Avis de la CNCDH sur la loi asile et immigration

Politique migratoire et d’asile Le gouvernement doit revoir sa copie.

A la veille du début de la discussion au Sénat sur le projet de loi « pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile effectif », la Commission nationale consultative des droits de l’homme dénonce un texte à la fois inadapté au regard des objectifs poursuivis et dangereux au regard du respect des droits et des libertés fondamentales des personnes étrangères présentes sur le territoire français.

La France ne fait pas face à une crise de l’asile ni de l’immigration mais à une crise de ses politiques d’asile et d’immigration qui n’ont cessé de se complexifier depuis le début de années 80, au détriment du respect des droits et des libertés fondamentales de milliers de femmes, d’enfants et d’hommes, qui arrivent, le plus souvent démunis, en France métropolitaine et dans les Outre-mer, affirme Christine Lazerges, présidente de la CNCDH. Tout en voulant tranquilliser une partie de la population, le gouvernement a élaboré un texte inutile qui, bien loin de contribuer à une meilleure intégration, fragilise la cohésion nationale, et n’exprime en rien les valeurs essentielles de notre République.

Les aménagements prévus par le projet de loi sont contraires aux fondements de la procédure d’asile Les modifications de la procédure d’asile envisagées par le gouvernement ne répondent qu’aux seuls objectifs de célérité et de rendement au détriment de la protection des demandeurs. Le développement de la procédure accélérée devant l’OFPRA, la réduction du délai de recours devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) de 30 à 15 jours, la suppression dans certains cas du caractère suspensif de ce recours sont autant d’atteintes portées au droit d’asile, au droit à un recours effectif et à l’égalité de traitement. La CNCDH déplore que le projet de loi n’évoque pas la procédure d’enregistrement en préfecture, pourtant source d’engorgement et de nombreux retards, malgré le rôle considérable joué en amont par les associations auxquelles ont été confiées, sans moyens suffisants, la gestion des plates-formes d’accueil des demandeurs d’asile (PADA). La CNCDH dénonce en outre la réduction des garanties procédurales. Elle s’inquiète en particulier d’un risque de recours abusif à la vidéo-audience devant la CNDA, ou le cas échéant, devant le tribunal administratif ou le juge des libertés et de la détention.

Le durcissement du régime d’éloignement confine au bannissement des étrangers en situation irrégulière La volonté d’harmoniser le droit français avec le droit européen et les pratiques européennes au-delà de ce qui est nécessaire ne peut justifier un nivellement par le bas de certaines procédures du régime d’obligations de quitter le territoire français pour les étrangers en situation irrégulière. La CNCDH dénonce en particulier l’extension des situations permettant à l’administration de refuser un délai pour quitter le territoire français, ou de prononcer automatiquement une interdiction de retour sur le territoire, et la réduction des délais de recours. Ces modifications fragilisent encore plus des personnes vulnérables, notamment les victimes de traite des êtres humains.

Les mesures privatives de liberté (rétention administrative et assignation à résidence) sont renforcées. La CNCDH considère qu’aucune raison rationnelle ne permet de justifier l’allongement de la durée maximale de placement en Centre de rétention administrative (CRA). Elle déplore que la rétention administrative soit appliquée de plus en plus comme une mesure punitive, sans respect du principe de proportionnalité, et que les étrangers ainsi privés de liberté ne jouissent pleinement de leur droit de contester ce placement en CRA ou sa prolongation, ou une obligation de quitter le territoire français. La CNCDH dénonce en outre une dérive de la mise en œuvre de l’assignation à résidence des étrangers en attente d’éloignement du territoire vers le régime de l’assignation à résidence appliquée dans le cadre de l’état d’urgence, alors même que ces personnes ne présentent aucun risque pour l’ordre public.

La vulnérabilité spécifique des mineurs, accompagnés ou non accompagnés, et des jeunes majeurs isolés est un des grands oublis du texte. A de très nombreuses reprises, la CNCDH a alerté l’Etat sur la grande vulnérabilité des mineurs étrangers présents sur le territoire français. Il n’est pas tolérable que certains d’entre eux soient enfermés en zone d’attente ou en centre de rétention administrative. La CNCDH demande que de les placements de mineurs, qu’ils soient accompagnés ou non, soient interdits. Elle réaffirme que les mineurs doivent bénéficier des dispositifs de la protection de l’enfance et alerte également sur la situation critique des jeunes majeurs isolés.

Le délit de solidarité existe toujours. Certes de nouvelles exemptions au « délit de solidarité » ont été ajoutées par les députés, mais la CNCDH réaffirme que, même dans sa nouvelle mouture, l’article L.622-4 du CESEDA ne supprime en rien le risque que des personnes ayant apporté une aide soient poursuivies alors même qu’elles ont agi par fraternité et solidarité, sans aucune contrepartie. La CNCDH invite les sénateurs à s’appuyer sur son avis de mai 2017 pour proposer une nouvelle formulation de l’article L. 622-1 qui permettrait une réelle abrogation du délit de solidarité.

L’évolution de la politique européenne d’asile est très inquiétante La CNCDH s’inquiète des orientations prises par l’Union européenne en matière de politique migratoire et d’asile. La CNCDH appelle la France à mobiliser ses partenaires européens pour que soit mise en place une politique européenne en matière d’asile respectueuse des droits fondamentaux, et en particulier en demandant l’abandon des concepts de « pays d’origine sûr » et « pays tiers sûr ».

Retrouvez l’avis de la CNCDH ici

 

Les demandeurs d’asile dublinés peuvent être placés en rétention

http://www.editions-legislatives.fr/content/les-demandeurs-dasile-%C2%AB-dublin%C3%A9s-%C2%BB-peuvent-%C3%AAtre-plac%C3%A9s-en-r%C3%A9tention

Suite à l’adoption de la loi « permettant une bonne application du régime d’asile européen », l’administration peut désormais recourir de manière quasi-systématique à la rétention administrative pour toutes les personnes placées en procédure « Dublin ».

Publiée après que le Conseil constitutionnel en a validé les dispositions contestées (Cons. const. déc., 15 mars 2018, n° 2018-762 DC), la loi n° 2018-187 du 20 mars 2018 « permettant une bonne application du régime d’asile européen » autorise l’administration à placer en rétention administrative les demandeurs d’asile lors de la procédure de détermination de l’État responsable de l’examen de leur demande.
Remarque : selon le rapporteur du projet de loi, à ce jour, seuls 9 % des demandeurs en procédure « Dublin » sont transférés vers l’État responsable de leur demande, les autres étant admis à déposer une demande auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), ce qui engorgerait ce dernier. Ce taux trouve sa source dans plusieurs facteurs. D’abord, comme le souligne la Commission européenne (Doc COM (2015) 675 du 15 décembre 2015) un système inadapté face à une pression migratoire pesant sur un nombre restreint d’États, qui, en conséquence, adoptent des « stratégies d’évitement » afin de ne pas avoir à réadmettre les demandeurs. Ensuite une administration qui n’arrive pas à faire face à la multiplication des procédures. Par exemple, selon les chiffres de la préfecture de police cités par le rapporteur du projet de loi devant le Sénat, l’impossibilité de placer en rétention les personnes ayant déjà fait l’objet de décisions de transfert divisait par deux le nombre d’exécution de ces décisions.
Pour remédier aux lacunes du droit positif, soulignées tour à tour par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 2e ch., 15 mars 2017, aff. C-528/15, Al Chodor), la Cour de cassation (Cass. 1re civ., 27 sept. 2017, n° 17-15.160) et le Conseil d’État (CE, 5 mars 2018, n° 405474), et permettre à l’administration d’avoir les coudées franches dans la mise en œuvre des procédures « Dublin », le législateur modifie plusieurs dispositions du Ceseda et y intègre les conditions légales du recours à la rétention administrative. Désormais le placement peut intervenir avant même qu’une décision de transfert ne soit notifiée, s’il existe un « risque de fuite », notion enfin définie (de façon très large) par le législateur.
Remarque : si la loi du 20 mars 2018 entre en vigueur le lendemain de sa publication (soit le 22 mars 2018), le dispositif reste néanmoins suspendu à la publication d’un décret en Conseil d’État, non encore intervenue, qui doit préciser « les modalités de prise en compte de la vulnérabilité et, le cas échéant, des besoins particuliers des demandeurs d’asile ou des étrangers faisant l’objet d’une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge » (art. 1er, 7°). On notera également que deux dispositions n’ayant pas de lien direct avec le règlement « Dublin » ont été intégrées à la loi, la première relative à l’extension de la durée des ordonnances du juge des libertés et de la détention aux fins de visite domiciliaire (art. 1er, 11°), la seconde à l’assignation à résidence de l’étranger frappé d’une interdiction du territoire ou d’une interdiction de retour (art. 4).
Modification du régime juridique des décisions de transfert pour un délai de recours écourté
Ce n’était pas l’objet de la proposition de loi, mais les sénateurs ont profité d’un effet d’aubaine pour raccourcir le délai de recours contre les décisions de transfert (fixé à quinze jours par la loi du 29 juillet 2015) à sept jours lorsque le demandeur ne fait l’objet d’aucune mesure de surveillance (C. étrangers, art. L. 742-4-I). Un délai jugé conforme au droit à un recours juridictionnel effectif par le Conseil constitutionnel.
Par ailleurs, lorsque la décision de transfert est notifiée alors que l’intéressé est déjà en rétention, le délai de recours est fixé à quarante-huit heures (C. étrangers, art. L. 742-4-II). Pendant ce délai, la décision ne peut pas être exécutée (C. étrangers, art. L. 742-5).
Remarque : le législateur a omis de coordonner les modifications concernant le délai de recours et celui concernant l’exécution d’office, de sorte que, si le délai de recours est de sept jours, la décision ne peut toujours pas être exécutée d’office avant l’expiration d’un délai de quinze jours (C. étrangers art. L. 742-5, al. 2).
Possibilité de placement en rétention au cours du processus de détermination
Avant la réforme, et comme l’avait précisé le Conseil d’État (CE, avis, 19 juill. 2017, n° 408919), seule une mesure d’assignation à résidence pouvait être prononcée à l’encontre d’un demandeur d’asile placé en procédure « Dublin ».
Suite à la publication de la loi du 20 mars 2018, le placement en rétention au cours de la procédure de détermination est désormais possible et, « au nom de l’intérêt général comme de l’efficacité », ainsi que le soulignait l’auteur de la proposition de loi, de nature à donner « au gouvernement les moyens d’action nécessaires pour accroître le nombre de transfert ».
Remarque : conformément aux dispositions de l’article 28 du règlement, l’administration aura, dans ce cas, un délai de trente jours pour transmettre la demande et l’État requis un délai de quinze jours pour y répondre.
Toutefois, le placement en rétention ne peut être décidé à l’occasion du premier rendez-vous au guichet unique. Le cinquième alinéa de l’article L. 741-1 précise en effet qu’au moment de sa présentation à l’administration en vue de l’enregistrement d’une première demande d’asile, l’étranger ne peut être regardé comme présentant le risque non négligeable de fuite défini aux 1° à 10 du II de l’article L. 551-1 du Ceseda (C. étrangers, art. L. 741-1).
Remarque : en tout état de cause, comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel, le fait que le second alinéa de l’article L. 554-1 précise que le placement ou le maintien dure le temps strictement nécessaire à la détermination de l’État responsable (ce qui pouvait laisser penser qu’il pouvait être décidé dès le début de la procédure), « n’a pas pour effet de permettre à l’autorité administrative de prendre cette mesure avant la requête de prise en charge ou de reprise en charge », dès lors que le 1 bis de l’article L. 561-2 (auquel renvoi l’article L. 551-1 modifié), ne concerne que les demandeurs d’asile « faisant l’objet soit d’une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge […] soit d’une décision de transfert ».
La restriction concernant les parents d’enfants mineurs (C. étrangers, art. L. 551-1, III) est également applicable aux demandeurs d’asile en procédure « Dublin ».
Définition élargie de la notion de « risque non négligeable de fuite »
C’est surtout la définition du « risque non négligeable » de fuite qui constitue la clé de voûte du système dès lors qu’elle conditionne la mise en œuvre de la rétention et, selon l’étendue de son spectre, le nombre de personnes pouvant être placées. A cet égard, le législateur a retenu une définition large. Ainsi, pas moins de douze critères permettent à l’administration de prononcer le placement, le risque de fuite pouvant être regardé comme établi, « sauf circonstances particulières », si l’étranger :
– s’est déjà soustrait, dans un autre État membre, à la détermination de l’État responsable de l’examen de sa demande d’asile ou à l’exécution d’une décision de transfert (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 1°) ;
– a été débouté de sa demande d’asile dans l’État membre responsable (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 2°) ;
– est de nouveau présent en France après l’exécution effective d’une mesure de transfert (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 3°) ;
– s’est soustrait à l’exécution d’une précédente mesure d’éloignement (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 4°) ;
– refuse de se soumettre au relevé de ses empreintes digitales ou les altère pour empêcher leur enregistrement (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 5°) ;
– aux fins de se maintenir sur le territoire, a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d’identité ou de voyage (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 6°) ;
– a dissimulé des éléments de son identité, de son parcours migratoire, de sa situation familiale ou de ses demandes antérieures d’asile, le fait qu’il ne peut justifier de la possession de documents d’identité ou de voyage en cours de validité ne pouvant suffire à établir la dissimulation (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 7°) ;
– qui ne bénéficie pas des conditions matérielles d’accueil ne peut justifier du lieu de sa résidence effective ou permanente (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 8°) ;
– qui a refusé le lieu d’hébergement proposé en application de l’article L. 744-7 ne peut justifier du lieu de sa résidence effective ou permanente ou, s’il a accepté le lieu d’hébergement proposé, l’a abandonné sans motif légitime (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 9°) ;
– ne se présente pas aux convocations de l’administration, ne répond pas aux demandes d’information et ne se rend pas aux entretiens prévus dans le cadre de la procédure de détermination ou de l’exécution de la décision de transfert sans motif légitime (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 10°) ;
– s’est déjà soustrait aux obligations prévues aux articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1, L. 561-2 et L. 742-2 du Ceseda (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 11°) ;
– a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à la procédure de détermination de l’État responsable de l’examen de sa demande d’asile ou à la procédure de transfert (C. étrangers, art. L. 551-1, II, 12°).
Remarque : à l’instar de l’appréciation du risque de fuite en matière de retour, l’administration n’est pas liée par ces critères et, comme l’e rappelle le Conseil constitutionnel, leur mise en œuvre doit s’opérer « sur la base d’une évaluation individuelle prenant en compte l’état de vulnérabilité de l’intéressé et de tenir compte d’éventuelles circonstances particulières », sous le contrôle du juge.
Une rétention pour un temps strictement nécessaire
Aux termes de la loi, le placement en rétention n’est autorisé que pour le temps strictement nécessaire à la procédure de détermination de l’État responsable et de l’exécution de la décision de transfert.
Remarque : lorsque la personne est placée en rétention, le délai de saisine de l’État responsable est d’un mois à compter de l’introduction de la demande de protection (Règl. no (UE) 604/2013 du Parlement européen et du Conseil 26 juin 2013, art. 28.3, al. 2). Si l’État ne répond pas dans un délai de deux semaines, il a l’obligation de reprendre en charge le demandeur. Le délai d’exécution du transfert est porté à six semaines à compter de l’acceptation expresse ou implicite de l’État requis ou du moment où le recours qui a été introduit n’a plus d’effet suspensif (art. 28.3, al. 3). Si les délais de présentation de la requête et de transfert ne sont pas respectés, il est mis fin à la rétention (art. 28.3, al. 3). Dans tous les cas, la CJUE a jugé qu’un demandeur en procédure « Dublin » ne peut être placé en rétention au-delà d’une durée de deux mois après que l’État requis a accepté le transfert, ou six semaines après que l’effet suspensif du recours a cessé (CJUE, 13 sept. 2017, aff. C-60/16, Amayry).
L’article L. 554-1 précise que lorsqu’un État requis a refusé de prendre en charge ou de reprendre en charge l’étranger, il est immédiatement mis fin à la rétention, sauf si une demande de réexamen est adressée à cet État dans les plus brefs délais ou si un autre État peut être requis. En cas d’accord d’un État requis, la décision de transfert est notifiée à l’étranger dans les plus brefs délais.
Possibilité d’appliquer la procédure « Dublin » aux demandes d’asile en rétention
Selon le rapporteur du projet de loi devant le Sénat, l’administration ne pouvait jusqu’alors pas maintenir en rétention un demandeur ayant déposé sa demande à son arrivée au centre, la loi imposant qu’une attestation de demande d’asile soit délivrée ou que la France se reconnaisse responsable, son dossier étant alors présenté à l’Ofpra.
Désormais, lorsqu’un étranger placé en rétention présente une demande d’asile, l’autorité administrative peut procéder à la détermination de l’État responsable et, « le cas échéant, à l’exécution d’office du transfert dans les conditions prévues à l’article L. 742-5 » du Ceseda (C. étrangers, art. L. 556-1). Et, si la France est l’État membre responsable de l’examen, l’administration peut décider du maintien en rétention si les conditions prévues par cette même disposition sont réunies.
Remarque : l’articulation des différents régimes risque d’être source de confusion. En effet, la procédure « Dublin » doit précéder la décision de maintien en rétention mais, au stade de la détermination, le « maintien » doit être justifié par un risque de fuite. Le préfet doit-il alors prendre une décision de maintien en rétention spécifique à la procédure de détermination, puis une nouvelle décision de maintien une fois l’État responsable déterminé ? Une telle succession de décisions serait une option protectrice des droits des personnes, mais provoquerait une multiplication des recours.
Unification du régime de l’assignation à résidence
A travers la loi du 20 mars 2018, le législateur a également entendu simplifier le régime de l’assignation à résidence de courte durée en autorisant à y recourir, sur ce fondement, au cours de la procédure de détermination de l’État responsable et après la notification de la décision de transfert (C. étrangers, art. L. 561-2).
Toutefois, par dérogation au droit commun, la durée maximale de l’assignation à résidence peut être renouvelée deux fois pour les personnes en procédure « Dublin », ce qui la porte à une durée de cent trente-cinq jours (C. étrangers, art. L. 561-2, 10e al.)
Intégration surabondante de garanties préexistantes
Le législateur a assorti le processus décisionnel de deux garanties. Ainsi :
– l’autorité administrative doit prendre en compte la vulnérabilité du demandeur et l’évaluer avant le placement en rétention. Un décret en Conseil d’État doit encore préciser les modalités de cette évaluation (C. étrangers, art. L. 553-6) ;
– au moment de l’enregistrement de la demande d’asile, le demandeur doit recevoir, « dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu’il la comprend, une information sur ses droits et obligations en application [du règlement], dans les conditions prévues à son article 4 ».
Remarque : ces précisions sont en réalité sans portée, la vulnérabilité faisant l’objet d’une évaluation dès le premier entretien (et il est peu probable que l’état de la personne évolue entre cet entretien et le rendez-vous précédant le placement) et les intéressés étant informés de leurs droits et obligations dès le début de la procédure par la remise de deux brochures.
Pas de transfert en cas de défaillances systémiques
Enfin, profitant de la proposition de loi, le législateur a intégré la dérogation à l’application des critères du règlement en cas de défaillances systémiques dans la procédure d’asile de l’État responsable (C. étranges, art. L. 742-7).
Remarque : si, comme le rappellent ces dispositions, la procédure de transfert ne peut être engagée vers cet État, le règlement précise toutefois que, dans ce cas, l’État membre doit poursuivre la procédure de détermination afin de confier, le cas échéant, la responsabilité de l’examen de la demande à un autre État membre.

Amnesty // Les dessous du projet de loi asile et immigration

https://www.amnesty.fr/refugies-et-migrants/actualites/les-dessous-du-projet-de-loi-asile-et-immigration

Les dessous du projet de loi « asile et immigration »

 Publié le 22.03.2018.

Nouveau gouvernement, nouveau projet de réforme de la loi sur les étrangers. Cette réforme de trop ne va rien résoudre, pire elle met en danger les droits humains des réfugiés et migrants.

Moins de deux ans après les réformes engagées par le précédent gouvernement, le nouvel exécutif entend à son tour modifier les règles relatives à l’asile et au droit des étrangers. Depuis 1980, 16 lois majeures sont venues modifier les conditions d’entrée et de séjour ou d’asile.

Le droit des étrangers, et le droit d’asile, sont soumis, peut être plus que toute autre branche du droit, aux fluctuations politiques. Il va sans dire que les droits des étrangers ne sont ni les motivations ni les objectifs premiers de ces réformes.

Les droits humains sacrifiés au nom de l’efficacité

Cette nouvelle réforme vise l’efficacité. La procédure d’asile et les mesures d’éloignement doivent ainsi être accélérés.

Un objectif avant tout politique et qui ne devrait pas conduire à porter atteinte aux droits humains des personnes concernées.

Or, à la lecture du projet de loi, l’efficacité prend clairement le dessus .

Pendant la procédure d’asile, tous les délais seront réduits. Certes, voir sa demande d’asile examinée rapidement est important pour celles et ceux qui cherchent une protection. Cependant, ces personnes ont besoin de temps pour formuler leur demande dans de bonnes conditions.

L’accélération prévue de la procédure, ne tient pas compte de la situation spécifique de ces personnes qui souvent sont loin de maitriser la langue ou les démarches. Cette accélération est une menace pour le respect de leurs droits

Réfugiés vs migrants

Le nouveau projet de loi oppose dangereusement les réfugiés et les migrants. Il indique clairement que pour protéger les réfugiés, il faut renvoyer des migrants. Rogner les droits des migrants, comme les priver de liberté, est cyniquement légitimé par une fin ‘’humanitaire’’.

Les migrants comme les réfugiés sont des personnes. Un Etat a certes la possibilité de décider si une personne migrante peut ou non demeurer sur son territoire ,mais, dans tous les cas, l’Etat est tenu de respecter leurs droits humains.

Lire aussi : les 3 mesures les plus dangereuses du projet de loi

Une réforme dangereuse qui ne résoudra rien

Le système d’asile en France dysfonctionne depuis de nombreuses années, malgré la multiplication des réformes. Ces dysfonctionnements, tels que des délais très longs pour enregistrer les demandes, l’insuffisance de places d’accueil, ne sont pas exclusivement imputables à la récente hausse des demandes d’asile. Cela fait plus de vingt ans que ces problèmes existent, à des degrés divers et que nous n’avons pas cessé de les dénoncer.

Et ces différentes réformes ne visent jamais les vrais problèmes et n’apportent pas de réponses permettant de garantir et de respecter les droits des personnes.

Le respect des droits humains implique de faire des choix. Ces choix passent par davantage de moyens pour accueillir et héberger les personnes, pour enregistrer les demandes d’asile et pour réaliser des auditions.

Plus globalement, la question des migrations, ou de l’immigration, est toujours posée comme un problème, une menace, un mal. Pour sortir de l’impasse, il faut changer d’approche : la migration a toujours existé et elle existera toujours. C’est une réalité. Ce n’est pas un « problème », mais un défi et une opportunité à bien des égards.

A propos du « délit de solidarité »

La loi française n’est toujours pas en conformité avec les dispositions du Protocole de Palerme. C’est à dire qu’il ne doit pas exister de poursuites pénales possibles en cas d’aide à une personne en situation irrégulière dès lors que cette aide n’a pas donné lieu à un avantage financier ou un autre avantage matériel.

Non aux attaques contre les droits des réfugiés et des migrants !

Interpellez les Présidents de Groupe à l’Assemblée Nationale sur le projet de loi Asile et immigration

Signez la pétition

 

Décision du Conseil Constitutionnel sur la rétention des dubliné.e.s

Décision n° 2018-762 DC du 15 mars 2018 – Loi permettant une bonne application du régime d’asile européen

Par sa décision n° 2018-762 DC du 15 mars 2018, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la loi permettant une bonne application du régime d’asile européen, dont il avait été saisi par plus de soixante sénateurs. La portée de sa décision est à appréhender au regard des seules dispositions de la loi dont il était saisi.
Les requérants contestaient certaines dispositions des articles 1er et 3 de la loi, modifiant les conditions de placement en rétention administrative et d’assignation à résidence des demandeurs d’asile relevant du règlement européen du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (règlement dit « Dublin III »).
Les dispositions contestées modifient le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile afin de définir les conditions dans lesquelles le demandeur d’asile présentant un risque non négligeable de fuite peut être placé en rétention. Elles définissent douze critères en fonction desquels ce risque peut être regardé comme établi. Elles réduisent de quinze à sept jours le délai de recours contre la décision de transfert vers l’État responsable de l’examen de la demande d’asile, lorsque l’étranger ne fait pas l’objet d’une mesure de placement en rétention ou d’assignation à résidence.
Trois séries de griefs étaient formulés contre ces dispositions.
En premier lieu, il leur était reproché de méconnaître l’objectif à valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, faute de permettre de déterminer le moment à partir duquel l’étranger relevant du règlement européen dit Dublin III pourra désormais être mis en rétention.
Le Conseil constitutionnel écarte ce grief en jugeant qu’il résulte des dispositions contestées que le placement en rétention ne peut concerner qu’un demandeur d’asile faisant l’objet soit d’une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge par un autre État, soit d’une décision de transfert vers l’État responsable de l’examen de sa demande. Il en va de même pour le placement en rétention d’un demandeur d’asile qui était auparavant assigné à résidence.
En deuxième lieu, il était soutenu que les dispositions contestées méconnaissaient la liberté individuelle en autorisant, même en l’absence de menace pour l’ordre public ou de nécessité de bonne administration de la justice, le placement en rétention de demandeurs d’asile alors que ceux-ci ne font pas nécessairement, à ce stade de la procédure organisée par le règlement du 26 juin 2013, l’objet d’une mesure d’éloignement, et en autorisant le placement en rétention d’un étranger sans caractériser un risque de fuite de celui-ci.
Le Conseil constitutionnel relève à ce titre, d’une part, que le placement en rétention intervient à un stade de la procédure où l’autorité administrative dispose d’indices sérieux que l’examen de la demande d’asile échoit à un autre État en application du règlement européen du 26 juin 2013. Le placement ne peut être décidé qu’à l’encontre d’un étranger qui présente un risque non négligeable de fuite, alors qu’il est susceptible d’être transféré vers un autre État. Cette mesure est donc motivée par la sauvegarde de l’ordre public. Il appartient à l’administration d’apprécier, sous le contrôle du juge, les situations caractérisant un risque non négligeable de fuite sur la base d’une évaluation individuelle prenant en compte l’état de vulnérabilité de l’intéressé et de tenir compte d’éventuelles circonstances particulières ne permettant pas de regarder le risque allégué comme établi. Si au nombre des situations pouvant caractériser un tel risque de fuite comptent l’altération de ses empreintes digitales pour empêcher leur enregistrement, la fraude aux titres d’identité, de séjour ou de voyage, la dissimulation de son identité, de son parcours ou de sa situation, notamment vis-à-vis de l’asile, l’appréciation du caractère volontaire de ces altérations, fraudes ou dissimulations est placée sous le contrôle du juge.
D’autre part, le placement en rétention n’est susceptible d’intervenir qu’en dernier ressort, si une mesure d’assignation à résidence n’est pas suffisante pour parer au risque de fuite. La mesure de rétention, qui ne peut être prolongée au-delà de quarante-huit heures qu’avec l’accord du juge judiciaire, ne peut durer plus de quarante-cinq jours.
De l’ensemble de ces éléments, le Conseil constitutionnel déduit que l’atteinte portée à la liberté individuelle doit être regardée comme nécessaire, adaptée et proportionnée à l’objectif poursuivi par le législateur.
Enfin, selon les sénateurs requérants, la réduction du délai de recours contre la décision de transfert lorsque l’étranger ne fait pas l’objet d’une mesure de placement en rétention ou d’assignation à résidence portait atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif.
Le Conseil constitutionnel écarte ce grief en relevant notamment que, lorsque l’intéressé n’est pas assisté d’un avocat, les principaux éléments de cette décision lui sont communiqués dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend, que la décision de transfert ne peut pas faire l’objet d’une exécution d’office avant l’expiration d’un délai de quinze jours et que le recours contre cette décision a un caractère suspensif.
Pour ces motifs, le Conseil constitutionnel juge conformes à la Constitution le premier alinéa et les 5° à 8° du paragraphe II de l’article L. 551-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le second alinéa de l’article L. 554-1 et les 1° bis et dernier alinéa du paragraphe I de l’article L. 561-2 de ce même code, dans leur rédaction résultant de l’article 1er de la loi permettant une bonne application du régime d’asile européen, ainsi que le mot « sept » figurant au premier alinéa du paragraphe I de l’article L. 742-4 du même code, dans sa rédaction résultant de l’article 3 de cette même loi.

Pays tiers surs : la France au centre du jeu européen?

http://www.europeanmigrationlaw.eu/fr/articles/points-de-vue/pays-tiers-surs-la-france-au-centre-du-jeu-europeen

28/02/2018

Par Yves Pascouau

Au mois de décembre 2017, le gouvernement français a décidé de retirer la notion de «pays tiers sûr» du projet de loi pour une immigration maitrisée et un droit d’asile effectif. Cette annonce a été reçue avec satisfaction par les parties prenantes opposées au concept. Cependant, ce retrait ne marque pas la fin des discussions. En effet, une proposition de règlement actuellement négociée au niveau de l’Union européenne prévoit l’adoption d’une liste européenne commune de «pays tiers sûrs».

In December 2017, the French government decided to remove the notion of « safe third country » of the draft Law for a managed immigration policy and an effective right of asylum. This announcement was received with satisfaction by the stakeholders who were against the concept. However, this removal does not mark the end of the discussions. Indeed, a proposal of regulation currently under negociation at the European level plans the adoption of a common European list of « safe third countries ».

Au mois de décembre 2017, le gouvernement français a décidé de retirer la notion de « pays tiers sûr » du projet de loi pour une immigration maitrisée et un droit d’asile effectif. Si cette notion avait été maintenue, elle aurait permis aux autorités nationales de déclarer une demande d’asile irrecevable au motif que le demandeur d’asile aurait pu ou aurait dû déposer sa demande dans un pays tiers jugé sûr.

Cette annonce a été reçue avec satisfaction par les parties prenantes opposées au concept. Cependant, ce retrait de la loi en préparation ne marque pas la fin des discussions. En effet, une proposition de règlement actuellement négociée au niveau de l’Union européenne (UE) prévoit l’adoption d’une liste européenne commune de « pays tiers sûrs ».

Donner d’une main pour reprendre de l’autre ?

Le gouvernement français a-t-il accepté de retirer le concept du projet de loi en sachant que ce dernier réapparaitrait dans un règlement de l’UE sous la forme d’une liste européenne commune ? C’est une hypothèse, mais elle semble peu convaincante.

D’une part, la société civile est bien informée des procédures en cours à « Bruxelles ». Toute tentative de contourner les oppositions nationales par la voie européenne serait immédiatement repérée. Une telle approche aurait pour effet d’ajouter de la tension et de la suspicion dans un dossier qui n’en manque pas.

D’autre part, la notion de « pays tiers sûr » pose un problème juridique. De nombreux rapports ont souligné que cette notion est incompatible avec la Constitution. Cette dernière dispose que « les autorités de la République ont toujours le droit de donner l’asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif ». User du concept de « pays tiers sûr » pour déclarer une demande irrecevable, c’est-à-dire rejeter la demande sans l’examiner au fond, reviendrait à méconnaître une garantie essentielle du droit d’asile inscrite dans la Constitution.

Enfin, le maniement de cette notion est en pratique assez complexe. Si celle-ci fonctionne pour les États membres de l’UE qui partagent des règles et des valeurs communes en matière d’asile, les pays tiers doivent de leur côté présenter un haut niveau des garanties et de protection. Or, cela impose de s’assurer que le cadre juridique du ou des pays tiers soit conforme à ces exigences mais également que ces règles soient effectivement et correctement mises en œuvre.

Une nouvelle donne

Sauf à pêcher par excès de naïveté, ces éléments autorisent à valider l’hypothèse que le retrait du concept de « pays tiers sûr » du projet de loi s’appuie sur des motifs sérieux et ne repose pas sur une stratégie politique de contournement.

La logique voudrait donc que la France conserve cette position dans la négociation européenne. Si elle ne pourra vraisemblablement pas obtenir le retrait du concept de « pays tiers sûr » du futur règlement européen, elle pourra a minima plaider pour l’adoption d’une liste optionnelle et non pas obligatoire de « pays tiers sûrs » comme le propose la Commission européenne.

Compte tenu du poids de la France dans le dispositif européen, il est évident que l’annonce du retrait de la notion de « pays tiers sûr » du projet de loi n’est pas passée inaperçue. Cette donne peut contribuer à modifier les rapports de force dans la négociation.

Au niveau du Conseil, les États qui expriment des doutes sur la constitutionnalité de la notion de « pays tiers sûrs », comme l’Italie et la Suède, peuvent se fédérer autour de la France. La position française peut également permettre à certains États, qui sont jusque-là restés silencieux, de prendre position sur cette question et défendre l’adoption d’une liste optionnelle. Cet effet d’entraînement peut s’étendre au Parlement européen et à la société civile, qui pourraient trouver dans ce retrait un motif de remise en cause de la notion et de son utilisation.

Les enjeux de clarifications

Mais au-delà de la question du caractère obligatoire ou optionnel de la liste européenne de « pays tiers sûrs », la négociation de la proposition doit aussi permettre de clarifier certains points sensibles.

Cela concerne en premier lieu la question du lien de connexion. Le renvoi de la personne vers un « pays tiers sûr » peut-il s’exercer parce que la personne a simplement transité par ce pays ou parce que la personne a un lien de connexion suffisant avec ce pays ? En fonction du choix, on privilégiera le simple renvoi de la personne ou on prendra en considération les perspectives de son intégration dans le pays tiers.

La seconde clarification porte sur la question de la nature de la protection offerte dans un « pays tiers sûr ». Les États européens peuvent-ils accepter de transférer des demandeurs d’asile dans des pays où ils jouissent d’une protection « suffisante », comme le propose la Commission, ou doivent-ils exiger que la protection accordée dans ces pays soit « effective », comme le prévoit le droit français ?

Loin d’être un simple débat de qualification juridique, cette question est déterminante car elle sous-tend toute la logique, pour ne pas dire toute la philosophie, du concept de « pays tiers sûr ». Si l’on convient que cette notion permet aux États européens de « sous-traiter » l’asile à des pays tiers, ce transfert de responsabilité ne peut en aucun cas se faire « au rabais ».

Ce n’est qu’à la condition que le pays tiers accorde une protection « effective » que ce transfert de responsabilité peut s’opérer. En pratique cela signifie, d’une part, que ce pays dispose d’un cadre juridique qui garantit l’examen de la demande d’asile et l’octroi du statut de réfugié et, d’autre part, qu’un juge indépendant puisse contrôler l’application correcte et effective de ces règles.

Autrement dit, les États membres de l’UE ne peuvent transférer leur responsabilité en matière d’asile qu’à la seule condition que la protection qui est accordée dans les pays tiers soit identique à celle qui est accordée dans l’UE.

Si l’on considère avec le président Emmanuel Macron que le droit d’asile est « sacré », il faut alors hisser la notion de « pays tiers sûr » à la hauteur de cette exigence. C’est à la préservation du droit d’asile dans toutes ses dimensions que les autorités françaises doivent désormais œuvrer dans le cadre des négociations européennes.

Yves Pascoua

Tribune d’universitaires spécialistes de l’asile

Tribune d’universitaires spécialistes de l’asile – Non à une procédure d’asile au rabais ! – Administratif | Dalloz Actualité

Par Collectif d’universitairesle 23 Février 2018

Au moment même où le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, présentait ce 21 février son projet de loi « pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile effectif », les personnels de Cour nationale du droit d’asile (CNDA) et de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) manifestaient afin de revendiquer le retrait de cette réforme qui ne vise en réalité pas à rendre le droit d’asile plus effectif mais à en restreindre davantage l’accès.

En notre qualité d’universitaires spécialisés dans les questions de droit d’asile, nous partageons le constat des agents de la juridiction de l’asile en grève depuis le 13 février.

Les agents de l’asile ne défendent en effet pas que leurs intérêts corporatistes, mais l’exercice effectif de ce droit fondamental, durement menacé par la réforme en cours et la logique du chiffre dans le traitement des dossiers – déjà en cours.

Certes la dernière réforme de l’asile de juillet 2015, qui a fait passer les délais d’examen des demandes d’asile de 24 à 9 mois, était nécessaire. Mais l’objectif du gouvernement d’une procédure bouclée en moins de 6 mois, soit en 2 mois pour l’OFPRA et en 4 mois pour la CNDA, n’est pas humainement souhaitable ni administrativement réaliste.

Ce n’est pas humainement souhaitable car cela se fera au détriment des demandeurs d’asile qui n’auront pas le temps, peu après leur arrivée en France, souvent après un périple traumatisant, de se poser et de construire leur récit d’asile dans de bonnes conditions et avec les soutiens nécessaires.

Ce n’est pas réaliste car cela suppose de contracter les délais d’examen des demandes d’asile en augmentant les cadences déjà infernales dans les auditions à l’OFPRA et à la CNDA, au détriment de la qualité de l’examen des dossiers.

Le système français est pourtant déjà l’un des plus « productif » en Europe.

Alors qu’en 2017, l’OFPRA a été saisi de plus de 100 000 demandes d’asile, l’Office a traité plus de 115 000 décisions et accordé une protection internationale à près de 43 000 personnes. En 2017, le taux de protection s’établit à 27 % à l’OFPRA et à 36 % en prenant en compte les décisions de la CNDA. De ce fait, le délai moyen d’attente pour les demandeurs à l’OFPRA est tombé à près de 3 mois (114 jours), deux fois moins qu’en janvier 2015.

Quant à la CNDA, elle a enregistré en 2017 près de 54 000 recours, contre 39 986 en 2016, et elle a traité près de 48 000 décisions, dont plus de 18 000 en juge unique ou par voie d’ordonnances. Le délai moyen de jugement est d’un peu plus de 5 mois et la protection accordée à un peu plus de 8 000 personnes. Les 214 rapporteurs de la CNDA traitent déjà chacun 2 à 3 dossiers par jour.

Pour parvenir à son objectif, le gouvernement envisage, par le projet de loi Collomb, des mesures qui visent en réalité à entraver l’accès au droit d’asile :

  • réduction de 120 à 90 jours du délai pour déposer une demande d’asile une fois arrivé sur le territoire ;
  • réduction du délai de recours devant la CNDA à 15 jours au lieu d’un mois, généralisation des audiences vidéos, comme cela se pratique déjà outre-mer, y compris sans le consentement de l’intéressé ;
  • suppression dans certains cas (pays d’origine sûr, etc.) du recours suspensif devant la CNDA avec en contrepartie une demande de sursis à exécution devant le tribunal administratif dont l’issue serait très aléatoire ;
  • multiplication des cas de retrait des conditions matérielles d’accueil ;
  • etc. etc.

Cette réforme risque de multiplier les cas d’étrangers ni « expulsables », ni éligibles à l’asile en raison de ces entraves procédurales.

Une proposition de loi « Warsmann », que le gouvernement a soutenu et qui vient d’être adoptée, a parallèlement multiplié les cas dans lesquels les « Dublinables » pourront être placés en rétention, et ce dès le début de la procédure.

On sait aussi que cette réduction des délais se fera au prix de la multiplication des cas d’examen des dossiers en procédure accélérée et avec une multiplication des ordonnances dites de « tri » ou du traitement en juge unique. Cela concerne déjà près de 50 % des dossiers, dont l’examen ne bénéficie pas de la garantie apportée par une formation collégiale composée d’un magistrat mais aussi d’un assesseur du HCR et d’un assesseur du Conseil d’État.

Dans son avis du 13 février, le Conseil d’État critique d’ailleurs sévèrement, sur un ton peu habituel pour le Palais-Royal, la méthode utilisée par le gouvernement et la pertinence même d’un tel projet de loi bricolé à la va vite, moins de deux ans après l’adoption de la dernière réforme, sans réelle évaluation de celle-ci. À plusieurs reprises dans cet avis, le gouvernement est mis en garde sur les risques de contrariété avec la Constitution et avec les engagements européens de la France. Il recommande aussi « instamment » de renoncer à certaines restrictions procédurales « contraires aux exigences d’une bonne administration de la justice ».

Pour toutes ces raisons, nous partageons les inquiétudes des agents de l’asile en grève. Nous appelons de nos vœux d’une part à une évolution du statut de l’OFPRA qui pourrait être utilement transformé en autorité administrative indépendante afin de renforcer son efficacité et son indépendance et en donnant davantage de garanties statutaires et de perspectives de carrière aux officiers de protection. D’autre part, il serait souhaitable de faire évoluer le statut des personnels de la CNDA, qui est devenue une vraie juridiction rattachée au Conseil d’État depuis 2007. Ses agents, particulièrement ses rapporteurs, qui sont des contractuels pour 170 d’entre eux, n’ont pas de réelles perspectives de carrière. Les autorités gestionnaires doivent cesser de multiplier les recrutements sous contrats à durée déterminée et doivent tout mettre en œuvre pour ouvrir des perspectives de titularisation.

Enfin à raison de l’attentisme – pour ne pas dire la surdité – du ministère de l’Intérieur et du vice-président du Conseil d’État face à la mobilisation des agents de l’asile, la nomination d’un médiateur s’impose, comme cela avait déjà été le cas avec la nomination de Jean-Marie Delarue, l’ancien contrôleur général des lieux de privation de liberté, lors du dernier conflit à la CNDA.

 

 

Premiers signataires :

Serge Slama, Professeur de droit public, université Grenoble-Alpes
Marie-Laure Basilien-Gainche, Professeure de droit public, université de Lyon 3
Ségolène Barbou des Places, Professeure à l’Ecole de droit de la Sorbonne, université Paris 1 Panthéo -Sorbonne
Myriam Benlolo-Carabot, Professeure de droit public, université Paris Nanterre
Caroline Lantero, Maître de conférences en droit public, université Clermont Auvergne
Guillaume Le Blanc, Professeur de philosophie à l’université Paris Est Créteil
Anne-Laure Chaumette, Maître de conférences HDR en droit public, université Paris Nanterre
Christel Cournil, Maîtresse de conférences HDR en droit public, université Paris 13
Laurence Dubin, Professeure à l’Ecole de droit de la Sorbonne, université Paris 1 Panthéon Sorbonne
Marina Eudes, Maître de conférences HDR en droit public, université Paris Nanterre
François Julien-Laferrière, Professeur émérite de droit public, université de Paris Sud
Marion Tissier-Raffin, Maître de conférences en droit public, université de Bordeaux
Catherine Wihtol de Wenden, directrice de recherche émérite au CNRS

L’AAtelier // Asile :Entretien avec Serge Slama

Le droit d’asile est un droit fondamental reconnu comme tel par la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 et dans la Constitution française. Deux ans et demi après la réforme du droit d’asile, nous avons interrogé Serge Slama, expert sur les questions liées au droit d’asile, au droit des étrangers et aux politiques migratoires, afin de faire le bilan de cette réforme et un état des lieux de l’asile en France, à l’aune du projet de loi « immigration maîtrisée et droit d’asile effectif », dit projet de loi « Collomb », en cours d’élaboration.

1. Bilan de la réforme de 2015

Serge Slama rappelle qu’un des objectifs de cette réforme était de se conformer aux obligations de la France dans le cadre de l’application de directives européennes de 2013. La réforme était donc nécessaire car l’échéance de transposition arrivait à son terme et la législation française avait été mise en cause par des jurisprudences de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et de la Cour européenne des droits de l’Homme (Cour EDH). Par exemple, le droit français n’était pas conforme aux exigences européennes, car il ne prévoyait pas pour les demandeurs d’asile en procédure prioritaire, c’est-à-dire en procédure accélérée moins avantageuse pour eux, de recours suspensif devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). Concrètement, avant la réforme de 2015, si l’asile était refusé par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) à un demandeur d’asile en procédure prioritaire, il pouvait être renvoyé dans son pays d’origine avant que la CNDA n’ait statué sur son cas. La réforme de 2015 a rendu suspensif ce recours devant la CNDA pour les personnes placées en procédure accélérée. Les demandeurs d’asile ne peuvent donc plus être renvoyés dans leur pays d’origine avant le traitement définitif de leur demande d’asile.
Mais il est question dans ce projet de loi de revenir sur cet acquis en supprimant pour certaines catégories de demandeurs d’asile le recours suspensif devant la CNDA. En contrepartie, le projet de loi prévoit uniquement la possibilité, en cas de placement en rétention ou d’assignation à résidence du demandeur d’asile, de demander au tribunal administratif la suspension du possible renvoi de la personne, le temps pour la CNDA de se prononcer sur la demande d’asile. Pour Serge Slama, il s’agit de rendre plus difficile l’accès au droit d’asile pour ces catégories de demandeurs. Contrairement à son intitulé officiel le projet de loi « Collomb » ne tend donc absolument pas à rendre « plus effectif » le droit d’asile mais à le maîtriser comme on entend « maîtriser » l’immigration (intitulé d’ailleurs emprunté à une loi « Pasqua » de 1993 qui parlait à l’époque « d’immigration zéro »).
Par ailleurs, l’enjeu était également de réduire les délais d’instruction de la demande d’asile qui étaient beaucoup trop longs : parfois jusqu’à deux ans d’attente pour l’ensemble de la procédure d’asile. Sur cet aspect, force est de constater que l’OFPRA a reçu d’importants moyens et fait, grâce à son directeur Pascal Brice, des réformes structurelles. Les délais ont été ainsi fortement réduits (4 mois) alors même que la demande d’asile a fortement augmenté (le cap des 100 000 a été dépassé en 2017). Le taux de décision de protection pour les demandeurs d’asile atteint désormais les 30%. Sur ces aspects, le bilan est donc plutôt positif, mais on revient de loin. 

Un bilan seulement positif ?

Concrètement, il y a une mise en application de cette réforme qui n’est pas satisfaisante s’agissant de l’hébergement des demandeurs d’asile aussi bien en amont qu’en aval.
En amont, les associations qui assurent la gestion des plateformes d’accueil sont débordées ce qui constitue une entrave au dépôt des demandes d’asile (jusqu’à 4 mois d’attente à Paris pour avoir un simple rendez-vous, mais la plateforme d’accueil doit bientôt déménager). Or, plus le dépôt tarde, plus la précarité des demandeurs d’asile augmente. Mais surtout, tant que l’enregistrement de la demande d’asile n’a pas été formellement réalisé, le demandeur d’asile n’a pas accès à un hébergement en centre d’accueil pour demandeur d’asile (CADA) ou dans un autre dispositif dédié. Il n’a pas non plus accès à l’allocation pour demandeurs d’asile – dont le montant, inférieur au RSA, est très insuffisant (le Conseil d’État vient d’ailleurs de censurer un décret qui ne prévoyait d’attribuer que 5,60€ aux demandeurs d’asile hébergés dans le secteur privé de la location à défaut de prise en charge par l’État).
En aval, même si de nouvelles places en CADA sont en cours de création, le dispositif d’accueil reste très largement et sciemment sous-dimensionné. Ainsi, une part significative des demandeurs d’asile vit en France à la rue et dépend du 115 – qui est lui-même totalement engorgé. Les demandeurs d’asile, surtout isolés, ont peu de chances d’être hébergés. Même des femmes et des familles restent dans certaines villes à la rue malgré leur qualité de demandeur d’asile. Force est de constater qu’il y a aujourd’hui une précarisation de la vie des demandeurs d’asile allant à l’encontre de l’accueil digne que devrait leur réserver la France. Il suffit de voir les campements de fortune qui se créent dans beaucoup de métropoles et notamment en périphérie de Paris, malgré l’ouverture d’un centre pour migrants à Paris fin 2016 ou le développement des Centres d’accueil et d’orientation (CAO) depuis l’évacuation du bidonville de la Lande de Calais. La France pourrait être condamnée par la CEDH sur cette question, notamment dans l’affaire du campement de Blida à Metz.
© Studio TARTAR

2. Echéance de la réforme proposée cet été et mise en application

Le Gisti vient de rendre publique une version très avancée du projet de loi. Il doit être prochainement examiné par le Conseil d’État. Les auditions par les groupes à l’Assemblée nationale viennent de débuter. Il devrait être adopté en conseil des ministres fin février 2018 et examiné par la commission des lois de l’Assemblée nationale en mars pour un examen en séance en avril. Avec les navettes parlementaires, il faut donc s’attendre à une adoption de la loi pour la rentrée 2018 voire même pour fin 2018.
© Studio TARTAR
Le Gouvernement n’est pas particulièrement pressé car le groupe parlementaire des « Constructifs » a déposé une proposition de loi visant officiellement, à la suite de décisions de la CJUE et de la Cour de cassation, à permettre « une bonne application du régime d’asile européen ». En réalité il s’agit de durcir considérablement la condition des demandeurs d’asile relevant du règlement « Dublin 3 »1. En effet désormais les « dublinables »2 pourront dès le début de la procédure d’asile – et avant l’édiction de la mesure de réadmission vers le pays européen compétent pour traiter leur demande d’asile – être placés en rétention jusqu’à 90 jours durant l’instruction de leur demande s’il existe un « risque non négligeable de fuite ». Or le texte adopté par l’Assemblée – et durci par le Sénat – a défini très largement cette notion. On change profondément la logique de la rétention administrative. Alors que depuis sa légalisation en 1981, elle visait uniquement à permettre l’exécution d’une mesure d’éloignement3, la rétention administrative deviendrait désormais un sas d’attente le temps de réalisation de la procédure de réadmission4Et encore dans le projet de loi « Collomb », il est prévu dans certaines circonstances des possibilités de prolongation de la rétention administrative jusqu’à 135 jours !

3. Retour et analyse de deux circulaires de Gérard Collomb, actuel Ministre de l’Intérieur

Ces circulaires – ayant interpellé l’aaatelier – prévoyaient de faire le « tri » entre les migrants en règle et les « sans-papier » dans les centre d’hébergement d’urgence, tout en mettant une certaine pression aux préfets pour accélérer l’éloignement des étrangers, en mettant largement l’accent sur l’éloignement des déboutés de l’asile, c’est-à-dire, les demandeurs d’asile dont la demande a été définitivement rejetée.
Ces circulaires ont été dénoncées par l’ensemble des associations de défense des droits de l’Homme, d’aide aux migrants et des acteurs de la solidarité (avec des associations comme la Fondation Abbé Pierre, la Fédération des acteurs de la solidarité, le Samu Social, etc.). Par ailleurs, le Défenseur des droits s’est lui-même inquiété de la circulaire prévoyant de faire un recensement des migrants, selon leur statut, dans les centres d’hébergement d’urgence. Il a demandé le retrait de cette circulaire le 19 janvier 2018 et a présenté des observations au soutien de la requête administrative déposée par une vingtaine d’associations contre cette circulaire. Entendu comme expert par les avocats de ces associations, il a été convenu de focaliser le recours sur deux aspects : le fait qu’il n’existe pas de base légale à l’accès des agents de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) aux centres d’hébergement d’urgence d’une part, et, que rien ne permet aux gestionnaires de ces centres de transférer des données personnelles à des agents de l’État d’autre part.
Serge Slama rappelle que cette circulaire se heurte aux principes fondateurs de l’hébergement d’urgence dont l’essence même est la mise à l’abri de tous, sans différenciation possible selon les statuts et les situations administratives car il s’agit nécessairement d’un droit universel lié à la protection la plus élémentaire de la dignité de la personne humaine. On ne saurait donc faire de distinction entre les bénéficiaires de l’hébergement d’urgence. Et pourtant, Serge Slama rappelle que le juge des référés du Conseil d’État a cru bon de faire une interprétation contra legem5 du Code de l’action sociale et des familles. En effet, il a été admis, au mépris du principe de protection de la dignité de la personne humaine, qu’il n’y a pas d’atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales lorsque des familles de déboutés du droit d’asile, sous le coup d’une décision d’éloignement de la France, sont laissées à la rue.
Sur la deuxième circulaire, demandant aux préfets d’accélérer l’éloignement des étrangers et notamment des déboutés de l’asile, Serge Slama explique en tant que juriste qu’il est légitime pour un État de souhaiter qu’un débouté du droit d’asile, dont la demande a été définitivement rejetée, de l’éloigner. C’est une priorité gouvernementale depuis la réforme du droit d’asile de l’été 2015 avec la mise en œuvre de certains dispositifs expérimentaux en ce sens (il y a près de 70 000 déboutés du droit d’asile par an). Néanmoins, en tant que militant et être humain, il considère qu’il ne devrait pas y avoir de distinction nette entre un demandeur d’asile fuyant des persécutions et les autres migrants (économiques, environnementaux, sanitaires). Pour lui, le fait de venir en Europe pour trouver une terre sur laquelle travailler et vivre dignement n’est pas moins louable que de remplir les critères pour obtenir l’asile posés par la Convention de Genève en 1951.
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4. Réduction du délai moyen de traitement des demandes d’asile

Serge Slama considère que la réduction du délai de traitement de la demande d’asile avait un sens en 2015 car il était trop long (jusqu’à deux ans). Les demandeurs d’asile, progressivement, s’installaient et s’intégraient en France, en y travaillant, en scolarisant leurs enfants, etc. Demander leur retour dans leur pays d’origine par la suite était donc plus compliqué.
Cependant, il s’inquiète de la réduction du délai d’instruction devant l’OFPRA à deux mois qu’il trouve trop court. Il considère notamment qu’il peut être préjudiciable aux demandeurs d’asile, qui ne sont pas toujours en capacité psychologique d’exprimer rapidement leur histoire et leur parcours. En effet, arrivant en France après avoir vécu de graves persécutions et souvent après un périple dangereux et traumatisant, ces personnes peuvent avoir besoin d’un certain temps avant de formaliser leur demande d’asile et de structurer leur récit.
© Studio TARTAR
Une autre disposition pernicieuse du projet de loi « Collomb » est d’exiger des demandeurs d’asile, qui souhaiteraient faire une autre demande de titre de séjour (maladie, travail etc.) à l’issue de leur procédure d’asile, de ne pouvoir le faire qu’en début de procédure en même temps que la demande d’asile. Cette disposition est purement scandaleuse. Que fera-t-on demain si une femme victime de la traite de l’être humain n’a pas demandé dès le début de la procédure d’asile à la préfecture un titre de séjour à un autre titre ? Idem pour un étranger gravement malade dont les traitements ne seraient pas disponibles dans son pays d’origine ? Un tel dispositif est un réel piège posé par l’État aux migrants afin de restreindre l’accès effectif à leurs droits fondamentaux et à leur séjour. Décidément le projet « Collomb » est bien mal nommé…
© Migrants à la Villette, 2017, par le photographe Elliott Verdier
Serge Slama est Professeur de droit public à 
l'Université de Grenoble-Alpes, membre du Centre d'Études sur la 
Sécurité Internationale et les Coopérations Européennes. Il a enseigné à
 l’Université Paris Nanterre, à l'Université Evry-Val-d'Essonne et a été
 visiting scholar (chercheur invité) au Boston college law schoo
Dans le passé, Serge Slama a animé le blog « Combats pour les droits de l’Homme
 » qui visait à donner un point de vue et un décodage de juristes 
spécialisés sur les droits humains. Il fait actuellement partie du 
comité éditorial de la Revue des droits de l’Homme. Il est aussi expert 
auprès de la commission « liberté » du Conseil national des Barreaux. 

Enfin, Serge Slama est également connu pour son militantisme en faveur 
des droits humains, notamment des droits des étrangers comme l’atteste 
son opposition récente à l’état d’urgence au sein de l’Observatoire de 
l’état d’urgence. Il est aujourd’hui très souvent sollicité en tant 
qu’expert sur ces questions par les associations de défense des droits 
des migrants ou des avocats dans des procédures devant les juridictions 
suprêmes. 

Il participe également à la Clinique des droits de l’Homme de la faculté
 de droit de Grenoble notamment sur un projet de Clinique juridique 
mobile pour favoriser l’accès au droit au logement.

 

Le monde // A la Cour Nationale du Droit d’Asile, une grève contre la future loi immigration

future loi immigration

Les personnels de la CNDA, chargés d’examiner en appel les demandes d’asile, réclament l’amélioration de leurs conditions de travail et s’opposent à la loi asile-immigration qui sera présentée en conseil des ministres le 21 février.

LE MONDE |   Par Maryline Baumard

Dans la salle 1, un Soudanais regarde la pointe de ses baskets en écoutant son avocat résumer son emprisonnement par l’armée. Face à lui, trois juges, un rapporteur et un secrétaire le scrutent. Le jeune homme est inquiet. Il joue là son statut, mais semble intimidé, empêtré dans son histoire. Pourtant, le moment est pour lui d’une extrême importance : reconnu réfugié, il aura un titre de séjour en France valable dix ans. Si les juges lui proposent la protection subsidiaire, il aura un titre d’un an. Sinon, c’est la clandestinité…

Mardi 13 février, c’était la seule audience à la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), à Montreuil (Seine-Saint-Denis), où sont examinés les appels des demandeurs d’asile, après un rejet par l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra). A côté, les autres salles sont vides. Certaines sont même fermées à clé. Seule la pièce 6 est occupée. Au fond, dans un coin, un assesseur travaille ses dossiers en silence. Pas prévenu du mouvement de grève, il est venu ce matin. Comme Taris, un Bangladais qui traîne dans les couloirs, en quête de l’audience d’un autre Bangladais. « Je voudrais voir à quoi ça ressemble. On m’a dit qu’il fallait se préparer », explique-t-il.

Travailler les dossiers en amont est une préoccupation partagée par les demandeurs d’asile et par ceux qui instruisent leur dossier : les rapporteurs. Ces derniers craignent que la pression du chiffre ne les contraigne à lire un peu trop vite les récits des demandeurs d’asile. C’est là un des motifs centraux de la grève, reconductible, à laquelle ont appelé l’ensemble des syndicats de la cour (SIPCE, FO et CGT), à compter de mardi à la CNDA.

Les rapporteurs estiment en effet que si le projet de loi asile-immigration, qui sera présenté mercredi 21 février en conseil des ministres, est adopté tel qu’il est rédigé aujourd’hui, ils n’auront plus le temps de faire correctement leur travail en amont des audiences.

Lire aussi :   Que contient le projet de loi asile-immigration ?

« On a déjà 325 dossiers à traiter chaque année. Comme le projet de loi veut raccourcir la durée de la procédure de la demande d’asile, il va falloir qu’on en traite plus alors qu’on est déjà à plus d’un dossier par jour ouvrable », observe Nadia, 29 ans, rapporteuse depuis deux ans à la CNDA.

Elle connaît son travail et l’aime : « J’ai un master de droit public. Je pourrais sans doute gagner ailleurs plus que les 1 790 euros que je touche ici, mais je trouve que ma mission a un sens très fort et je veux continuer à pouvoir l’assurer correctement. » Déjà, elle dit « passer un temps fou » sur certains dossiers compliqués, car « des vies sont en jeu et la CNDA est la dernière chance du demandeur d’asile avant un potentiel renvoi ».

47 814 décisions rendues en 2017

A une semaine de la présentation du texte, la tension monte au siège de la CNDA. Une bonne partie des 434 agents s’oppose à la « logique comptable de l’asile qui fait primer le raccourcissement des délais de jugement sur la qualité de l’instruction des demandes et des décisions rendues », comme le résument les trois syndicats.

Eux comme les avocats qui travaillent sur cette juridiction disent non à la « réduction des délais de procédures à tous niveaux, l’élargissement du recours à la vidéo-audience sans le consentement des demandeurs, la levée du caractère suspensif de certains recours devant la cour qui va conduire à renvoyer des demandeurs d’asile avant que leur dossier soit jugé ici », insiste Virginie Dusen, une avocate du barreau de Paris qui défend depuis dix ans des exilés en quête d’un statut de réfugié. Les avocats de cette juridiction se sont eux aussi mis en grève, à l’unisson des rapporteurs et d’une partie du personnel de la Cour.

Avec 47 814 décisions rendues en 2017 dans un délai moyen de cinq mois et six jours, la CNDA a déjà considérablement réduit ses délais ces dernières années, mais reste en deçà des objectifs fixés par le gouvernement dans la loi à venir. Le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, souhaite que la procédure d’asile tienne intégralement dans un délai de six mois en partant de son enregistrement à l’Ofpra et jusqu’au rendu de la décision de la CNDA. Son but étant autant de pouvoir renvoyer les déboutés avant qu’ils ne fassent leur vie en France, et de mieux intégrer ceux qui obtiendront le statut.

Gagner quelques jours de procédure

En mettant la pression sur l’Ofpra et la CNDA, le ministre de l’intérieur oublie que ce n’est pas là que se trouve le vrai temps mort. Qu’il soit à Paris, Lyon, Toulouse ou ailleurs, un migrant passe quelques mois dans la rue à attendre de pouvoir entrer dans une plate-forme d’accueil des demandeurs d’asile, qui lui permettra d’avoir ensuite un rendez-vous devant un guichet unique où sa demande sera enregistrée… Ce délai pourrait être résorbée par le ministère de l’intérieur qui n’y parviendra pourtant pas avec les 150 postes affectés par le budget 2018 dans les préfectures.

Pour de nombreux interlocuteurs, la pression sur l’Ofpra et la CNDA a donc un autre but que de gagner quelques jours de procédure. Il s’agit surtout de faire fondre le nombre de demandeurs en limitant les temps de recours, certes, mais aussi en changeant le mode de traitement des dossiers. En clair, l’idée de ce projet de loi serait de dissuader de venir en France…

Les grévistes de la CNDA partagent cette analyse et regrettent déjà les évolutions récentes de leur travail.

« La proportion de dossiers traités par ordonnances, c’est-à-dire rejetés sans audience, a quasiment doublé en trois ans, passant de 17 % en 2014 à près de 30 % en 2017. Parmi ces dossiers, une proportion importante aurait nécessité d’être appelée en audience. Mais nombre de demandes d’asile jouent dès lors le rôle de variable d’ajustement, permettant d’atteindre les objectifs chiffrés de la cour », déplore l’intersyndicale dans un communiqué.

Ce mouvement n’est pas une première et les conditions de travail des agents de la CNDA sont dénoncées depuis plusieurs années. Entre 2010 et 2015, quatre mouvements sociaux autour de la charge de travail et de la rémunération des agents ont déjà secoué la juridiction qui n’a pas connu la même mue que l’Ofpra. Pas de commentaire du côté de la direction, qui n’a pas donné suite à nos appels et demandes écrites.

Infomigrants // Grève à l’OFPRA: « On porte atteinte au droit d’asile en faisant passer les demandeurs pour des potentiels fraudeurs »

http://www.infomigrants.net/fr/post/7585/greve-a-l-ofpra-on-porte-atteinte-au-droit-d-asile-en-faisant-passer-les-demandeurs-pour-de-potentiels-fraudeurs

Deux syndicats de l’Ofpra, l’institution chargée d’examiner toutes les demandes d’asile en France, ont appelé à la grève, mercredi 21 février. Ses agents s’insurgent contre le projet de loi sur l’asile et l’immigration qu’ils jugent « dangereux ».

Selon le préavis de grève envoyé à leur président, Pascal Brice, les agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) redoutent que le projet de loi asile et immigration, présenté en conseil des ministres mercredi 21 février, vienne « marquer une rupture sans équivoque avec la tradition d’asile » en France.

Pour les grévistes de la seule administration française habilitée à statuer sur les demandes d’asile, le gouvernement d’Emmanuel Macron fait tout pour « nuire à l’instruction » des dossiers. Le projet de loi sur l’asile et l’immigration prévoit en effet de réduire les délais d’examen de 90 jours à 60 jours.

>> À relire sur InfoMigrants : « Demande d’asile : comment se déroule un entretien à l’Ofpra ? »

« L’idée de ce projet de loi, c’est de poursuivre un double objectif : rationaliser les dépenses publiques tout en gérant mieux les flux migratoires. Cette politique dangereuse prend le pas sur la tradition française de l’asile », s’indigne Johan Ankri, co-secrétaire général du syndicat ASYL de l’Ofpra, joint par InfoMigrants.

« On craint de plus en plus de procédures accélérées »

Les agents redoutent que le projet de loi n’entache la qualité d’instruction des dossiers de demandes d’asile. « Nous avons peur qu’il y ait de plus en plus de ‘procédure accélérées’ », continue Johan Ankri, co-secrétaire général du syndicat ASYL de l’Ofpra.

Les procédures dites « accélérées » exigent actuellement, sur le papier, que les dossiers d’asile concernés soient instruits en 15 jours… Elles concernent généralement des demandeurs d’asile suspectés d’avoir fourni de faux témoignage, de faux documents lors de leur passage au guichet unique. Elles peuvent viser aussi des demandeurs d’asile venant de pays jugés « sûrs » par l’Ofpra.

« Quinze jours, c’est déjà un délai impossible à tenir », continue Johan Ankri. « Comment voulez-vous en 15 jours convoquer un demandeur d’asile, lui faire passer un entretien, faire des recherches complémentaires sur son dossier, vérifier ses dires, prendre une décision et notifier sa décision ! C’est aberrant ! »

« Un demandeur d’asile a besoin de temps ! »

La crainte des réductions de délai d’instruction des dossiers à 60 jours pour les procédures classiques, et la crainte de l’augmentation de procédures accélérées poussent les agents de l’Ofpra à sortir du silence pour dénoncer une atteinte « inacceptable » à la tradition du droit d’asile en France. « L’étranger est supposé être un fraudeur. On réduit ses droits, on réduit les délais, parce qu’il est potentiellement fraudeur ! Ce n’est pas acceptable ».

>> À lire sur InfoMigrants : « Reportage : des survivants de l’enfer libyen demandent l’asile en France… depuis le Niger »

Pour les agents grévistes de l’Ofpra, le temps est pourtant un atout nécessaire pour le demandeur d’asile. « Une personne qui demande à devenir réfugié a besoin de temps pour verbaliser les souffrances [qu’il a subies sur la route de l’exil], a besoin de temps pour parler devant l’Ofpra. On ne peut pas lui demander de préparer son entretien en quelques jours », poursuit Johan Ankri. Les agents de l’Ofpra craignent également de pâtir d’une surcharge de travail. « Cette loi va augmenter les dossiers à traiter. Nous craignons des conséquences sur nos conditions de travail ».

Pour toutes ces raisons, les agents de l’Ofpra entendent ainsi rejoindre dans leur protestation les employés de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) – qui tranchent sur les recours des déboutés – en grève depuis mardi.

Pour tous les demandeurs d’asile ayant un rendez-vous à l’Ofpra le mercredi 21 février, pas d’inquiétude : si votre rendez-vous n’est pas maintenu en raison de la grève, une nouvelle convocation vous sera adressée.

 

Communiqués sur la réforme de l’asile

D’une réforme à l’autre, l’asile en danger

http://www.primolevi.org/actualites/dune-reforme-a-lautre-lasile-en-danger.html

Communiqué collectif – 13 février 2018

Alors qu’une nouvelle réforme de l’asile et de l’immigration se prépare, sans qu’aucune évaluation de la précédente réforme n’ait été faite par les pouvoirs publics, les associations de la Coordination Française du droit d’asile (CFDA) dont le Centre Primo Levi publient aujourd’hui le rapport « D’une réforme à l’autre, l’asile en danger ».

Moins de deux ans et demi après l’entrée en vigueur de la loi relative à la réforme de l’asile de 2015 et alors qu’aucune évaluation n’a été menée par les pouvoirs publics, la CFDA confronte les principales mesures qu’elle contient avec la situation concrète des personnes qui demandent l’asile en France.

Sur la base de leurs actions quotidiennes aux côtés de ces personnes, les associations membres de la CFDA mettent en évidence, dans ce rapport, une nette dégradation de leur situation à toutes les étapes de leur parcours.

Alors que le nombre de demandes d’asile n’a jamais été aussi important en France, le rapport de la CFDA va à l’encontre de l’analyse du gouvernement : la dite « crise migratoire » n’est pas la cause des multiples dysfonctionnements qui caractérisent la procédure d’asile. Ces dysfonctionnements sont dus à l’inadaptation des pratiques administratives ainsi qu’à une gestion de l’urgence qui a contribué à rendre opaque et incompréhensible le dispositif procédural et d’accueil des personnes.

Le 21 février prochain, le gouvernement présente en conseil des ministres un « projet de loi pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile effectif ». Cette nouvelle réforme de la loi sur l’asile ne comporte aucun élément relatif à l’amélioration des délais d’enregistrement et de l’accès aux droits. Elle multiplie les chausse-trappes pour dissuader les demandes et recourir à des procédures expéditives, et se concentre principalement sur l’accélération des délais de traitement des demandes d’asile à l’OFPRA et à la CNDA, déjà fortement réduits depuis la réforme de 2015 (en moyenne 4 mois à l’OFPRA et 5 mois et demi à la CNDA). Pourtant, la réduction des délais est préjudiciable aux demandeurs du fait du peu de temps que les agents de l’Office consacrent à chaque dossier.

Dans son rapport, la CFDA attire l’attention sur la situation des personnes placées en procédure « Dublin ». Il est temps de prendre la mesure des dommages qu’entraîne cette procédure inéquitable (entre les Etats membres de l’UE) pour les candidats à l’asile. Elle invite à une analyse des cas des personnes en procédure accélérée, des personnes protégées et déboutées, en préalable à l’adoption de toute nouvelle loi.

A contre-courant d’une réforme élaborée au pas de charge, la CFDA demande à ce qu’une réflexion en profondeur soit menée pour améliorer durablement les conditions d’accueil et d’examen des demandes d’asile en France.

 

Communiqué du Syndicat des Avocat.e.s de France

Le 12 février  2018

 
ASILE : EN ARRIERE, TOUTE

Le 21 février prochain le gouvernement doit présenter en Conseil des ministres son projet de loi bien mal nommé « pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile »

En effet, au-delà de l’équilibre vanté par le ministre de l’Intérieur, force est de constater que les propositions avancées, qui n’avaient jamais été même espérées par tous les gouvernements précédents vont mettre fin au droit d’asile faisant de l’éloignement la seule vraie mesure effective.

L’objectif affiché est de réduire les délais d’examen de la demande d’asile à 6 mois.

Pour l’atteindre le plus facile est de rendre l’asile impossible :

-Ainsi il est prévu de réduire le délai de recours contre les décisions de rejet des demandes d’asile à 15 jours. Faut-il rappeler que le demandeur d’asile, étranger non francophone le plus souvent, doit déjà rédiger en français et par écrit un recours motivé contre une décision qu’il ne peut comprendre sans traduction ; alors que le délai de recours contentieux en droit administratif est en principe de 2 mois en matière administrative, celui qui réclame l’asile n’a droit qu’à la moitié, le gouvernement veut encore le diviser par deux.

Nul n’ignore qu’en 15 jours (week-end compris) cette mission est impossible et permettra ainsi de tarir à la source le contentieux, avec des conséquences désastreuses, puisque des demandeurs d’asile se verront écartés de la protection à laquelle ils auraient pu prétendre.

-De même le recours traditionnellement suspensif ne le sera plus dans certains cas, permettant ainsi aux demandeurs d’asile d’être enfermés en rétention et éloignés avant même que leur demande ne soit examinée en appel dans le cadre d’une audience devant la Cour nationale du droit d’asile, qui n’est même pas obligatoire. Nous ne pouvons l’accepter.

-Afin de réduire les coûts, les convocations à l’OFPRA et les décisions de l’office pourront désormais se faire par tous moyens y compris électronique, inévitablement au détriment des demandeurs d’asile lesquels sont particulièrement vulnérables et ne disposent ni des compétences ni des outils numériques (téléphone, ordinateurs accès internet) pour prendre connaissance de décisions aussi cruciales.

-En outre, le recours à la visio-audience, présentée comme un outil moderne, sera généralisé et le consentement du demandeur d’asile présumé. Ainsi, le demandeur d’asile ne rencontrera plus son juge, et son avocat sera contraint de choisir d’être à ses côtés ou auprès du juge. Nous refusons de participer à cette « modernité » !

Les avocats qui interviennent en droit d’asile ont décidé de protester en se mettant en grève des audiences à la CNDA le 13 février prochain, grève reconductible.

Le SAF , qui a eu l’occasion de critiquer ce projet de loi lors de son audition au ministère de l’Intérieur, se joint au mouvement en appelant à la grève pour convaincre de la nécessité de renoncer à ce funeste projet.

 

Syndicat des avocats de France
34 rue Saint-Lazare
75009 Paris
Tél. 01 42 82 01 26