjoint à la sécurité à la mairie de Calais. Selon lui, c’est aussi une manière de préserver la zone, qui a été, ces derniers mois, le théâtre de nombreux faits divers  : une grosse rixe entre Afghans et Érythréens en février et la mort d’un migrant tué d’un coup de couteau en mars.

De son côté, l’Auberge des migrants, par le biais de François Guennoc, dénonce la manœuvre. «  On va partir un peu plus loin, on n’a pas le choix. Si ça amuse la municipalité de dépenser l’argent du contribuable, c’est son problème. Les migrants ont besoin de se nourrir  », explique-t-il.

Evacuation et enfermement en rétention de personnes exilées à Grande Synthe

https://www.lacimade.org/evacuation-et-placement-en-retention-de-personnes-exilees-a-grande-synthe/

25 octobre 2018

Le 23 octobre, une énième opération d’évacuation a été menée par les services de l’Etat, appuyés par un arsenal policier impressionnant : 31 fourgons de CRS, 20 fourgonnettes de gendarmerie, 11 fourgons de la police nationale. Pour quel résultat ?

 

Depuis fin mai, l’histoire se répète sur la commune de Grande-Synthe

Près d’une dizaine d’opérations d’évacuation ont eu lieu en cinq mois. Cela n’a pas empêché les personnes exilées de continuer à arriver et à s’installer là où elles peuvent dans une grande précarité, faute de places d’hébergement.

Depuis plusieurs semaines, pas moins de 1 500 personnes vivaient dans le bois du Puythouck, dans des conditions indignes et insalubres. Parmi elles, beaucoup de mineur·e·s non accompagné·e·s, particulièrement vulnérables et complètement oublié·e·s par le département qui a obligation de les prendre en charge.

Mardi 23 octobre, une énième opération d’évacuation a été menée par les services de l’Etat, appuyés par un arsenal policier impressionnant : 31 fourgons de CRS, 20 fourgonnettes de gendarmerie, 11 fourgons de la police nationale. Pour quel résultat ?

Le lendemain soir, à nouveau une centaine de personnes erraient sur la commune à la recherche d’un abri. Les personnes évacuées étant pour la plupart hébergées dans des gymnases, pour quelques jours seulement et sans accompagnement social sur place ; nombre d’entre elles reviendront très certainement à Grande-Synthe.

Pire, une soixantaine de personnes interpellées sont désormais menacées d’une expulsion, principalement vers l’Irak, pays où elles sont exposées à des risques de traitement inhumains et dégradants. Elles sont enfermées dans les centres de rétention administrative (CRA) de Coquelles (Pas-de-Calais), de Lesquin (Nord) d’Oissel (Seine-Maritime) et du Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne). Dans ce dernier, où La Cimade intervient, les témoignages recueillis font état du traitement infligé par les forces de l’ordre. Interpellées tôt le matin, ces personnes n’ont pas pu récupérer leurs effets personnels (argent, vêtements, documents divers). Elles déclarent avoir été privées de nourriture depuis leur interpellation à 7 h du matin jusqu’au lendemain, du fait de leur arrivée tard dans la soirée au centre de rétention. De surcroît, certaines font état de problèmes de santé et toutes sont marquées par la précarité de leurs conditions de vie.

Toutes ces personnes ont contesté leur enfermement et les conditions de leur interpellation devant la justice.

La grande majorité des personnes évacuées à Grande-Synthe y est arrivée en passant par un autre pays européen ; pour autant, la France doit leur permettre de demander l’asile ici, sans appliquer la procédure Dublin.

Au moment où la mairie de Grande-Synthe s’apprête à signer avec l’Etat un accord prévoyant un dispositif d’accueil, celui-ci ne pourra être viable que si les structures d’hébergement ne se transforment pas en centres de tri et que l’accueil y est inconditionnel.

La Cimade rappelle que les personnes exilées qui arrivent sur la commune doivent bénéficier de l’hébergement de droit commun, avec notamment l’accès aux dispositifs du 115, comme solution digne et durable. De plus, l’enfermement en rétention administrative et la volonté du gouvernement d’expulser vers l’Irak sont profondément contraires à une politique d’accueil et de protection des personnes exilées, et doivent cesser immédiatement.

 

Rapport de Médecins du Monde sur l’accès aux droits et aux soins des plus démuni.e.s en France

Médecins du Monde (MdM) publie son 18e rapport annuel sur l’accès aux droits et aux soins des plus démunis en France

17/10/18 – Depuis plus de 30 ans, les équipes de Médecins du Monde (MdM) interviennent en France et luttent pour l’accès aux droits et aux soins pour tous.  À l’occasion de la Journée mondiale du refus de la misère, le 17 octobre, MdM publie son nouveau rapport annuel sur l’accès aux droits et aux soins des plus démunis en France. « 18e rapport annuel, 18e constat implacable et persistant tiré de nos actions : le non-accès aux droits et à la santé en France contribue à exclure de plus en plus de personnes précaires du système de santé. Sur la base de données objectives, ce rapport témoigne des obstacles et des dysfonctionnements croissants dans l’accès aux soins et aux droits de ces personnes », écrit MdM.
L’association se concentre sur l’action de ses médecins dans ses quinze centres de santé (CASO) en activité en 2017 où 24 338 patients ont été soignés. 12 000 autres personnes ont été approchées dans la rue. Majoritairement masculines, les personnes reçues sont principalement des ressortissants étrangers très jeunes. Plus de 98 % vivent sous le seuil de pauvreté. Elle souligne la hausse des mineurs accueillis dans ces centres, soit 3 477 en 2017, avec une moyenne d’âge de 10 ans. Un programme spécifique a été mis en place par l’organisme pour les aider dans leurs démarches. « L’absence de droits pour certaines populations » ou leur « non-application » sont deux arguments mis en avant par le rapport. La grande majorité des patients accueillis dans les centres ne disposent pas de couverture maladie : 13.3% seulement en possèdent une. Pourtant, d’après leur situation administrative, sept personnes sur dix devraient être couvertes. L’association propose de fusionner l’AME dans la PUMa (protection universelle maladie), et donc que les bénéficiaires de l’AME, les étrangers en situation irrégulières notamment, puissent être intégrés au régime général, détaille le rapport qui note que « les bénéficiaires de l’AME arrivent souvent très malades quand ils viennent demander des soins ».
Cette demande fait écho aux critiques de l’AME par certains hommes politiques. Le député LREM Thomas Mesnier avait proposé d’intégrer l’aide médicale d’État au régime général lors des discussions sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018, mesure qui n’avait pas été retenue à l’époque, rappelle Le Figaro.
> Le rapport de l’Observatoire de l’accès aux droits et aux soins 2018

 
 

Selon Médecins du monde, «les plus démunis sont exclus du système de santé»

Dans un rapport publié à l’occasion de la Journée mondiale du refus de la misère, l’organisation alerte sur les conditions de santé dégradées des personnes les plus précaires.

«Les plus précaires sont les plus mal soignés». Le constat dressé par Médecins du monde est sans appel. Dans son dix-huitième rapport annuel sur l’accès aux droits et aux soins des plus démunis en France, rendu public ce mardi, l’association explique que «les plus démunis sont exclus du système de santé».

» LIRE AUSSI Soins médicaux pour les plus démunis: des besoins croissants

L’association se concentre sur l’action de ses médecins dans ses quinze centres en activité en 2017 où 24.338 patients ont été soignés. 12.000 autres personnes ont été approchées dans la rue. De leur expérience sur le terrain, Médecins du monde tire des enseignements sur l’accès à la santé des plus précaires. Et sur les difficultés auxquelles ils sont confrontés.

Une population jeune qui vit sous le seuil de pauvreté

Majoritairement masculines, les personnes reçues sont principalement des ressortissants étrangers très jeunes. Plus de 98% vivent sous le seuil de pauvreté. Le rapport dresse des conclusions qui interpellent, comme le manque de dépistage: «Les conditions de vie précaires constituent un obstacle important au dépistage dans ces populations qui ont bien souvent d’autres priorités à gérer que leur santé».

En d’autres termes, les patients sont peu vaccinés. Parmi les personnes de plus 15 ans, seulement un peu plus d’un tiers sont à jour de leur vaccination pour la coqueluche, les rougeoles-oreillons-rubéoles (ROR) et l’hépatite virale B.

Toute aussi alarmante est la hausse des mineurs accueillis dans ces centres, soit 3 477 en 2017, avec une moyenne d’âge de 10 ans. Un programme spécifique a été mis en place par l’organisme pour les aider dans leurs démarches. Les femmes sont de même particulièrement touchées, avec un difficile accès aux services de gynécologie. 45.2% des femmes enceintes venues aux centres sont en retard dans le suivi de leur grossesse.

13% seulement possèdent une couverture maladie

Comment expliquer ces inégalités? «L’absence de droits pour certaines populations» ou leur «non-application» sont deux arguments mis en avant par le rapport. La grande majorité des patients accueillis dans les centres ne disposent pas de couverture maladie: 13.3% seulement en possèdent une. Pourtant, d’après leur situation administrative, sept personnes sur dix devraient être couvertes.

Le rapport dénonce la précarité administrative de ces publics. En cause la complexité des démarches surtout, mais aussi les difficultés financières. Difficile en effet d’avancer les frais ou de souscrire à une complémentaire santé pour la plupart des patients de ces centres. Pour les ressortissants étrangers, la barrière de la langue entre également en jeu.

Supprimer l’Aide médicale d’État

Médecins du monde souhaiterait la mise en place d’une sécurité sociale universelle pour tous. «L’aide médicale d’État doit disparaître au profit d’un régime général de la Sécurité sociale plus accessible et étendu à l’ensemble des personnes résidentes de notre pays», détaille le rapport.

«Les bénéficiaires de l’AME arrivent souvent très malades quand ils viennent demander des soins»

Delphine Franget, à la direction des opérations de Médecins du monde

L’association propose de fusionner l’AME dans la PUMa (protection universelle maladie) , et donc que les bénéficiaires de l’AME, les étrangers en situation irrégulières notamment, puissent être intégrés au régime général.

«Avec les lois de 1993 (dites Pasqua), on a isolé les sans papiers dans un système spécifique, précise Delphine Franget, à la direction des opérations de Médecins du monde et qui a travaillé sur le rapport. Auparavant, l’accès à l’assurance maladie n’était subordonné à aucune condition de régularité du séjour. Nous aimerions donc supprimer cette condition». D’après elle, c’est notamment en raison de ce système que les ressortissants étrangers sans papiers accusent des retards dans l’accès aux droits et donc dans l’accès aux soins. «Les bénéficiaires de l’AME arrivent souvent très malades quand ils viennent demander des soins, dénonce-t-elle. Nous aimerions qu’ils puissent bénéficier de la sécurité sociale».

Cette demande fait écho aux critiques de l’AME par certains hommes politiques. Le député LREM Thomas Mesnier avait proposé d’intégrer l’aide médicale d’État au régime général lors des discussions sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018. Mesure qui n’avait pas été suivie à l’époque.