Vous ne l’avez peut-être pas su : à Calais, entre le 23 et le 30 Septembre, s’est déroulée une fête, une fête qui portait plusieurs noms : Fête des tentes (une fête religieuse juive) , Fête de l’entre-deux, (pour célébrer entre deux pays, ou entre deux situations de vie,) Fête des possibles, parce que ça collait avec cette fête qui avait lieu (presque) partout.Nous écrivions pour la présenter dans la newsletter de Septembre :
« Entre deux pays, entre deux langues,
Temps suspendu ? Temps arrêté ? Arrêt de jeu ? Temps de préparation ?
Entre plusieurs impossibilités,
Calaisiens et exilés, ensemble, pendant quelques jours, dans la cour de l’église Saint Joseph.
hébergement sous tente (la votre ou une tente prêtée, à monter sur place)
Ce sera un temps pour vivre ensemble : cuisiner, jouer, bricoler, discuter, dessiner, écrire, boire du thé et du café, découvrir des patisseries, s’informer sur les droits, réfléchir à la prévention… Et toutes les propositions faites par les participants eux mêmes. »
La préparation avait été soignée, faite par une dizaine de bénévoles. La logistique, soutenue par le SC, la paroisse saint Joseph, Utopia, L’auberge des Migrants était bien élaborée. Les exilés avaient été informés de la proposition de vive voix et par des flyers à l’accueil de jour, il y avait même eu une réunion la semaine précédente où ils avaient discuté de leurs attentes. Le déroulement de la fête a confirmé ce qui s’était dit à cette réunion : dans l’ensemble, cela ne les intéressait pas. Ils n’étaient pas preneurs de cette idée de fête, avec partage : partage des tâches, des animations, des rencontres. Un hébergement sous tente, sans douche, ni WIFi ne les intéressait pas, fut-il « sécure », car dans un lieu privé, à l ‘abri des interventions policières. Au total sur 7 nuits, il y eut 77 nuitées, et les personnes repartaient dans la journée. Les « habitants » n’ont pas été les personnes vivant à Calais, mais des « primo-arrivants », eux très contents de trouver un lieu tard dans la nuit, avec de la lumière, un accueil, et où casser la croûte. Un lieu où se retourner. Et parfois s’en retourner. Les autres « habitants » furent des MIE sans place au refuge pour mineurs de Saint Omer. Ni les uns ni les autres ne désiraient participer à des animations ou à une fête. Ils ont été très discrets, polis, prenant leur part dans l’organisation matérielle du lieu. Il aurait fallu pour eux de l’information précise sur la manière dont on peut survivre à Calais, cela n’avait pas été prévu. Les riverains, eux, n’ont pas été dérangés. Certains avaient exprimé leurs craintes au début de la période, ce dont la presse locale s’est dépêché de parler, mais, par la suite, aucune plainte n’a été déposée. Il y a eu la visite de 3 policiers municipaux, qui furent reçus avec politesse et humour. Le format a été discret, pas de contact avec la presse, pas de banderolles ni de déclaration.
Que « tirer » de cette expérience ? Ca s’est bien passé, ce n’est pas « un nouveau Sangatte », et, bien que quelques tentes aient été dressées, ça n’a dérangé personne… Ca donne envie de recommencer ! Les fêtes religieuses sont un bon filon, dit un des bénévoles. Mais on a bien compris que ce qui est nécessaire au 1er chef, c’est un lieu d’accueil pour ceux qui arrivent, qui ne connaissent rien à la situation locale, ni personne. Que ce lieu doit rester de petite taille et discret, voire caché. Le travail de sensibilisation, de communication est évidemment nécessaire, mais il doit être distinct, à distance de ce lieu, pour des raisons de survie !