Le débat sur la migration légale vers l’UE rouvert par Bruxelles

La Commission européenne présente une directive destinée à pallier le manque de main-d’œuvre dans de nombreux secteurs, comme la santé.

Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, bureau européen) 

Le Monde, publié le 27 avril 2022  

La Commission européenne présente, mercredi 27 avril, un projet de directive visant à faciliter l’arrivée « de compétences et de talents » en Europe. En clair, favoriser une migration légale de travailleurs et de jeunes pour répondre au défi démographique et pallier le manque de main-d’œuvre dans des secteurs comme la santé, la technologie, la construction ou le transport. Le projet évoque aussi la création d’un « pôle de talents » qui permettrait, dès l’été, aux réfugiés ukrainiens, puis aux ressortissants d’autres Etats tiers, de faire connaître leurs diplômes et leur expérience afin d’intégrer plus facilement le marché de l’emploi.

La Commission choisit de relancer le vieux débat sur la migration dite « de travail » dans un contexte plus favorable que celui de la crise de 2015-2016, qui avait opposé les pays favorables à l’accueil de demandeurs d’asile à ceux qui y étaient résolument hostiles. La guerre en Ukraine a radicalement changé la donne, et les questions de l’accueil et de la migration ne sont, désormais, plus taboues pour la plupart des capitales. L’exécutif européen voulait aussi attendre le résultat de la présidentielle française pour ne pas courir le risque d’une instrumentalisation de ces questions par l’extrême droite. Enfin, le constat, fermement appuyé par les fédérations patronales, que plusieurs Etats membres souffrent d’une pénurie de main-d’œuvre pouvant entraver les politiques de relance a constitué une autre incitation pour l’exécutif européen.

La Commission, qui affirme vouloir présenter « un plan ambitieux et durable », précise toutefois qu’aucun pays membre ne sera forcé de l’appliquer. Pas question d’un nouveau « suicide politique », indique un diplomate en faisant référence au projet de quotas obligatoires de réfugiés à accueillir qu’avait évoqué le collège, dirigé à l’époque par Jean-Claude Juncker. Il avait entraîné une grave crise et créé une césure entre les Etats fondateurs et les pays d’Europe centrale et orientale. Il s’agit bien, cette fois, de respecter la compétence des Etats membres, souligne la Commission. « Chacun décidera et l’Union soutiendra les Etats, sur le plan pratique et opérationnel, à affronter les défis de la démographie et de la migration », insiste-t-on à Bruxelles. En 2021, c’est le Parlement qui l’avait invitée à proposer des mesures visant à harmoniser les conditions d’accueil, à simplifier les procédures et à lutter contre le travail clandestin.

Rééquilibrage

Il reste à convaincre les pays tiers que le « partenariat » évoqué recoupe bien leurs intérêts. Reprenant un de ses vieux slogans, la Commission assure qu’elle vise non pas à un « brain drain » – un « exode des cerveaux » – mais à un « brain gain » – une « croissance des cerveaux ». Qu’il ne s’agit donc pas de priver les pays concernés de leurs meilleurs éléments, les plus formés, mais, au contraire, de leur permettre de se former davantage et d’être, à terme, utiles à leur pays. En lui apportant des devises, mais aussi une expérience et une formation supplémentaires. L’initiative sera d’ailleurs replacée, promet Bruxelles, dans le cadre de l’aide au développement.

Elle devrait concerner d’abord la Tunisie, le Maroc et l’Egypte, ensuite le Sénégal, le Nigeria, le Pakistan et le Bangladesh. Des pays qui sont déjà liés à l’UE par divers accords dans le domaine de l’immigration, mais qui fournissent également des contingents importants de clandestins. De quoi confirmer que le projet vise en priorité à un rééquilibrage de la relation entre les pays concernés et l’Europe, et à une sorte de donnant-donnant : l’Europe offrirait plus d’ouverture à une migration régulée en échange d’un meilleur contrôle de l’immigration illégale.

C’était l’un des objectifs du « pacte migratoire » défini par Bruxelles, dont l’adoption se heurte toujours à une série de difficultés. Sous l’impulsion de la présidence française de l’Union, qui s’achèvera le 30 juin, il a dès lors été convenu entre les Vingt-Sept qu’il fallait privilégier une avancée par étapes, dont cette initiative fait partie.

Mobilité plus aisée

Il reste à savoir si les pays tiers, qui rechignent souvent à accepter le retour de leurs nationaux privés d’un titre de séjour dans un pays de l’Union, se résoudront à faciliter les réadmissions en échange de mesures pour leurs citoyens les mieux formés. Ceux-ci devraient bénéficier de décisions plus souples en matière de permis de travail, de droits de résidence et de respect des droits fondamentaux. La Commission insiste aussi sur sa volonté de permettre à des jeunes, peut-être moins formés, de voyager et de travailler plus facilement dans l’Union. Et de favoriser également l’accès d’autres à l’entrepreneuriat, notamment dans le secteur-clé des nouvelles technologies. La mobilité de tous au sein de l’espace européen devrait également être rendue plus aisée.

Si la politique migratoire est bloquée depuis plusieurs années en raison des divisions entre les Etats membres, la Commission espère avancer en évoquant des données objectives : il manque des centaines de milliers de personnes dans le domaine de la santé, des dizaines de milliers d’ingénieurs et, en 2030, la population européenne en âge de travailler aura diminué de 12 %. L’immigration ne serait donc pas une menace, mais une chance. Rendue légale, elle serait, par ailleurs, le meilleur moyen de lutter contre la migration clandestine.

« À Loon-Plage, la débrouille n’a pas de limite pour apporter l’eau aux exilés »

Voix du Nord – 20-04-22 – « À Loon-Plage, la débrouille n’a pas de limite pour apporter l’eau aux exilés »

Arnaud Stoerkler – 20 Avril 2022 à 10h36

Plusieurs centaines d’exilés fuyant des pays étrangers ont rétabli à Loon-Plage un camp de fortune, toujours dénué d’accès à l’eau courante. Entre citernes et camions douches, les associations veillent à leur apporter cet or bleu au quotidien.

Fonctionnel depuis le mois de février, le camion-douche de Help 4 Dunkerque reste sur le Dunkerquois malgré le départ de l’association.Fonctionnel depuis le mois de février, le camion-douche de Help 4 Dunkerque reste sur le Dunkerquois malgré le départ de l’association. – VDNPQR

Alors que de nombreux réfugiés ukrainiens ont été accueillis au domicile d’habitants du Dunkerquois, d’autres venus du Kurdistan, de Syrie ou encore d’Iran continuent de dormir sous les tentes et cabanes d’un camp de fortune érigé le long d’une voie ferrée à Loon-Plage. Malgré un récent changement de lieu,  les conditions de vie y sont toujours difficiles, sans « toilettes ni eau courante », rappelait récemment Claire Millot, secrétaire générale de l’association Salam, qui leur apporte des repas chauds plusieurs fois par semaine.

 

Olivier Schittek fait le trajet chaque semaine depuis Villeneuve-d’Ascq avec son camping-car, pour proposer sa douche aux réfugiés.

Olivier Schittek fait le trajet chaque semaine depuis Villeneuve-d’Ascq avec son camping-car, pour proposer sa douche aux réfugiés. – VDNPQR

Si deux gymnases (Dessinguez à Dunkerque, Buffon à Grande-Synthe) ouvrent leurs douches aux exilés le week-end, plusieurs initiatives ont émergé sur le terrain pour leur permettre de se laver au quotidien : Olivier Schittek, un particulier domicilié à Villeneuve-d’Ascq, vient chaque semaine à la rencontre des migrants du Dunkerquois pour leur proposer la douche de son camping-car, depuis un an. « Je leur mets aussi à disposition des vêtements propres en échange des leurs, que je lave chez moi », confie le Nordiste.

 

Après avoir subi un énième démantèlement, les exilés présents sur le Dunkerquois ont réinstallé un camp de fortune, toujours aussi précaire, sur le ban de Loon-Plage.Après avoir subi un énième démantèlement, les exilés présents sur le Dunkerquois ont réinstallé un camp de fortune, toujours aussi précaire, sur le ban de Loon-Plage.

Un camion comportant quatre douches a aussi été récemment aménagé : fonctionnel depuis le mois de février, il a permis à l’association Help 4 Dunkerque (un « convoi solidaire » venu aider « les réfugiés de la jungle de Dunkerque » entre les mois de janvier et de mars) de fournir une centaine de douches par jour à la population des lieux. Notamment aux femmes et aux enfants, via des horaires spécifiques.

Entre 7 et 10 000 litres d’eau par jour

Depuis le départ de Help 4 Dunkerque, leur camion douche a été confié au collectif N2PC sans frontières. « Il sera accessible deux à trois fois par semaine, en fonction de nos moyens humains », promet l’un de ses membres.

L’eau potable, c’est l’association Roots qui la fournit aux migrants en remplissant quatre grands réservoirs installés parmi les tentes. « Entre 7 et 10 000 litres d’eau sont consommés chaque jour », confie Rachel, une bénévole de Roots. De quoi boire, mais aussi se brosser les dents ou se laver succinctement. « Nous rechargeons les cuves toute la journée, mais notre équipe est petite : avec six personnes en moyenne, c’est parfois difficile. »

 

L’association Roots approvisionne chaque jour les exilés du Dunkerquois en eau potable.L’association Roots approvisionne chaque jour les exilés du Dunkerquois en eau potable. – VDNPQR

Une difficulté intenable lorsque ces citernes sont « enlevées lors d’évacuations de camp » opérées par les forces de l’ordre, comme l’a déjà constaté Olivier Schittek. « Nous tentons de trouver une solution durable pour cet accès à l’eau avec la communauté urbaine de Dunkerque (CUD) et le Syndicat de l’eau du Dunkerquois, mais les discussions avancent très lentement », explique Rachel.

Le 15 janvier dernier, une douzaine d’associations avaient déjà interpellé « l’État, la CUD et les mairies » pour améliorer la fourniture en eau potable des exilés « survivant sur la communauté́ urbaine de Dunkerque ».

En Tunisie, des dizaines de réfugiés réclament d’être évacués

En Tunisie, des dizaines de réfugiés réclament d’être évacués

Un groupe de 150 manifestants campe depuis une semaine à Tunis, affirmant que leurs droits ne sont pas respectés dans le pays.

Par Lilia Blaise 

Le Monde,  22 avril 2022

Des couvertures sèchent au soleil sur les grilles du local du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), dans le quartier des affaires du Lac, à Tunis. « On les a utilisées ce matin pour se protéger de la pluie », explique Souleymane, un Soudanais de 25 ans. Depuis une semaine, il campe avec plus d’une centaine d’autres réfugiés d’Afrique subsaharienne, dont une dizaine de femmes et huit enfants, sur les trottoirs qui bordent l’agence onusienne.

Ce sit-in vise à réclamer « une évacuation immédiate de la Tunisie» vers des pays tiers « qui respectent nos droits », selon Souleymane. Entre les bidons d’eau et les matelas, Bless, 26 ans, originaire du Nigeria, porte l’un de ses quatre enfants sur son dos. « Parfois, des passants nous donnent à manger, mais nous manquons de choses basiques, comme les couches pour enfants », précise-t-elle.

Parmi les manifestants, nombreux sont arrivés en Tunisie entre 2018 et 2021 après avoir fui la Libye par voie terrestre. Certains ont ensuite tenté de rejoindre les côtes européennes dans des embarcations de fortune. « Beaucoup sont des rescapés de naufrages en mer à qui nous fournissons un logement dans des abris d’urgence et un peu d’argent pendant la procédure d’enregistrement au HCR en tant que demandeur d’asile. Mais nous leur expliquons dès le début que c’est provisoire », déclare Laurent Raguin, représentant adjoint du HCR à Tunis.

Ce dernier évoque des restrictions budgétaires et une surcharge des trois centres du Haut-Commissariat dans le pays, où sont accueillies actuellement 400 personnes. L’hébergement peut durer entre trois à six mois selon le cas et la vulnérabilité de la personne – il est permanent pour les femmes et les enfants.

Une situation complexe

Début février, l’agence a demandé à un certain nombre de réfugiés de céder leur place dans ses centres du sud tunisien. Un premier sit-in a alors débuté dans les locaux de l’agence à Médenine (sud-est). Les manifestants estiment avoir été abandonnés à leur sort puisqu’ils ne souhaitent pas travailler en Tunisie ni s’y installer, seule alternative proposée par l’organisation onusienne.

Pour Laurent Raguin, l’enjeu est d’encourager ces réfugiés « à être autonomes » et de « les stabiliser en Tunisie pour éviter qu’ils ne reprennent des bateaux de fortune ou qu’ils retournent en Libye »« La carte du HCR peut les aider à trouver du travail et elle est respectée par la police. Nous faisons tout pour qu’ils soient contractualisés et non pas exploités », poursuit-il.

Mais la situation demeure complexe, la Tunisie ne disposant d’aucune politique migratoire claire ni de loi sur l’asile, malgré les nombreux plaidoyers des ONG ces dernières années. Signataire de la Convention de 1951, le pays est censé offrir une protection aux réfugiés présents sur son sol. Mais faute de cadre législatif, c’est au HCR seul qu’il revient d’assurer cette mission. L’Etat tunisien garantit seulement un accès aux soins, à l’éducation et à certains services sociaux.

« L’absence de l’Etat fait que l’accompagnement des réfugiés est relégué à la société civile, estime aussi Sherifa Riahi, directrice du bureau tunisien de l’organisation Terre d’asile qui s’est rendue sur le lieu du campement pour évaluer les besoins. La carte de réfugié n’est pas une pièce d’identité, donc beaucoup sont freinés dans leurs démarches administratives comme la location d’un logement. »

Mauvaises conditions de travail, racisme…

Sur le sit-in, les manifestants expliquent que les mauvaises conditions de travail, les bas salaires et le racisme dont ils font souvent l’objet ne les ont pas convaincus de rester en Tunisie, pays de transit vers l’Europe. « Nous avons des amis qui ont travaillé dans les usines et qui ont été exploités, l’un d’eux est décédé sur son lieu de travail. C’est un mensonge de dire que nous pouvons travailler dignement ici », répète Souleymane.

Le pays, qui compte entre 30 000 et 50 000 migrants originaires d’Afrique subsaharienne, est régulièrement épinglé pour des cas de mauvais traitement vis-à-vis de personnes noires, y compris des étudiants en situation régulière.

Mais les options de départ sont limitées pour les participants au mouvement de protestation. « L’évacuation humanitaire » réclamée par certains ne se fait que dans des « conditions très spécifiques », rappelle le HCR, comme en Libye, pour des personnes dans des situations extrêmement vulnérables. Un tel mécanisme n’existe pas en Tunisie. Quant à la « réinstallation » dans d’autres pays, elle n’est proposée que dans des cas très rares et correspond aussi à des critères précis de grande vulnérabilité.

Actuellement, 9 500 réfugiés sont inscrits auprès du HCR, mais seuls 76 ont quitté la Tunisie en 2021 pour être réinstallés dans des pays tiers. Aswhadheya, 31 ans, originaire du Darfour, aimerait pouvoir en bénéficier à son tour. La Soudanaise, qui se prépare à rompre le jeûne du ramadan avec le peu de nourriture qu’elle a pu trouver, dit avoir fait une demande d’asile pour la France il y a deux ans, après quatre ans passés en Tunisie. Sans obtenir de réponse jusqu’à maintenant.

Le Forum des droits économiques et sociaux, une ONG tunisienne, a dénoncé dans un communiqué le 15 avril « l’escalade de la crise humanitaire des réfugiés », tenant le HCR pour responsable de ne pas avoir su leur offrir un environnement sain et respectueux de leurs droits.

Le HCR dit chercher un autre hébergement « temporaire » pour ces réfugiés, mais un dialogue de sourds s’est installé. Les autorités tunisiennes, elles, n’ont pas réagi officiellement. « Avec la fin du ramadan, les départs en mer vont reprendre, il y a donc urgence à trouver une solution avec toutes les parties », insiste Laurent Raguin.

Voix du Nord – 20-04-22 – « À Loon-Plage, la débrouille n’a pas de limite pour apporter l’eau aux exilés »

À Loon-Plage, la débrouille n’a pas de limite pour apporter l’eau aux exilés

Arnaud Stoerkler –

Plusieurs centaines d’exilés fuyant des pays étrangers ont rétabli à Loon-Plage un camp de fortune, toujours dénué d’accès à l’eau courante. Entre citernes et camions douches, les associations veillent à leur apporter cet or bleu au quotidien.

 

Alors que de nombreux réfugiés ukrainiens ont été accueillis au domicile d’habitants du Dunkerquois, d’autres venus du Kurdistan, de Syrie ou encore d’Iran continuent de dormir sous les tentes et cabanes d’un camp de fortune érigé le long d’une voie ferrée à Loon-Plage. Malgré un récent changement de lieu, les conditions de vie y sont toujours difficiles, sans « toilettes ni eau courante », rappelait récemment Claire Millot, secrétaire générale de l’association Salam, qui leur apporte des repas chauds plusieurs fois par semaine.

 

 

Si deux gymnases (Dessinguez à Dunkerque, Buffon à Grande-Synthe) ouvrent leurs douches aux exilés le week-end, plusieurs initiatives ont émergé sur le terrain pour leur permettre de se laver au quotidien : Olivier Schittek, un particulier domicilié à Villeneuve-d’Ascq, vient chaque semaine à la rencontre des migrants du Dunkerquois pour leur proposer la douche de son camping-car, depuis un an. « Je leur mets aussi à disposition des vêtements propres en échange des leurs, que je lave chez moi », confie le Nordiste.

 

 

Un camion comportant quatre douches a aussi été récemment aménagé : fonctionnel depuis le mois de février, il a permis à l’association Help 4 Dunkerque (un « convoi solidaire » venu aider « les réfugiés de la jungle de Dunkerque » entre les mois de janvier et de mars) de fournir une centaine de douches par jour à la population des lieux. Notamment aux femmes et aux enfants, via des horaires spécifiques.

Entre 7 et 10 000 litres d’eau par jour

Depuis le départ de Help 4 Dunkerque, leur camion douche a été confié au collectif N2PC sans frontières. « Il sera accessible deux à trois fois par semaine, en fonction de nos moyens humains », promet l’un de ses membres.

L’eau potable, c’est l’association Roots qui la fournit aux migrants en remplissant quatre grands réservoirs installés parmi les tentes. « Entre 7 et 10 000 litres d’eau sont consommés chaque jour », confie Rachel, une bénévole de Roots. De quoi boire, mais aussi se brosser les dents ou se laver succinctement. « Nous rechargeons les cuves toute la journée, mais notre équipe est petite : avec six personnes en moyenne, c’est parfois difficile. »

 

 

Une difficulté intenable lorsque ces citernes sont « enlevées lors d’évacuations de camp » opérées par les forces de l’ordre, comme l’a déjà constaté Olivier Schittek. « Nous tentons de trouver une solution durable pour cet accès à l’eau avec la communauté urbaine de Dunkerque (CUD) et le Syndicat de l’eau du Dunkerquois, mais les discussions avancent très lentement », explique Rachel.

Le 15 janvier dernier, une douzaine d’associations avaient déjà interpellé « l’État, la CUD et les mairies » pour améliorer la fourniture en eau potable des exilés « survivant sur la communauté́ urbaine de Dunkerque ».

6 ans de la vie d’une association d’accueil 

 

ECNOU, ( prononcez « Eux, C’est NOUs »)  à Montreuil-sur-mer et environs

Née d’un élan citoyen en octobre 2015 à propos de l’exil des Syriens fuyant la guerre, ECNOU s’est lancée, forte de plus de 80 familles dans l’accueil chez l’habitant.

Début janvier 2016, à l’époque de la Grande jungle de Calais, ECNOU s’est mise au service des associations « sur le front » : Salam ; le secours catholique ; Utopia 56 ; gynécos sans frontières ; …etc …et de certaines institutions : le CADA de Berck, la préfecture de Lille…etc…

Il s’agissait essentiellement pour les adhérents de permettre à des exilés en situation d’urgence dans la jungle de trouver un abri pour quelques temps : quelques jours, quelques semaines, quelques mois voire plus.

Cette année-là l’élan de solidarité dans l’arrondissement de Montreuil s’est concrétisé par plus de 6300 nuitées offertes aux exilés. Le territoire d’action de notre association est très large : 40 km Nord-Sud, 40 km est ouest.

Pour beaucoup d’entre nous ce fut la découverte et l’apprentissage de l’accueil dans toutes ses composantes. Le vivre ensemble s’est révélé enthousiasmant, riche, mais exigeant.

Accueillir chez soi en milieu rural nécessite non seulement une présence mais également beaucoup de déplacements pour toutes les activités (cours de français, problèmes de santé, activités sportives ou culturelles, convocation à la préfecture, rencontre avec d’autres compatriotes, aide psychologique…) . Nombreux parmi les accueillants étaient de jeunes retraités.

Puis arriva la fermeture de la jungle, le démantèlement du campement, le déplacement de nombreux exilés dans des centres d’accueil répartis dans toute la France. Pendant ce temps, la compétence des bénévoles accueillants a augmenté ce qui nous a permis d’accompagner plus loin dans le chemin de l’intégration de nombreux exilés. Monter des dossiers à présenter à l’OFPRA, accompagner les exilés lors de leur passage à la CNDA, réalisation des premières demandes de titres de séjour auprès de la préfecture etc. etc.

Au fil des mois les exilés furent de plus en plus nombreux à vouloir essentiellement aller en Grande-Bretagne plutôt que de demander un asile en France. Pour beaucoup d’entre eux, s’éloigner de la zone de traversée, ne pouvait être acceptable que pour quelques jours. Quelques membres de l’association s’inscrirent alors au collectif « Migraction ». (accueil de repos le temps d’un week-end)

Certaines associations, présentes à Calais et Grande-Synthe depuis longtemps, fermèrent. Parmi les familles accueillantes, certaines eurent du mal à gérer l’accueil 24 heures sur 24 : pour beaucoup d’accueillis, le passage de « j’ai besoin de soins » à « je veux être indépendant et gérer moi-même mon avenir » pu s’avérer particulièrement rapide et surprenant pour les familles d’accueil. Accompagner des exilés en difficultés psychiques ou en perte d’espoir fut évidemment, pour certaines familles, une épreuve. Pour d’autres familles d’accueil, ce fut aussi l’époque de devenir grands-parents et-ou la santé devenait moins florissante ce qui a restreint leurs disponibilités.

L’association, pendant ce temps, a tissé des liens de partenariat avec l’aide sociale à l’enfance (ASE) dans la Somme et dans le Pas de Calais. Ces partenariats prirent du temps et de l’énergie avant d’être actifs mais ils ouvrirent d’autres possibilités d’accueil sur des temps plus courts mais tout aussi importants car ils permirent à de jeunes mineurs isolés de se retrouver dans des ambiances familiales qu’ils ne connaissaient plus depuis longtemps.

Arriva alors le COVID qui gela pour de nombreux mois la quasi-totalité de nos activités. Période difficile pour de nombreuses associations.

Début 2022, après plus de15000 nuitées offertes aux exilés, l’association ECNOU s’est retrouvée dans la situation paradoxale d’avoir acquis des compétences certaines, d’être reconnue par les instances départementales et régionales, et dans le même temps de voir ses forces vives fortement diminuées.

À l’heure présente, comme en 2015, le conflit en Ukraine a relancé un élan de solidarité nouveau au sein de l’association. De nombreuses nouvelles familles se sont rapprochées de ECNOU afin d’être accompagnées dans leur souhait de pouvoir héberger les familles ukrainiennes.

Ainsi va la vie de notre association.

contact president@ecnou.org

 

 

Les autorités algériennes érigent des murs anti-émigration sur le littoral oranais

Le Monde, 21 mars 2022, par Safia Ayache (Alger, correspondance)

Les habitants ne décolèrent pas face à ces constructions censées empêcher les jeunes de partir pour l’Europe. D’autant que les candidats à l’exil prennent la mer depuis des lieux plus discrets que les plages de ville.

Ils sont apparus en février. Des panneaux de béton de plus de deux mètres de haut installés sur le littoral d’Oran, deuxième ville d’Algérie (ouest). Depuis, les habitants d’Aïn El-Turck (appelée « Laâyoune » par les Oranais), une sous-préfecture composée de plusieurs communes balnéaires situées à 15 km à l’ouest de la ville, ne décolèrent pas. « On avait la nature pour s’aérer l’esprit, mais même cela nous est confisqué ! », s’agace un commerçant de Trouville, un quartier résidentiel.

Comme lui, les riverains doivent désormais passer par d’étroites ouvertures pour descendre les escaliers qui mènent au banc de sable. Seuls les « portes » et quelques « hublots » laissent apparaître la mer Méditerranée aux promeneurs encore rares de ce mois de mars.

Pendant plusieurs semaines, le doute a plané sur la raison de l’installation de ces murs érigés par une entreprise de construction publique à l’entrée de certaines plages. Des ouvriers, interrogés par la presse locale, ont laissé entendre que les travaux visaient à entraver l’émigration clandestine par la mer.

Dimanche 13 mars, une déclaration du wali (préfet) d’Oran a mis fin aux rumeurs. « Cette décision n’a pas été prise par une seule personne mais par la commission de sécurité de la wilaya dans l’intérêt général », a déclaré Saïd Sayoud. « La situation est arrivée à un point inacceptable, surtout du côté ouest de la wilaya », a-t-il ajouté, prenant à témoin les journalistes : « Vous savez que les départs ont diminué de 70 % et ce n’est pas seulement grâce aux barrières, mais aussi aux efforts des services de sécurité et des acteurs de la société civile », a affirmé le responsable.

Solutions alternatives

Les côtes ouest du pays sont un point de départ privilégié par les « harragas », les candidats à l’exil sans papier vers l’Europe, pour leur proximité avec le sud de l’Espagne. Selon l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes Frontex, un peu plus de 18 000 entrées illégales, majoritairement des ressortissants algériens – suivis par les Marocains –, ont été enregistrées en 2021 via la route méditerranéenne ouest.

Chiffres 2021 de l’émigration vers l’Europe de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes Frontex.

« Désormais, de puissants bateaux permettent de faire la traversée en deux heures. Les prix atteignent 800 000 dinars l’aller pour une place [environ 5 100 euros]. Les passeurs transportent les harragas et, au retour, ils ne reviennent plus à vide mais avec de la drogue », affirme Abdelkader Zouit.

Ce cadre de la Société de l’eau et de l’assainissement d’Oran (SEOR) connaît très bien Aïn El-Turck. « Laâyoune n’a plus rien à voir avec ce qu’elle était. A cause, d’abord, de la multiplication des constructions sur le littoral et maintenant par la faute de ces murs », explique-t-il. Très impliqué dans la vie locale, M. Zouit chapeaute depuis quelques mois un collectif de citoyens engagés dans l’amélioration du cadre de vie dans la région oranaise. Il y a quelques jours, le collectif a adressé une lettre à l’Assemblée populaire de la wilaya pour demander l’arrêt des travaux et proposer des solutions alternatives comme la mise en place de caméras de surveillance.

« Oran est une région touristique et ce mur va nuire à son activité. S’ils veulent construire un mur pour que les passeurs ne puissent pas descendre leurs embarcations, alors qu’ils ne dépassent pas un mètre de haut et soit bâti avec des matériaux qui ne dénaturent pas le paysage », avance Abdelkader Zouit, qui rappelle que ces constructions peuvent s’avérer dangereuses compte tenu du terrain sablonneux.

Fin février, l’un des pans de béton qui filtre l’accès à la plage de Trouville s’est effondré sur les escaliers, sans faire de victimes. Kheïra (le prénom a été modifié) vit à quelques mètres de là. De sa bicoque, elle observe les ouvriers du BTP qui guident l’engin de chantier chargé de déposer les larges panneaux en haut des escaliers menant à la plage. « C’est vrai qu’on n’a pas vraiment le choix mais moi, je suis pour », affirme la mère de famille dans un haussement d’épaules.

Les escaliers qui mènent à la plage de Trouville, quartier de la commune d’Aïn El-Turck, sur la côte oranaise, dans l’ouest de l’Algérie, en févirer 2022.

La sexagénaire, foulard sur la tête et visage déjà bronzé par le soleil, explique vivre ici depuis quarante ans. En été, elle et ses garçons proposent la location de tables et de chaises de plage ainsi qu’un service de restauration aux touristes du pays qui viennent profiter de la mer. « Il y a trop d’incivilités, surtout en période estivale. Ça permettra de réguler le flux de personnes », dit-elle, avant de préciser qu’en réalité les « harragas ne partent pas en plein milieu des habitations » par peur que les riverains ne préviennent la police.

« Terrain vierge à l’abri des regards »

A quelques kilomètres à l’ouest du quartier paisible de Trouville, les entrées vers les plages blanches des Dunes sont elles aussi bloquées par des murs de béton aux ouvertures étroites. De la longue promenade qui surplombe la mer, on aperçoit le cap Falcon, « un terrain vierge, à l’abri des regards et le point le plus proche de la côte ibérique », donc privilégié par les candidats au départ, explique Fouad Hassam, militant des droits humains.

Lui qui travaille depuis plusieurs années sur la thématique de la migration et du droit d’asile reconnaît la difficulté pour les autorités de surveiller une telle zone, mais doute que la construction de murs puisse empêcher les départs. A Aïn El-Turck « les maisons sont construites à moins de dix mètres de la mer et les habitants ont souvent leur propre embarcation. Donc lorsqu’on voit quelques personnes sur une barque, on peut penser qu’il s’agit de plaisanciers ou de pêcheurs », explique-t-il, poursuivant : « Ceux qui veulent partir utilisent cette technique. Ils partent récupérer les harragas en plusieurs fois, sur les rochers, les criques, des îles ou au large. Nous ne sommes pas dans un système de plateforme où les gens feraient la queue pour monter dans un bateau à partir d’une plage. »

« Plus l’administration et l’Etat mettent de moyens pour éliminer ou réduire le phénomène, plus les gens prennent des risques en partant des zones qui sont moins surveillées », soutient le militant, qui rappelle que, ces derniers mois, des embarcations ont quitté les rivages de l’est d’Alger en direction de l’Espagne, soit plus de 400 km en mer.

Dimanche 13 mars, le wali d’Oran a précisé que les constructions représentent « une solution temporaire » et que l’installation de caméras de surveillance sera bouclée d’ici « fin avril, début mai » avant, donc, la 19e édition des Jeux méditerranéens, que la ville accueillera du 25 juin au 5 juillet 2022, et pour lesquels 4 500 athlètes sont attendus.

Condamnation du préfet du Pas-de-Calais

Le Monde avec AFP, publié le 29 mars 20222

Le haut fonctionnaire a été reconnu coupable, mardi, de s’être affranchi de l’autorité judiciaire pour mener cette opération d’évacuation. Une décision qui remet en cause le cadre juridique de nombreuses expulsions, selon les plaignants.

Le préfet du Pas-de-Calais avait été assigné, en décembre 2020, par onze exilés et huit associations de défense des migrants – dont le Secours catholique et l’Auberge des migrants. Les requérants demandaient que soit jugée « illégale » l’évacuation menée le 29 septembre de la même année lors du démantèlement d’un campement de migrants à Calais.

Le préfet a été condamné pour s’être affranchi de l’autorité judiciaire sur la zone dite « du Virval », où campaient plus de 800 candidats au passage en Grande-Bretagne, une décision qui remet en cause le cadre juridique de nombreuses expulsions selon les plaignants. La préfecture, qui a quinze jours pour contester cet arrêt de la cour d’appel de Douai (Nord), n’a pas souhaité réagir à la décision.

Dans son arrêt du 24 mars, dont l’Agence France-Presse a obtenu copie, la cour condamne le préfet pour « voie de fait », lui reprochant d’avoir pris l’initiative de l’expulsion et temporairement privé de liberté les occupants du site, sans cadre juridique adéquat.

Cette décision met à mal l’utilisation récurrente par l’Etat pour procéder à des expulsions de campements migratoires sur le littoral Nord du cadre juridique de la « flagrance » – applicable lorsqu’un délit est constaté depuis moins de quarante-huit heures –, selon l’avocate des plaignants, Me Eve Thieffry. « Le juge confirme ce que disent les associations depuis des années : que le préfet n’a aucun pouvoir personnel à évacuation des personnes sur le littoral et à déplacement sous la contrainte », a-t-elle commenté. Cela « interdit le processus utilisé par la préfecture ».

Absence d’autorisation

Le préfet a assuré avoir agi sur décision du procureur, au lendemain de l’ouverture d’une enquête en « flagrance » sur la présence de 450 tentes. Le tribunal estime, au contraire, qu’il a agi de sa propre initiative, s’appuyant sur un tweet du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, qui disait son « soutien à la Préfecture 62 » pour l’opération.

Le communiqué préfectoral alors publié précisait aussi que les tentes étaient installées depuis « plusieurs semaines », tandis que l’importance des moyens mis en œuvre – dont trente bus – confirmait une organisation en amont. « Ces éléments viennent contredire l’hypothèse de la découverte de l’infraction la veille » de l’évacuation, souligne la cour. Or, « la préfecture du Pas-de-Calais n’a requis aucune autorisation du juge administratif, afin de procéder à l’évacuation », comme exigé pour une opération hors du cadre de la flagrance.

En outre, la préfecture a outrepassé ses prérogatives en privant temporairement de liberté les migrants escortés vers des bus, sous pression de la police, tranche la cour. La présence de nombreux fonctionnaires encerclant les exilés lors de cette évacuation, la plus importante de ce type depuis 2016, était « de nature à constituer une contrainte », relève-t-elle.

Les requérants ont demandé 5 000 euros de dommages pour chacun des exilés et 1 000 euros par association. Sauf recours de la préfecture, une audience doit trancher, le 23 mai, sur ces dommages. En première instance, le 6 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer s’était déclaré incompétent, la préfecture ayant requis la saisine du tribunal administratif. « Les témoignages produits ne permettent pas de conclure à l’emploi de la contrainte durant la phase de mise à l’abri », avait notamment jugé le tribunal.

Le Monde avec AFP

A Calais, des boîtes aux lettres pour éviter les expulsions arbitraires de migrants

« Libération », 2 avril 2022

A l’entrée des campements, des associations ont installé des boîtes portant les noms et numéros de téléphone de migrants pour rappeler aux autorités qu’elles doivent leur permettre de faire valoir leurs droits avant de procéder à des expulsions

par Stéphanie Maurice (Lille)

Des boîtes métalliques, destinées à recevoir du courrier, devant la jungle de Calais. C’est la nouvelle initiative portée par les associations d’aide aux exilés pour tenter de limiter les expulsions de ces campements précaires. En tout cas celles qui, se produisant en moyenne une fois par mois, peuvent vider entièrement un terrain, selon l’association Human Rights Observers (HRO), qui documente les actions de l’Etat envers les exilés. Aujourd’hui, ces derniers seraient 1 600 à Calais, estiment les associatifs. Ils fuient en majorité des pays en guerre, Soudan, Erythrée, Afghanistan, et veulent rejoindre la Grande-Bretagne.

Ces expulsions massives doivent suivre le circuit légal classique : « Le propriétaire du terrain mandate un huissier, pour aller constater l’installation, et recueillir l’identité des personnes, pour les assigner en justice, explique une juriste de HRO. Mais celui-ci y va sans interprète, et demande en français l’identité des personnes ». Ce qui donne des procès-verbaux empreint d’incompréhension mutuelle. Par exemple ce référé affiché avant expulsion devant des ponts de Calais, sous lesquels dorment des exilés, relayé sur Twitter par l’Auberge des Migrants : « Je constate la présence de neuf personnes et de douze tentes. Un feu de camp est allumé. Plusieurs personnes viennent à notre rencontre. Je leur décline mes nom, prénom, qualité et objet de ma mission, et leur demande si elles parlent le français. Ces personnes ne semblent pas comprendre et pour unique réponse, j’obtiens  »Arabic » ».

Conséquence, notent les associations d’aide aux exilés dans leur communiqué de presse, « les habitant.es de ces lieux sont sinistrement considéré.es par les autorités comme des “personnes non-dénommées” », impossibles à identifier, et donc à assigner en justice. « On passe donc à une autre procédure, celle d’une ordonnance sur requête devant le tribunal compétent », explique HRO. « Un juge va statuer, avec les éléments d’une seule des parties ». Le seul point de vue du propriétaire, sans entendre celui des exilés.

« On leur enlève leur humanité »

« C’est horrible de dire qu’ils n’ont pas d’identité, réagit Marguerite Combes, coordinatrice de l’association Utopia 56 à Calais, on leur enlève leur humanité. Les personnes exilées ont un nom, et il est possible de leur parler, à condition d’avoir un interprète ». Les boîtes aux lettres, fabriquées avec des portes métalliques de récup, ont déjà été installées devant trois campements de Calais, dans le quartier de Beau-Marais, et portent les prénoms et noms d’exilés volontaires. « Ce serait désormais de très mauvaise foi de dire qu’ils ne sont pas identifiables », estime Pierre Roques, coordinateur de l’Auberge des migrants. Sollicitée, la préfecture du Pas-de-Calais n’a pas encore réagi à cette initiative.

Les associations espèrent ainsi limiter les expulsions les plus importantes. Restent les évacuations habituelles, qui visent toutes les 36 ou 48 heures les mêmes lieux, une rotation policière qui rythme les matins calaisiens. « C’est quasi quotidien », note Pierre Roques. Les exilés doivent alors déplacer leur tente, par exemple en la posant sur le trottoir. Objectif : repérer les tentes sans occupants, et les enlever. « La police fait un tour, ensuite les gens remettent tout en place », explique le militant associatif. Ces opérations ont comme base légale la flagrance, à condition que l’installation illégale ait été constatée moins de 48 heures avant.

Ces offensives contre la légalité des expulsions menées à Calais ont déjà remporté un succès : la cour d’appel de Douai a condamné le préfet du Pas-de-Calais la semaine dernière pour avoir avoir pris l’initiative de procéder au démantèlement d’un camp d’exilés, en septembre 2020, sans autorisation du juge, normalement nécessaire. La préfecture n’a pas encore indiqué si elle souhaitait faire appel de cette décision.

https://www.liberation.fr/societe/a-calais-des-boites-aux-lettres-pour-eviter-les-expulsions-arbitraires-de-migrants-20220402_RZUETN7LYJF3VDAUOI5C5LUC6E/

Les demandeurs d’asile reçoivent-ils tous 430 euros par mois, comme l’affirme Eric Zemmour?

CheckNews par Marie Thimonnier,  publié le 7 février 2022 dans Libération

Election Présidentielle 2022 dossier

L’aide aux demandeurs d’asile s’élève en moyenne à 206 euros par mois pour les personnes bénéficiant par ailleurs d’un hébergement gratuit. Ce qui contrevient à ce qu’a dit le candidat d’extrême droite, lors de son meeting à Lille.

Question posée par Célia le 7 février,

Vous nous interrogez au sujet d’une déclaration d’Eric Zemmour à propos des aides distribuées aux demandeurs d’asile. Lors de son meeting à Lille, le 6 février, Eric Zemmour a clamé : «Savez-vous qu’en plus d’un hébergement gratuit et de soins gratuits, nous donnons à chaque demandeur d’asile pendant près d’un an une carte bancaire créditée de 430 euros par mois.» Une déclaration publiée et largement reprise par les soutiens du candidat sur les réseaux sociaux.

Le candidat d’extrême droite évoque ici l’allocation pour demandeur d’asile (ADA), mise en place en novembre 2015. Cette aide financière de l’Etat est versée à une personne majeure ayant déposé une demande d’asile auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) ou disposant d’un titre de séjour délivré en qualité de bénéficiaire de la protection temporaire ou d’étranger victime de proxénétisme ou de la traite des êtres humains. L’Ofpra a enregistré 132 614 demandes d’asile en 2019, selon les chiffres du ministère de l’intérieur.

Le versement de l’ADA est conditionné au fait d’accepter les modalités matérielles d’accueil de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), parmi lesquelles un hébergement dans une structure d’accueil. L’ADA prend la forme d’une carte bancaire sur laquelle un montant est déposé tous les mois.

L’ADA est, depuis des années, l’objet de nombreuses contre-vérités de la part de l’extrême droite. CheckNews y a déjà consacré de nombreux articles

Environ 206 euros par mois

En France, le montant forfaitaire journalier de l’allocation varie en fonction de la composition familiale. Une personne sans enfant bénéficie de 6,80 euros par jour, soit 206,83 euros en moyenne par mois. Ce montant atteint 37,80 euros journaliers pour un foyer composé de 10 personnes.

A cela peut s’ajouter un autre montant lié au logement. Un demandeur peut en bénéficier s’il a «accepté l’offre de prise en charge, a manifesté un besoin d’hébergement» mais «n’a pas bénéficié gratuitement d’un hébergement (ou logement)», peut-on lire sur le site du gouvernement. Ce soutien journalier supplémentaire s’élève à 7,40 euros et vient compléter le premier montant. En revanche il reste fixe, peu importe le nombre de personnes dans le foyer.

Un demandeur peut donc toucher jusqu’à 14,20 euros par jour, s’il n’a pas pu être hébergé dans le cadre du dispositif d’accueil. Soit 431 euros par mois. Cette aide est versée jusqu’à la décision définitive concernant la demande d’asile.

111 901 allocataires en 2021

Contrairement à ce que dit Eric Zemmour, qui affirme que ces 430 euros mensuels s’ajoutent à un hébergement gratuit, le montant n’est versé que quand le demandeur, précisément, n’a pas pu bénéficier d’un logement gratuit. A l’inverse, dès lors qu’un demandeur d’asile s’est vu fournir un logement gratuit, l’aide aux demandeurs d’asile se cantonne au premier montant forfaitaire, soit environ 206 euros par mois.

Selon Didier Leschi, directeur général de l’Ofii, «au maximum 30 % des demandeurs d’asile bénéficient de l’aide maximale». Au 31 décembre 2021, le nombre d’allocataires de l’ADA était de 111 901, selon les données transmises par l’Ofii à CheckNews. Parmi les bénéficiaires, «seuls 33 % étaient non hébergés dans le dispositif national d’accueil qui constitue le parc d’hébergement dédié à l’accueil des demandeurs d’asile», détaille Didier Leschi.

Selon les données de la Drees pour 2019, le montant moyen perçu par foyer bénéficiaire au titre de l’ADA était d’environ 400 euros. Ce montant intègre l’aide de base, l’éventuelle aide complémentaire de logement, mais aussi l’éventuelle majoration du montant selon la composition du foyer.

Directive européenne

A noter que l’aide aux demandeurs d’asile n’a rien d’une spécificité française, et que les Etats membres de l’Union européenne sont soumis à des normes communes en matière de politique d’asile, depuis l’entrée en vigueur du régime d’asile européen commun (Raec) en 1999. La directive 2013/33/EU, en date du 26 juin 2013, encadre les conditions d’accueil des demandeurs d’asile et conditionne notamment l’aide matérielle.

«Les Etats membres font en sorte que les demandeurs aient accès aux conditions matérielles d’accueil lorsqu’ils présentent leur demande de protection internationale. Lorsque les Etats membres octroient les conditions matérielles d’accueil sous forme d’allocations financières ou de bons, le montant de ceux-ci est fixé en fonction du ou des niveaux établis dans l’Etat membre concerné, soit par le droit, soit par la pratique, pour garantir un niveau de vie adéquat à ses ressortissants», dispose ainsi l’article 17 de la directive.

Lettre d’info de la Plateforme des Soutiens aux Migrant.e.s n°62

La lettre d’info de la Plateforme des Soutiens aux Migrant.e.s

n°62  // 8 mars 2022
Réseau d’associations intervenant dans les camps d’exilé.e.s de passage
du Nord de la France et du littoral de la Manche

Nous avons besoin de votre soutien,

faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu ! Merci !


La Calais Border Broadcast. C’est une web radio pour et par les personnes exilées à Calais et ailleurs. Porté et financé par le Secours Catholique, c’est un projet collaboratif qui crée du lien entre Calais et l’extérieur. Retrouvez le projet et écoutez !

Infos des lieux de vie 

à la frontière franco-britannique

  • A Calais, de bons et de mauvais réfugié.es ? La maire de Calais a réservé un bel accueil à une famille de réfugiés ukrainiens. « Il faut bien qu’ils aient un hébergement » a-t-elle déclaré. Et puis on se souvient qu’il y a pas si longtemps elle avait protesté publiquement contre l’ouverture, envisagée par l’autorité préfectorale, d’un bâtiment permettant de mettre à l’abri des réfugiés, en situation de grand froid ou de tempête. Ellen Salvi pour Médiapart souligne l’indignité derrière la solidarité. « Pour justifier leur soudain élan d’humanité, certains éditorialistes et responsables politiques n’ont rien trouvé de mieux que de distinguer les bons et les mauvais réfugiés. Ils convoquent leur  » ressemblance » avec les Ukrainiens, mais n’expriment rien d’autre que leur racisme« .  Karen Akoka, sociologue, a travaillé sur l’évolution des politiques d’asile au cours de l’histoire selon la nationalité des demandeurs et des besoins politiques du moment. » Y a-t-il de vrais et de faux réfugiés « , un entretien à voir sur Arte 

  • A Calais, une nouvelle victime de la frontière : une personne vivant sur le terrain Old lidl qui jouxte une voie ferrée, est décédée, percutée par un train le 28 février. Des rassemblements ont eu lieu, comme toujours depuis plusieurs années, le lendemain de l’annonce dans la presse, à 18h30 au parc Richelieu, mais aussi le jour d’après, commémoraction lors de laquelle le frère de la victime a pu s’exprimer. Une lettre à trouver ici, rédigée avec l’aide de ses proches, revient sur les circonstances de son décès.
  • A Cherbourg, en janvier, le CCAS a mené une action dans le campement des personnes en exil pour éradiquer une épidémie de gale. L’association  Itinérance avec l’aide de La Croix Rouge a profité de cette opportunité pour réaménager les installations afin de rendre les conditions de vie plus dignes. Les abris vétustes ont été détruits et remplacés par six grands abris dans lesquels sont installées de petites tentes pour préserver l’intimité de chacun. Un dispositif qui permet d’assurer davantage de protection contre les intempéries.
  • A Grande-Synthe, une expulsion après un mois de « répit ». Le 2 mars sur le campement de Pont à Roseaux : une mise à l’abri selon la police ;  une expulsion du lieu de vie, basée sur une ordonnance sur requête puisqu’il y a un huissier, selon le HRO. Comme trop souvent : un convoi de  26 fourgons et deux bateaux de CRS sur le canal, 3 voitures de la Police Nationale et quatre banalisées, un fourgon de la PAF, 5 personnes de l’AFEJI avec deux bus, deux petits tracteurs Loxam, 2 grandes bennes Ramery, un tractopelle, l’équipe de nettoyage du port autonome, un huissier. Les personnes déplacent leur matériel hors du site. Départ de deux bus, le premier avec 8 personnes, le deuxième avec 2. Au moins 165 tentes et bâches sont emmenées.

Album photos et textes de Laurent Prum. https://laurentprum.typepad.com/

  • A Ouistreham, une cinquante d’exilés soudanais survivent dans des abris de fortune, au milieu des arbres. Contrairement aux campements de Calais  il n’y a pas de « harcèlement policier » quotidien. Installé loin des plages et du centre-ville, le campement est « invisible » aux touristes et aux habitants. Cet isolement leur garantit au moins la tranquillité, et par la même occasion une certaine stabilité. A lire ici. Un squat à Ouistreham ouvert depuis janvier, qui permet l’accès à l’eau et à du répit pour les personnes du campement, est menacé d’expulsion avec une audience le 10 mars à 8h30, voir le communiqué de presse et l’appel à se rassembler devant le Tribunal judiciaire de Caen ici.

et ailleurs

  • Espagne, en deux jours plus de 800 personnes ont  réussi à entrer à Melilla, contre 1 092 sur l’ensemble de l’année 2021, selon les chiffres du ministère espagnol de l’Intérieur. A Melilla, la frontière entre le Maroc et l’Espagne est matérialisée par une triple clôture grillagée pouvant atteindre une dizaine de mètres de haut et d’une longueur d’environ 12 km. Comme celle de Ceuta, elle est équipée de caméras de vidéo-surveillance et de miradors.  A retrouver avec Courrier International

Infos de la PSM

  • Appel à candidatures : la Plateforme des Soutiens aux Migrant.e.s recrute ! L’offre de poste est prolongée jusqu’au 28 mars à minuit. C’est un poste de Chargé.e de mission en charge des formations, et de la valorisation et mobilisation des outils et expériences du réseau associatif à la frontière franco-britannique. Si, vous avez le goût de vous engager dans le soutien d’un réseau associatif en soutien aux personnes exilées bloquées à la frontière, l’offre de poste complète est à trouver ici. Les candidatures sont à envoyer à cette adresse mail : coordination@psmigrants.org
  • La PSM organisait une conférence « Sécurisation de la frontière : des barrières à la privatisation » le 25 février dernier, . Les ressources ont été compilées dans un livret à trouver ici.

Infos des assos

  • Cérémonie des Barbelés awards. Organisée par les 39 organisations du Collectif des Associations Unies (CAU) et les associations locales d’aide aux personnes migrantes, cette remise de prix satirique vise à sensibiliser l’opinion publique à l’hostilité urbaine organisée par les pouvoirs publics pour faire fuir les exilé-es à Calais et Grande-Synthe, par le biais d’innombrables dispositifs dissuasifs. Rendez-vous à Calais, au cinéma l’Alhambra, le 17 mars de 18h à 20h. Inscrivez-vous !
  • France UK Border Research, une bibliothèque de recherches et de sources de base sur la situation des personnes exilées à la frontière franco-britannique. Rassembler ces ressources sur un seul site Web accessible aide les universitaires, les journalistes, les militant.e.s et le public à trouver plus facilement des informations fiables pour informer, orienter ou inspirer leur travail vers la résolution positive de la situation inhumaine dans laquelle les personnes exilées à la frontière sont contraintes.
  • Des bénévoles épuisé.e.s, en souffrance, à Calais mais pas seulement. Jour et nuit, beaucoup d’associatifs travaillent dans l’urgence et même dans leurs moments de répit, leur esprit reste occupé. «  Toi, ça va ? «  «  Comment ça pourrait aller, ici ? « . C’est presque devenu une boutade. Dans les associations, la question de la prise en charge psychologique des bénévoles commence à être prise au sérieux.  Aujourd’hui, un protocole de soutien psychologique est en place qui permet autant aux bénévoles qu’aux salariés des associations de préparer leur venue et leur départ du terrain.  A retrouver avec ASH, Actualités Sociales Hebdomadaires. 

Faire et dire, les personnes premières concernées

  • Abdul Saboor photographie inlassablement le quotidien des personnes exilées à Calais.  Grâce à ses photos, il documente leur vie, les camps, leurs tentatives pour passer en Angleterre. Réfugié afghan, il a lui-même connu cette dure réalité avant d’obtenir le droit d’asile en France. A découvrir un reportage et certaines de ses photos

  • Femmes et frontières. En Europe, la moitié des personnes migrantes sont en réalité des femmes. Pourtant, on ne les entend presque jamais. Partant de ce constat, la journaliste Romane Frachon s’est penchée sur l’invisibilisation de ces survivantes qui fuient leur pays en quête de jours meilleurs dans un podcast  produit par Sphera. Quelles sont les femmes qui migrent ? Quelles sont leurs réalités vécues dans l’UE ? Quel est notre rapport à elles ? Pourquoi sont-elles invisibilisées ? A écouter !

Envie d’agir

  • Appel à une grande maraude solidaire le 12 mars, à Briançon. Un collectif d’organisations organise une journée d’action en soutien aux personnes exilées qui débutera à 14H à la MJC du Briançonnais et se poursuivra à partir de 18H par une grande maraude solidaire au départ de Montgenèvre et des locaux de la Police des frontières locale. Plus d’infos ici.

Belles échappées

  • Une collection d’objets associés au célèbre street artist Banksy est exposé à Sète. Les bénéfices de l’exposition seront versés à l’ONG SOS Méditerrannée. A revoir l’œuvre située sur le poste de secours à Calais. A découvrir « Les vivants, les morts et les marins » écrit par Pia Klemp aux commandes du bateau le « Louise Michel » en 2020, financé par Banksi et destiné à sauver des personnes qui se noient en Méditerranée.

 

 

Parlons-en : échanges, débats, conférences, formations

  • Jeudi 17 mars, séminaire en ligne à 17h : La situation dans les centres de rétention administrative en France. Fortes de leur travail quotidien d’accompagnement juridique des personnes étrangères dans les centres de rétention administrative (CRA), cinq associations (Forum Réfugiés-Cosi, France terre d’asile, le Groupe SOS Solidarités – Assfam, La Cimade et Solidarité Mayotte) constatent et rendent compte des situations dans ces lieux de privation de liberté. Comme chaque année, à l’occasion de la sortie de leur rapport sur l’année 2021, elles  organisent  un webinaire afin de présenter leurs observations et analyses. Pensez à vous inscrire pour y participer !
    Au programme : Présentation du rapport 2021 par les cinq associations présentes dans les CRA // La rétention, késako ? // 2021 en quelques chiffres // Le cas particulier de l’Outre-Mer // Le non-respect par l’administration des décisions de justice // La rétention au temps de la Covid-19 // Et pour finir « Un autre regard » : intervention de Madame Dominique SIMONNOT, Contrôleure générale des lieux de privation de liberté.
  • « Déconstruire la frontière et bâtir des ponts : vers une analyse critique commune de la frontière France-Belgique-Royaume-Uni ». Cette journée d’étude a été organisée le 10 novembre 2021,  par le « Crossborder forum », un collectif d’organisations du Royaume-Uni, de France et de Belgique qui travaillent sur les questions d’exil et de politiques migratoires. L’objectif de cet évènement a été, d’une part, de déconstruire collectivement les fondements juridiques et politiques de cette frontière et, d’autre part, de bâtir des ponts au-delà celle-ci. Les interventions et les échanges, qui ont été enregistrés et sont disponibles en vidéo, ont été résumés dans le document téléchargeable sur le site de Migreurop

Désinfox, outils pour lutter contre les idées reçues

  • De Facto. A découvrir si ce n’est déjà fait cette plateforme de vérification des faits  qui s’attaque aux fausses informations ! Que penser de l’affirmation de Valérie Pécresse, candidate du parti de droite les républicains à la présidentielle, selon laquelle 40 millions de migrants sont entrés dans l’UE sans contrôle ? Explication !

En quête de droit(s) – Outils et infos juridiques

  • La Défenseure des droits s’inquiète des barrières liées au tout numérique. Dans son rapport, Claire Hédon alerte sur les difficultés auxquelles près de 10 millions de personnes sont confrontées dans leurs démarches numériques.  Les personnes étrangères font partie des personnes particulièrement vulnérables aux effets de cette dématérialisation. Faute de parvenir à décrocher un rendez-vous en préfecture pour le renouvellement d’un titre de séjour, certaines se retrouvent sans récépissé et ont pu perdre leur emploi.  Elle pointe l’insuffisance des réponses de l’État. A lire avec Mediapart.
  • Demandes d’asile rejetées, réunifications familiales et rapatriements à la traîne : le désarroi des Afghans de France. Les premières décisions de rejet de demandes d’asile d’Afghans sont tombées. En parallèle, les demandes de réunification familiale ou de rapatriement formulées par des réfugiés déjà protégés en France n’aboutissent pas, laissant les requérants imaginer le pire pour leurs proches restés dans le pays. Selon une avocate spécialisée en droit d’asile «  dans des dossiers où il ne conteste pas la nationalité afghane ni même parfois l’origine du requérant, l’Ofpra commence à considérer qu’il n’y a pas forcément la nécessité de protéger les Afghans face au régime taliban, et estime donc que l’on peut vivre en tant que civil sous ce régime. C’est quand même un sacré positionnement. » A lire le reportage de Nejma Brahim pour Médiapart.
  • Un projet de l’association Safe Passage France sur la problématique spécifique que rencontrent les personnes de nationalité afghane : un soutien est à trouver via cette adresse mail projet-afghanistan@safepassage.fr .La présentation de l’accompagnement réalisé par l’association est à trouver ici.

Pour comprendre / pour cogiter

  • « Fermons les zones d’attente «  ! En zone d’attente, on applique un triptyque : trier, enfermer, expulser. Des milliers de personnes sont enfermées dans des espaces clos aux frontières de la France. Adultes et enfants y sont triés avant d’être, pour la plupart, renvoyés dans leurs pays. Une pratique qui viole les droits fondamentaux, alerte un collectif d’intellectuels, d’associatifs et de personnalités du monde culturel. A lire la tribune dans Libération
  • L’Etat dépense un demi-milliard d’euros d’argent public par an pour harceler quelques milliers de personnes exilées. Déploiement incessant de forces de l’ordre supplémentaires, inflation de barbelés, caméras, murs ou drones… « Comment se fait-il que l’urgence actuelle, le dénuement de ces migrants en mal de traversée de la Manche, ne trouve pas dans ces millions d’euros quelques-uns qu’on appellerait les euros de la dignité ? » écrit le député Sébastien Nadot (Libertés et Territoires) en introduction du rapport de la commission d’enquête parlementaire sur les migrations, paru en novembre 2021. basta! a enquêté sur le coût d’une politique répressive aberrante.
  • Travail des immigré.e.s, l’hypocrisie française. Alors qu’une entreprise sur deux a du mal à recruter, beaucoup d’étranger.e.s ont du mal à obtenir un visa de travail. Le volet emploi de l’immigration pêche par son inadéquation aux besoins du marché. Ils et elles sont artisan.e.s, boulanger.e.s, restaurateurs, boucher.e.s, soignant.e.s. Et toujours un peu plus nombreux à se mobiliser pour empêcher l’expulsion d’un.e employé.e.s immigré.e. sur lequel ces entreprises savent compter. Elles et ils sont aussi étranger.e.s mais diplômé.e.s en France, parfois chercheurs ou chercheuses dans des laboratoires prestigieux, sans pour autant parvenir à renouveler leur titre de séjour condition sine qua non pour pouvoir travailler. Un dossier de Marjorie Cessac pour Le Monde