Article // Un jeune exilé raconte son périple à des lycéen.ne.s

Article tiré de Basta !, site d’information indépendant sur l’actualité sociale et environnementale

Menacé en Guinée, emprisonné en Libye, gardé à vue en France : un jeune migrant raconte son périple à des lycéens

par Olivier Favier

Réduire la distance, échanger par écrit, se rencontrer, peut-il permettre une meilleure compréhension et éviter l’exclusion et la mise au ban des plus démunis ? Olivier Favier, contributeur pour Basta ! et intervenant en milieu scolaire, livre son récit d’une expérience à travers laquelle des lycéens du Pas-de-Calais ont correspondu avec un jeune migrant, arrivé seul en France au péril de sa vie, avant de le rencontrer autour d’un atelier de théâtre. Un témoignage sensible, qui démontre l’utilité d’une telle démarche éducative et artistique pour rapprocher des univers – en apparence – très éloignés.

« Le fait que tu aies le même âge que nous, nous a permis de nous identifier plus facilement, de nous mettre à ta place, de visualiser la situation, de prendre conscience de notre confort. Avant la lecture de ton histoire, nous avions une vague idée de la difficulté de l’aventure pour arriver en France. Ainsi, nous admirons ton courage et ta force de caractère. Il serait difficile pour nous d’affronter les obstacles que tu as rencontrés. Nous sommes choqués de la violence dont tu as été témoin, et parfois même victime. (…) En tant que jeunes Français, nous sommes déçus par l’accueil qui vous est destiné, sans connaître votre histoire. Le fait d’avoir été menotté et placé en garde à vue dans un commissariat sans motif valable, ne respecte ni la devise française : Liberté, égalité, fraternité, ni les Droits de l’homme. »

Les auteurs de cette lettre sont des jeunes de seconde et première d’une classe option théâtre du lycée Ribot, à Saint-Omer dans le Pas-de-Calais. Ils répondent à une première missive de Louncény [1], 15 ans, entré sur le territoire français à l’été 2016. Nous sommes à 50 kilomètres de Calais mais aucun des élèves présents n’a abordé en cours la question migratoire. Ils vont découvrir la réalité des migrations en correspondant avec cinq jeunes de leur âge, récemment arrivés en France, de ceux que la nomenclature administrative actuelle qualifie de « mineurs non accompagnés », arrivés récemment en France. Parmi eux, Louncény, dont cette correspondance est le prélude à une rencontre avec les jeunes du lycée Ribot. Ce projet, organisé en marge du festival Prise directe consacré aux écritures théâtrales contemporaines, vise à susciter une correspondance entre ces adolescents [2] Dans ce cas, l’échange s’est poursuivi bien au-delà du projet initial, dépassant nos attentes.

Pour présenter l’histoire de Louncény aux lycéens de Saint-Omer, j’ai deux documents à ma disposition. J’ai transcrit son récit en accompagnement d’une série de portraits photographiques. Nous avons écrit un slam ensemble, avec l’aide d’une amie. Ce travail lui a valu de remporter un concours au collège. Dans ce dernier texte, j’ai surtout essayé de conserver quelques uns de ces joyaux poétiques dont Louncény émaille chacune de ses conversations. En témoigne ce refrain :

« Tu sais les eaux dont tu sors, tu ne ne sais pas les eaux où tu entres,
Là-bas la voix des armes me donnait mal au ventre »

Pour que ce parcours soit compris de ses contemporains français, il faut surtout le mettre en contexte, expliquer ce qu’il se passe sur la route des migrants, en particulier en Libye et durant la traversée. Il faut donner quelques éléments sur la situation des 10 000 mineurs non accompagnés reconnus comme tels en France. Il faut aussi évoquer tous les autres, bien plus nombreux sans doute, dont la minorité est niée ou non démontrée, avec pour corollaire immédiat une remise à la rue. Certains de ces adolescents ont quatorze ou quinze ans à peine.

En danger en Guinée, emprisonné en Libye

Je rencontre Louncény en octobre 2016. Il a quitté la Guinée quelques mois plus tôt parce que son père, rendu aveugle par les cataractes, ne parvenait plus à maîtriser les dissensions familiales. Enfant d’un second mariage, Louncény se retrouve en proie aux malversations de sa belle-mère, qui l’accuse de sorcellerie. Parti sans un sou, Louncény travaille sur des chantiers en Algérie pendant de longues semaines avant d’espérer rejoindre la Libye et payer sa traversée. Sa première tentative se solde par un échec, le bateau ayant été arraisonné en pleine mer par l’une des marines libyennes. Jeté en prison avec ses compagnons d’infortune, Louncény prend part à une tentative d’évasion collective qui déclenche une véritable chasse à l’homme.

Après quelques heures, le bilan s’élève à plusieurs dizaines de morts. Louncény voit deux jeunes de son âge s’effondrer près de lui. Ce n’est qu’à la nuit tombée qu’il parvient à trouver refuge chez un habitant. Le surlendemain pourtant, il découvre celui-ci en grande conversation avec le maton qui a tiré sur ses camarades. Louncény s’enfuit alors vers la plage. Là, il partage sa maigre pitance avec d’autres jeunes qui attendent un nouvel embarquement. Un migrant camerounais, ému par la générosité de cet adolescent, lui offre les cent euros nécessaires à sa traversée, la moitié de sa fortune. Une fois payée la traversée, ils prendront la mer l’un et l’autre, les poches vides.

Gardé à vue en France

Arrivé en Sicile, Louncény décide de rejoindre la France. Dans la ville où il sera finalement pris en charge, l’évaluation de sa minorité est faite au commissariat. Menotté et placé en garde à vue, il ressort de l’hôtel de police avec une OQTF : obligation de quitter le territoire français. Comme il pleure, un agent s’approche de lui : « Ce n’est pas comme dans ton pays ici, hein, tu peux faire du boucan. Ici il y a les droits de l’homme, pas la chicotte [un fouet à lanières nouées, lié à l’histoire de l’esclavage et de la colonisation, ndlr]. »

Jeté à la rue, il doit patienter plusieurs semaines avant que la juge pour enfants ne reconnaisse sa minorité et n’invalide de fait la procédure d’expulsion. Plusieurs mois s’écoulent encore avant que Louncény ne soit scolarisé. Malgré sa prise en charge, les soins dont il bénéficie laissent à désirer. Le dentiste qui le traite lui arrache plusieurs dents avant de l’affubler d’une prothèse dentaire inutilisable. À ce jour, il bénéficie cependant de consultations chez un psychologue.

« J’ai vu l’enfer. Je ne suis pas mort »

Comme d’autres enfants ayant triomphé de situations semblables, Louncény me frappe par sa sagesse, son rire communicatif et son indéfectible confiance en la bonté des êtres humains. Il est vrai qu’on ne peut guère douter de son courage et de son ouverture aux autres. Quand il m’a raconté son histoire, il a conclu par ces mots : « J’ai fait beaucoup de souffrance dans mon âge. J’ai vu l’enfer. Je ne suis pas mort. »

Aux jeunes qui viennent de lire son histoire, je raconte quelques unes des découvertes récentes de cet adolescent plein de vie : « L’autre jour, près de la cathédrale, il y avait des scientifiques tout nus. » Je réfléchis quelques secondes et comprends que Louncény m’évoque le bizutage d’une école d’ingénieurs. Pendant plusieurs semaines, il craint de se rendre seul dans les boutiques où le vendeur demande invariablement : « C’est tout ce qu’il vous fallait ? ». « Moi, j’ai dit je ne voulais pas acheter tout le magasin ! » Chacune de ses histoires s’achève sur un rire communicatif, empreint de douceur et d’autodérision.

Finalement, la rencontre

Les élèves de Saint-Omer me regardent éberlués. Deux heures ont passé ; il est temps de les laisser écrire. Leur lettre se fabrique sous mes yeux sur un écran mural raccordé à un ordinateur. Je n’interviens que pour corriger quelques fautes d’orthographe, éventuellement pour revenir sur quelques formulations. Dans leurs échanges, les élèves parlent de courage et d’héroïsme. Ils se montrent plus pudiques à l’écrit.

La réponse de Louncény ne se fait pas attendre : « Je suis sincèrement heureux d’avoir partagé les épreuves que j’ai traversées avant mon arrivée en France. Je suis vraiment content de m’avoir donné ma chance de partager ces obstacles insupportables que je n’arrive pas à supporter tout seul. »

« J’ai reçu cinq lettres ! »

S’ensuivent quelques éclaircissements suite aux demandes des élèves. La correspondance se poursuit sur deux nouvelles lettres, avant que le lycée ne décide d’inviter Louncény pour prolonger l’échange, de vive voix cette fois. À notre arrivée, deux élèves attendent à l’entrée principale, visiblement très impatientes. Dans la salle où ont lieu les cours de théâtre, nous formons un grand cercle pour commencer la discussion. Laetitia Ajanohun, auteure qui a participé au projet et nous accompagne pour cette rencontre, ponctue les discussions de quelques exercices pratiques dans la formation du comédien. La distance entre les corps se brisent. Les émotions s’expriment, autrement. Puis Louncény récite son slam.

Une semaine plus tard, je lui parle au téléphone : « J’ai reçu cinq lettres ! Je vais répondre à tout le monde mais il va falloir me relire. Je ne peux pas envoyer des courriers avec des fautes d’orthographe ! » Le jour même – nous n’habitons pas la même ville – il trouve une étudiante à la bibliothèque qui accepte de l’aider à rédiger. Aujourd’hui, deux mois plus tard, l’échange se poursuit avec l’une de ses correspondantes. Le reste leur appartient.

Olivier Favier


Note : En octobre prochain, Laetitia Ajanohun et moi-même ferons une première résidence avec Louncény et deux autres jeunes afin de commencer l’écriture d’un texte collectif. La version définitive sera présentée à Marseille en juin 2018. Les adolescents en seront les interprètes. Ensemble, avec deux autres comédiennes, un chorégraphe et quelques bénévoles, nous avons déjà monté en juillet dans l’Aisne un atelier-théâtre pour une quinzaine de mineurs non accompagnés et de jeunes majeurs. Louncény et deux de ses camarades ont pris part à cette aventure. Ils sont allés à la rencontre des familles de la petite commune de Merlieux, ont évoqué les souvenirs des villages de leur enfance – certains n’y avaient passé que quelques semaines chez leurs grands-parents. À la fin du séjour, le spectacle a permis de créer un bel échange avec les habitants.

Légende photo : Le groupe d’option théâtre du lycée de Saint-Omer, leur professeure, Pauline Foulon, l’auteure Laetitia Ajanohun (à gauche, premier et deuxième rang) et Capucine Lange, coordinatrice du Festival Prise directe (à droite), juin 2017. Photo : Olivier Favier.

Notes

[1Le prénom a été modifié.

[2Un auteur présent lors du festival livrera à un groupe d’élèves le récit d’un adolescent récemment arrivé sur le territoire français. À l’issue d’un atelier, la classe écrira une lettre au jeune, dans l’attente d’une réponse, évidemment. Ce qui suit fait état de l’une de ces correspondances, entre Louncény, et une classe du lycée Ribot, à Saint-Omer dans le Pas-de-Calais.

Article // Des membres d’Emmaüs traversent le détroit de Gibraltar – 08.09.2017

Des membres d’Emmaüs traversent le détroit de Gibraltar en kayak et à la nage pour les migrants

Des dizaines de compagnons de l’association Emmaüs ont prévu samedi de rallier le Maroc depuis l’Espagne. Par ce voyage symbolique, ils entendent rappeler que la libre-circulation figure dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Plusieurs d’entre eux ont déjà vécu cette traversée en tant que migrants.

Ce sont 15 kilomètres très symboliques. Samedi matin, un groupe de 43 compagnons d’Emmaüs devait entamer une traversée à la nage ou en kayak du détroit de Gibraltar depuis le sud de l’Espagne. Objectif: le Maroc, pour interpeller l’opinion publique sur les morts de migrants en Méditerranée et défendre le principe de libre-circulation.

L’opération mobilise 35 kayakistes et 8 nageurs, dont le maire de Grande-Synthe, Damien Carême. Elle est baptisée «Article 13», en référence à l’article de la Déclaration universelle des droits de l’Homme selon lequel «toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays». Une préoccupation historique pour Emmaüs et son fondateur, l’abbé Pierre.

» Dix ans après la mort de l’abbé Pierre: Emmaüs continue son combat

L’initiative émane de deux compagnons d’Emmaüs travaillant sur le terrain, au contact de réfugiés. En 2015, tous deux basés à Saint-Étienne, ils décident de réaliser une action concrète. «On accueillait des gens en très grande difficulté, avec des enfants», se souvient Maria Guerra. À ces situations quotidiennes s’ajoute le naufrage en Méditerranée d’un bateau transportant 700 personnes, et un sentiment d’impuissance.

Les deux compagnons décident de mener une action marquante et symbolique en traversant le détroit de Gibraltar, elle en kayak, lui à la nage. «C’est un lieu emblématique, qui relie deux continents. Beaucoup de personnes le traversent, y ont perdu la vie.» Surtout, emprunter cette voie de 15 kilomètres (voir la carte ci-dessous) permet de souligner l’inégalité du droit à franchir une frontière, un sujet qui les tient à cœur. Maria est espagnole, arrivée en France avec ses parents qui fuyaient le régime franquiste. Son collègue, Alain Gomez, est marocain. «On connaît l’exil. On sait ce que c’est que d’être déracinés. En arrivant en France, j’ai vécu dans un bidonville», raconte-t-elle.

Malgré les conditions difficiles et le terrible mal de mer pour la kayakiste, l’opération est un succès. Les deux volontaires ont approché la réalité des traversées clandestines. Le rapport avec les réfugiés en est changé. «Ça a été extraordinaire. Le fait qu’on ait fait ça pour eux, ça a libéré leur parole. Cette expérience nous a rapprochés», se souvient-elle. L’impact de l’initiative dépasse la communauté de Saint-Étienne. «Qu’on s’implique physiquement, ça a interpellé et ça a attisé la curiosité. Tout d’un coup, on traduisait une réalité», raconte Maria Guerra, devenue depuis directrice générale adjointe d’Emmaüs. À tel point que l’année suivante, lors du sommet mondial d’Emmaüs, l’organisation décide de répéter l’initiative en l’élargissant.

Plusieurs réfugiés participent à l’initiative

Un appel à volontaires est lancé. Le succès est au rendez-vous. «On aurait pu partir à 300 ou 400!», assure Maria Guerra, qui coordonne cette nouvelle traversée. Ils ne seront finalement «que» 43, conditions de sécurité oblige. Issus de différentes régions, tous se sont entraînés pendant un an.

Les participants se sont tous retrouvés dans la ville espagnole de Tarifa en début de semaine, et s’entraînent depuis, en attendant une météo favorable. Malgré les conditions dificiles, le départ avait été fixé à 8 heures, samedi, pour une arrivée sur les côtes marocaines prévue six heures plus tard.

Plusieurs autres actions symboliques ont eu lieu. Une porte a notamment été installée sur la plage espagnole. Ouverte, elle symbolise l’accueil des migrants pour lequel les volontaires se mobilisent. Tous les volontaires se sont également rendus au cimetière de Tarifa, où de nombreux migrants anonymes sont enterrés. «C’était important de leur rendre hommage, ainsi que pour les compagnons qui ont vécu cette traversée», relève Thierry, l’un des participants. Parmi les participants figurent en effet plusieurs réfugiés qui ont gagné l’Europe en traversant la Méditerranée, régularisés depuis. L’un d’eux a effectué la traversée trois fois avant d’obtenir un droit de séjour.

Une porte ouverte a été installée sur la plage de Tarifa pour symboliser l'accueil des migrants, dont un grand nombre n'atteint pas la côte en vie.

«Comprendre un peu mieux ce qu’ils ont pu vivre»

«La cause m’a parue évidente, j’ai tout de suite suivi», explique Sylvie, 46 ans, qui travaille au sein de la communauté de Vannes dans le Morbihan depuis 2012. Peu sportive, elle s’est préparée à prendre la mer en kayak, samedi. «On côtoie ces gens qui viennent de pays en guerre, qui espèrent se reconstruire». Pour elle, cette traversée, «c’est essayer de comprendre un peu mieux, en toute humilité, ce qu’ils ont pu vivre» et illustrer la différence de droit à circuler. «Nous, nous avons des conditions de sécurité, un médecin. Eux fuient la violence et se trouvent face à cette mer, sans autre choix.» La volontaire y voit aussi une façon de porter une autre réalité. «Il faut réincarner ces personnes qu’on appelle “migrants”, éteindre les peurs». Elle entend «transmettre cette expérience» à son retour. «Si j’arrive à mettre le doute dans une seule tête grâce à cette expérience, ma mission sera réussie.»

Les motivations sont similaires pour Thierry, qui vient du Plessis-Trévise dans le Val-de-Marne et devait traverser le détroit à la nage. Impliqué depuis 13 ans dans cette communauté Emmaüs de région parisienne, ce quinquagénaire sportif vit au quotidien la question de l’accueil des migrants, de plus en plus prégnante au fil des ans. «Ce sont des hommes et des femmes qui ont un nom, un prénom. Les migrants ne migrent pas par plaisir», fait-il valoir, agacé de voir qu’«on n’est pas tous égaux dans la libre-circulation». Sa motivation est née de son expérience au Plessis, qui accueille «40 personnes de 14 nationalités différentes»: «Emmaüs montre que le vivre-ensemble est possible.»

Cette traversée se veut le début d’un mouvement plus large autour de l’article 13. «C’est une forme d’exploit physique, donc ça fait parler. Une action forte permet d’attirer l’attention et d’être relayés», estime Thierry. Le nageur, comme la plupart des autres participants, veut croire à un nouvel élan avec cette initiative.

La démarche est relayée par Emmaüs France, qui a diffusé au début de l’été un clip choc dans ce cadre (visible ci-dessous). Un film racontant toute l’opération sera réalisé. Le maire de Grande-Synthe, qui a rencontré son homologue de Tarifa, prépare également l’organisation d’un rassemblement de toutes les personnes concernées par l’accueil de réfugiés. «Les politiques ont les moyens d’action, mais les citoyens ont aussi un grand pouvoir. Il faut qu’il se réveille», conclut Maria Guerra.

Les membres d’Emmaüs doivent se rassembler samedi soir, après la traversée, pour préparer d’autres actions symboliques.

Appel à mobilisation // Mouvement pour la paix Calais

Samedi 23 septembre 2017

CALAIS 14h30 place d’Armes

Comme dans plusieurs villes de France, suite à l’appel national

du Mouvement de la Paix signé par plus de 115 organisations :

MOBILISONS-NOUS !

Pour réclamer un monde de solidarité, de justice, de liberté,

d’égalité, de fraternité et de paix.

Nous sommes conscient-es que la guerre est toujours un échec et qu’elle conduit au chaos, elle n’enfante que des monstruosités dont sont victimes les populations civiles jetées sur le chemin de l’exil.

 

QUELLE  PAIX  A  CALAIS ?

  • Des grilles, des murs, des barbelés défigurent notre horizon.
  • Des technologies de guerre sont utilisées contre des civils : drones et scanners au tunnel, gaz et grenades de désencerclement en ville, harcèlements psychologiques jour et nuit contre les exilé-es bloqué-es à Calais.
  • Des violences policières dénoncées par Human Right Watch et le Défenseur des Droits.
  • Des contrôles au faciès abusifs et illégaux dans les gares de Calais et de la région
  • (notamment Hazebrouck et Dunkerque, Lille),
  • 53 mort-es recensé-es depuis 2015 à la frontières franco-anglaise, la plupart écrasé-es par des camions.
  • Une maire qui refuse d’appliquer des décisions de justice prises par le tribunal administratif de Lille et le Conseil d’État sur la nécessité de donner le minimum vital aux personnes survivant dehors (nourriture, accès à l’eau, à des toilettes, à des douches),
  • Des bénévoles et militant-es criminalisé-es, harcelé-es et violenté-es (comme dans la vallée de la ROJA)

 

A QUI PROFITE LE CRIME ?

  • Pas de crise pour les fabricants de matériel et technologie sécuritaires qui profitent du juteux marché de la fermeture des frontières.
  • Les entreprises de services de sécurité se multiplient avec leurs emplois précaires.
  • Le système de demande d’asile est une machine à fabriquer des sans-papiers qui peuvent être exploité-es par des entreprises mais n’ont pas accès aux droits sociaux.
  • Les discours politiques opposant les populations entraînent une montée du racisme et du fascisme à des fins purement électoralistes.

 

QUELLES SOLUTIONS ?

  • Respect des règles internationales sur l’accueil des réfugié-es.
  • Utilisation des budgets alloués au tout sécuritaire, à la répression et à la fermeture de la frontière franco-anglaise pour une politique d’accueil digne offrant accès à un toit, à l’hygiène et la santé, à de la nourriture, à des informations sur les droits.
  • Respect de l’ARTICLE 13 de la convention des Droits de l’Homme : « Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat, toute personne  a le droit de quitter tout pays y compris le sien et de revenir dans son pays. »

 

Signataires locaux:

L’Auberge de migrants, Salam, le Réveil Voyageur, RoR Calais, la LdH, le PCF , EELV de Calais, le MRAP, l’association WISE, le groupe non violent Louis Lecoin, Emmaus de Dunkerque, Arras Solidarité Réfugiés collectif, Terre d’Errance de Norrent Fontes, Société St Vincent de Paul de Guines, FSU 59-62, Utopia 56, ATTAC Flandre, Association France Palestine Solidarité

Appel à témoignages du PEROU

APPEL A TÉMOIGNAGES

Par Sébastien Thiéry (PEROU)

Le PEROU – Pôle d’exploration des ressources urbaines – lance un appel afin que se constitue un texte sans fin, formé de la liste des actes d’hospitalité qui ont lieu aujourd’hui en France. Le processus peut fonctionner si nous recevons effectivement de très nombreux témoignages d’actes qui ont lieu aujourd’hui, qui racontent de simples faits du quotidien, qui rendent compte d’un mouvement puissant et engageant de très nombreux citoyens.
Le processus est expliqué dans un document intitulé « La France peut accueillir toute l’hospitalité du monde ».
Et que deviendront ces témoignages ?
Ils sont cruciaux pour la poursuite de l’écriture de ce texte sans fin rendant compte des actes d’hospitalité « ordinaires ». Le texte, lui, est destiné à :
  • être conservé dans une institution publique (le FRAC Centre)
  • publié sur Mediapart dans un premier temps (partenaire du projet)
  • transmis aux avocats en charge de la défense des personnes aujourd’hui inquiétées pour « délit de solidarité » (via le Syndicat de la magistrature qui soutient le projet)
  • et lu dans différents lieux publics à partir du mois d’octobre (Nuit Blanche, Centre Pompidou, sur des places publiques également).
Aujourd’hui, nous avons réuni une petite dizaine de rédacteurs (Antoine Hennion, sociologue ; Jean Torrent, traducteur ; Marielle Macé, essayiste ; Jane Sautière, romancière ; Didier Galas, metteur en scène ; Amélie Couillaud, productrice ; Christophe Hanna, écrivain ; Jean-Michel Frodon, journaliste) qui nous aident à transcrire les témoignages dans cette liste d’actes concrets, suivant le fil de la première salve publiée sur Mediapart. Ces rédacteurs vont chaque mois céder la place à un autre, afin que ce collectif en charge du texte se renouvelle constamment.
En outre, vous êtes donc une cinquantaine d’individus ou organisations à avoir aujourd’hui répondu à l’appel. Nous avons besoin de très nombreux témoignages, aussi rapidement que possible, afin que le processus s’enclenche et que la publication du texte génère son prolongement. Aussi, n’hésitez pas à nous envoyer de bonnes nouvelles du monde, à savoir le récit même bref d’actes concrets, peut-être anodins a priori, mais qui rendent compte de l’invention d’un quotidien qui, en dépit de toutes les expulsions, s’installe. Il ne s’agit que de quelques lignes au sujet d’un geste non pas extraordinaire, mais ordinaire précisément, de ces gestes qui font nos existences communes.

Campagne « La douche pour tous » : Comment participer

A vos tweets et pages Facebook !!

CAMPAGNE RÉSEAUX SOCIAUX : « LA DOUCHE POUR TOUS »

Suite à l’ordonnance du TA de Lille de fin juin dernier, confirmée par l’ordonnance du conseil d’état, les autorités s’emploient à mettre en place un dispositif le plus minimaliste possible ; totalement indigne, et refusent toujours d’installer des « douches pour tous ».

Le logiciel gouvernemental reste le même : « pas de point de fixation, toute amélioration des conditions de (sur)vie fera appel d’air » etc. etc… On ne dit plus « humanité et fermeté » mais « générosité et efficacité ». Au-delà de ce changement sémantique, que du déjà vu et des non réponses qui depuis longtemps font preuve de leur inefficacité.

L’objet de cette campagne est de tourner en dérision la théorie selon laquelle l’installation de douches à Calais fera appel d’air.

Cette campagne a démarré sur Facebook, nous voulons la lancer sur TWEETER de façon à ce que les tweets arrivent directement sur les comptes de .@gerardcollomb @NatachaBouchart @Elysée

Nous vous proposons de prendre une photo « décalée/drôle » de vous-même, seul.e ou avec des ami.e.s, sous la douche (on peut symboliser la douche avec différents objets pittoresques et se doucher dans moult lieux, soyons créatives et créatifs) avec un panneau/une pancarte sur laquelle figure la phase suivante : « je m’appelle XXXX et j’arrive prendre ma #douche à #Calais »

Puis merci de tweeter cette photo avec le TWEET suivant : (ne pas oublier de commencer le tweet par un point de façon à ce qu’il arrive directement sur compte des personnes en question)

.@gerardcollomb @Elysée @NatachaBouchart les #migrants QUITTENT leur pays, leur vie, pour une #douche à #calais VRAIMENT?@caritasfrance

On peut signer @caritasfrance ou @aubergemigrants ou @cabanejuridique ou @emmaus.france … ou autre asso qui désire s’engager ou pas de signature associative s’il s’agit d’une initiative purement individuelle.

Communiqué inter-associatif // « En finir avec la violation des droits des Jeunes Isolés Etrangers »

En finir avec la violation des droits des Jeunes Isolés Étrangers

Par – Mediapart.fr

 

Tous les jours en France, des centaines d’enfants, de jeunes étrangers sont laissés à l’abandon, exclus de la protection qui leur est due. Heureusement, bien plus souvent qu’on ne l’imagine, des mobilisations courageuses se développent, portées par les jeunes eux-mêmes et leurs soutiens. Une campagne nationale d’alerte, de mobilisation et de dénonciation sera lancée dès septembre.Tous les jours en France, des centaines d’enfants, de jeunes étrangers sont laissés à l’abandon, exclus de la protection qui leur est due, une charge qui incombe aux départements. Ceux-ci se partagent avec la police, les parquets et les tribunaux le soin de faire le « tri » entre les jeunes qui seront reconnus mineurs et les autres, déclarés majeurs après un entretien suspicieux, un document jugé douteux ou les conclusions aléatoires d’une expertise osseuse. Pour les « heureux » élus, trop souvent ne s’ensuit qu’un service minimum d’encadrement sans que les bilans obligatoires ne soient réalisés sur leur situation, leurs besoins en santé, en éducation.

Malgré l’encadrement prévu par la protection de l’enfance et ses dispositions réglementaires, les pratiques de trop de services de l’Aide sociale à l’enfance ou des associations chargées de ces jeunes conduisent à de véritables maltraitances : « parcage » des mineurs isolés dans les hôtels ou hébergements inadaptés à l’accueil d’enfants et de jeunes, non-scolarisation. Quant aux exclus de la prise en charge, ils sont condamnés à l’errance, harcelés et contraints de décamper de leurs abris de fortune lorsqu’ils ne sont pas victimes de violences policières.

Heureusement, bien plus souvent qu’on ne l’imagine, des mobilisations courageuses se développent portées par les jeunes et leurs soutiens. Elles obtiennent parfois gain de cause, sauvant, trop rarement, quelques jeunes de leur misère pour une durée incertaine.

Il y a urgence à ce que les responsables politiques ouvrent les yeux ! Assez d’hypocrisie !

Il ne suffit pas de se réclamer des conventions internationales sur les droits humains, il faut les respecter !

Nous, associations, organisations, syndicats, collectifs, engageons dès septembre dans une campagne nationale d’alerte, de mobilisation et de dénonciation :

  • en mutualisant les informations et témoignages, dans la perspective d’établir un état des lieux
  • en multipliant les initiatives locales et/ou régionales, concertées ou pas, médiatisées pour dénoncer les politiques menées
  • en débouchant sur une initiative commune, pour relayer publiquement au niveau national cette alerte, partager les expériences.

Premiers signataires :

  • FASTI (Fédération des Associations de Solidarité avec Tou-te-s les Immigré-e-s)
  • Ferc-CGT (Fédération de l’Éducation, de la Recherche et de la Culture –CGT)
  • SNUTER-FSU (Syndicat National Unitaire de la territoriale–Fédération Syndicale Unitaire)
  • RESF (Réseau d’Education Sans Frontières)
  • ​MRAP (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples)
  • ​FSU Nationale (Fédération Syndicale Unitaire Nationale)
  • ​FCPE (Fédération des Conseils de Parents d’Elèves)
  • EPP (Enseignants Pour la Paix​)
  • ​GISTI​ (Groupement d’Information et de Soutien des Immigrés)
  • DEI -FRANCE (Défense des Enfants International –France)
  • SNPES-PJJ/FSU (Syndicat National des Personnels de l’Education et du Social-PJJ/Fédération Syndicale Unitaire)
  • CPMJIE (Collectif Parisien pour les Mineurs et Jeunes Isolés Etrangers)
  • LDH (Ligue des Droits de l’Homme)
  • La CIMADE
  • Fédération Nationale Sud Santé Sociaux
  • Sud Éducation Guyane

Témoignage // Quelle mise à l’abri des mineur.e.s isolé.e.s à Dieppe

Ci-dessous, le témoignage de Edwige, membre de l’association Itinérance Dieppe, sur les conditions de mise à l’abri d’un mineur non-accompagné à Dieppe :

COLÈRE ET INTERROGATIONS…

Il est tard, coup de fil… De jeunes mineurs isolés, hébergés en hôtels à Dieppe, ont rencontré un jeune sur un banc en ville.
Ils ont décidé de remonter lui chercher quelque chose à manger, et redescendent avec ce qu’ils ont pu lui trouver car il est affamé.

Compte-tenu de l’heure tardive (et, au passage, admiratifs de leur esprit de solidarité), nous accompagnons le jeune au commissariat.
Il a 16 ans 1/2, vient de Côte d’Ivoire.

Après un temps d’attente, exténué, il doit répondre à de nombreuses questions, fait état de sa douloureuse histoire.

On nous dit qu’on ne peut pas faire grand-chose car il n’a aucun papier.
Nous demandons que la procédure soit appliquée, à savoir : appel au procureur pour signalement de mineur en danger et mise à l’abri.
Ce qui est fait.
Celui-ci ordonne sa mise à l’abri mais…
pas de place ni en foyer, ni en hôtel.
Le jeune passera la nuit au commissariat sur un petit matelas à même le sol et une couverture. Pas possible pour nous de l’emmener car nous n’obtenons pas l’autorisation de la police.
Au moins, il est à l’abri.
Nous ressortons du commissariat à minuit 45.

A 7h, le lendemain matin, la police demande au jeune de partir et le voilà de nouveau à la rue.

Nous appelons le secrétariat du procureur qui est en vacances mais, après discussion, une magistrate demande que le jeune retourne au commissariat en précisant que c’est sur instructions du parquet.
Il se fait éconduire et on l’envoie à l’Aide sociale à l’enfance (ASE). On lui dit alors qu’il n’y a pas de place et qu’il faut qu’il revienne au rendez-vous qu’on lui a donné pour le lendemain matin.
Le jeune, complètement perdu, doit être accompagné pour retourner au commissariat.
Entre temps, la magistrate a donné l’ordre à la police de prendre le jeune en charge et nous sommes, cette fois, très bien reçus.
Audition, ordonnance de placement provisoire prononcée mais, comme la veille, pas de place.
Une 2ème nuit au commissariat est proposée mais cette fois, pas de matelas… une chaise et une couverture.
Le jeune est épuisé ; il a froid.
Les nuits dehors, les trombes d’eau, l’humidité…
Bref, en désespoir de cause, je demande l’autorisation de l’héberger pour la nuit.
Il est 22h30.Le procureur donne son autorisation et nous repartons.
Après une douche et une bonne nuit, un petit déjeuner copieux, le jeune, un peu réconforté, se rend à son rendez-vous à l’ASE.
On lui confirme qu’il est bien pris en charge mais qu’il devra attendre qu’une place se libère et on lui donne un autre rendez-vous pour dans une semaine.

D’ici-là, toujours à la rue…

Ré-appel du parquet qui saisit immédiatement le juge des enfants. La magistrate confirme que l’ASE ne remplit pas ses obligations et doit trouver une solution en attendant l’intervention du juge.

Envoi d’un mail à l’ASE… pas de réponse.
2 appels… pas de réponse.

On est vendredi soir.
A la recherche d’une solution et, en accord avec les jeunes, je monte à l’hôtel pour demander exceptionnellement l’autorisation que notre jeune ami puisse partager la chambre d’un autre jeune, puisque chaque chambre est équipée d’un lit mezzanine.
La personne de l’accueil m’explique qu’elle n’a pas le droit. Je lui demande alors le numéro d’astreinte de l’ASE.
En ligne avec une inspectrice de l’ASE du département, j’explique la situation.
Elle me confirme qu’il n’y a aucune place libre.

Je lui précise que je suis au courant du manque de places, que je comprends que la situation est difficile et lui fait part de cette solution que nous avons envisagée.

Je m’entends répondre que ce n’est pas possible et que le jeune doit attendre son rendez-vous de vendredi prochain.

Je rappelle que les mineurs doivent être mis à l’abri et sont protégés par des textes de loi, que je ne peux remettre le jeune à la rue.

Rien n’y fait, et toujours cette phrase qui revient en boucle : pas de solution, pas de solution…
je rappelle que je suis en train d’en proposer, une solution.

« Mais, Madame, vous êtes inspectrice de l’ASE, il me semble que vous êtes habilitée à prendre ce genre de décision ?… »  Réponse : une personne seule ne peut prendre une décision et 2 personnes dans une même chambre, ce n’est pas le même coût, sans compter les repas…
Ah, si ce n’est que ça… je propose alors que notre association puisse prendre en charge éventuellement, à titre tout à fait exceptionnel, la différence.
Pas possible non plus… Aucune décision seule, ni pendant l’astreinte.
Instructions du département… cadre juridique, etc., etc…
Il faudrait attendre mercredi, compte-tenu du pont du 15 août, pour soumettre la proposition au Conseil départemental.

« Mais à quoi sert ce numéro d’astreinte s’il ne répond pas aux situations d’urgence ? »

Comprenant que je n’obtiendrai rien pour venir en aide à notre jeune ami, je ne peux m’empêcher de dire à mon interlocutrice que, naïvement peut-être, je pensais que Aide Sociale à l’Enfance signifiait que l’on apporte une aide aux enfants, pas qu’on les laisse dormir dans la rue, en proie à tous les dangers…

Pas de solution, pas de solution….

« Mais enfin, Madame, vous rendez-vous compte que vous êtes en train de me dire que ce jeune doit retourner dormir dans la rue ?… Vous-même, comment pouvez-vous dormir après ça ? »…
A ce moment précis, je sens que le ton de ma voix change… Oui, je suis en colère, vraiment en colère…

La conversation se termine sans qu’on me propose la moindre solution pour mettre le mineur hors de danger.

Comment, sous prétexte de répondre aux ordres, en arrive-t-on sciemment à mettre en danger la vie d’autrui, a fortiori un mineur ?

Mais quelle est donc cette institution qui nous dit : « vous savez, ces jeunes sont sous notre responsabilité. C’est comme si nous étions leurs parents »… et qui, par ses décisions, ou ses non-décisions, les rend victimes de maltraitance… car c’est bien de cela dont il s’agit.

Est-ce que nous, en tant que parents, laissons nos enfants dormir à la rue ?

Il ne s’agit pas de mettre en cause les éducateurs ou professionnels.
Certains font plus que leur travail et j’ai vraiment une grande admiration pour certains, mais quels sont ces ordres du Département, ou de l’État lui-même qui ne respecte pas ses propres lois ?

Et enfin, comment peut-on accepter et obéir aux ordres avec un tel déni de bons sens et d’humanité ?

L’histoire nous a montré où de tels comportements pouvaient mener…

 

Communiqué – Manifestation Cassel. 16 août 2017

16 août 2017 : Manifestation de mineurs non accompagnés mis à l’abri à Cassel, au sein d’un Centre de répit temporaire et collectif (CRTC), géré par l’Afeji.

COMMUNIQUÉ

« Nous voulons que nos droits soient respectés.

Nous sommes tous des mineurs non accompagnés, venant de Guinée, Sénégal, Cameroun, Cote d’Ivoire, Mali.

Nous étions à Lille, « habitants » du parc des Olieux. Suite à l’expulsion du parc le 23 novembre 2016, La préfecture et  Le Département nous ont mis à l’abri à l’Escale à Dunkerque. De là on nous envoyés à Cassel, nous disant que ce ne serait plus une mise à l’abri mais un vrai foyer. Arrivés à Cassel, on nous a dit qu’on n’était là que pour un mois, encore une nouvelle mise à l’abri en attendant un vrai foyer. C’était en mars, et nous sommes toujours là, à attendre. Pas d’école en juillet et août et aucune activité ne nous est proposée.

Nous sommes en colère car on ne nous entend pas. Quand on parle, les éducateurs oublient très vite ce qu’on a dit. Ils ne nous prennent pas au sérieux. Ils nous oublient.

Ce qu’on voudrait ?

– Notre priorité c’est d’être accompagnés dans nos démarches pour trouver un apprentissage. Nous sommes scolarisés à Wormhout, Hazebrouck et Dunkerque (pour aller à l’école à Dunkerque on doit se réveiller à 5h et on arrive bien trop tôt à l’établissement). Nos formations : boulangerie, plomberie, mécanique, agent de propreté, cuisine, bâtiment.  Nous avons besoin d’aide pour trouver un employeur qui nous formera dans le cadre d’une formation en apprentissage. Nous n’avons pas d’ordinateur à notre disposition pour faire ces recherches.

Nous n’avons eu aucun manuel ni aucune fournitures scolaires, à part quelques cahiers pour étudier malgré nos demandes.

– Nous n’avons pas de CMU malgré nos nombreuses demandes. Certains d’entre nous ont besoin d’être opérés. On doit même payer nos médicaments.

– Après le renvoi du personnel d’entretien, on nous demande de nettoyer les espaces communs en plus de nos chambres !

– Nous avons droit à de l’argent de poche mais nous n’avons que 21 euros par semaine en ticket service.

– Aucun accompagnement pour ceux d’entre nous qui se sont débrouillés pour avoir des activités.

– Nous avons aussi besoin d’un référent social car nous approchons de notre majorité : aide   pour  l’allocation d’autonomie, aide pour  le contrat d’accès à l’autonomie.

– A chaque réclamation, on  nous demande de ne pas faire de vague, on nous menace d’avoir un rapport et des problèmes avec la préfecture lors de notre demande de titre de séjour.

On aime la France.

On se sent seuls et oubliés.

L’AFEJI nous fatigue. »

Les mineurs non accompagnés mis à l’abri au CRTC (Centre de Répit Temporaire et Collectif) de Cassel

La voix du nord // Pourquoi y a t-il autant de migrants venus d’Ethiopie et d’Erythrée?

http://www.lavoixdunord.fr/201189/article/2017-08-06/pourquoi-y-t-il-autant-de-migrants-venus-d-ethiopie-et-d-erythree

Pourquoi y a-t-il autant de migrants venus d’Éthiopie et d’Érythrée ?

– Pourquoi de nombreux Éthiopiens quittent-ils leur pays ?

« En Éthiopie, 80 % de la population vit de la terre. La croissance démographique est de 2,6 % par an, tandis que la surface de la terre à cultiver reste stable. La superficie moyenne de l’exploitation est de 0,75 hectare. La parcelle est transmise à un ou deux enfants, les trois ou quatre autres restent sur le carreau. Venant de la campagne, sans qualification, ces jeunes n’ont aucune chance de trouver du travail en ville. Ils n’ont d’autre perspective que d’émigrer. »

– Y a-t-il des perspectives d’amélioration ?

« À très long terme. Sans être une démocratie (c’est même un État autoritaire), l’Éthiopie est un des rares pays d’Afrique réellement structuré. C’est un État solide, qui a une stratégie de développement. Il y a des investisseurs internationaux, une véritable croissance, mais le problème, c’est que le cœur de la pauvreté n’a pas encore été atteint. Un ouvrier éthiopien gagne 40 € par mois. 20 % de la population a besoin de l’aide alimentaire d’urgence. »

– La situation de l’Érythrée est-elle comparable ?

« Non. D’abord en raison de sa taille, l’Érythrée, c’est six millions d’habitants. L’Éthiopie, c’est cent millions. L’indépendance de l’Érythrée est récente, elle remonte à 1991. Jusqu’en 1998, le pays a connu une forte croissance, favorisée par un niveau d’éducation supérieur et une main-d’œuvre qualifiée, héritage de la colonisation italienne. Le pays se rêvait alors comme le Singapour de l’Afrique. Mais une nouvelle guerre est intervenue en 1998 avec l’Éthiopie, au terme de laquelle un accord sur la frontière entre les deux pays a été signé, que l’Éthiopie n’a jamais accepté. Depuis, les deux pays se livrent une sorte de guerre souterraine, chacun accusant l’autre de soutenir son opposition… L’Érythrée était déjà une dictature, et le pouvoir a profité de ce conflit pour la durcir encore. Autant en Éthiopie, il reste quelques espaces individuels de liberté, autant en Érythrée, c’est la dictature, dans toute son horreur. »

– De nombreux Érythréens arrivant chez nous sont très jeunes. Pourquoi ?

« Les Érythréens, à l’âge de 18 ans, sont tenus d’entrer au service de l’État. C’est un service militaire, pour une durée infinie, et en même temps un service civil. Les gens entrent dans la fonction publique, travaillent sur des chantiers d’État, ou pour l’armée elle-même, pour des salaires dérisoires, le tout dans un contexte de corruption massive. Des Érythréens quittent leur pays avant, ou peu de temps après, pour se sortir de cet enfer. Pour l’Érythrée, l’émigration est donc dictée au moins autant par la situation politique que par la situation économique. »

– L’État combat-il cette émigration ?

« Non. Il existe des réseaux de passeurs, qui impliquent probablement une partie du régime. L’émigration est une source d’enrichissement pour des personnes très haut placées. Et de plus, les Érythréens exilés sont tenus de verser 2 % de leurs revenus au régime. Pour ce dernier, c’est une rentrée d’argent très importante. »

– L’Europe est-elle la première destination d’émigration des Éthiopiens et des Érythréens ?

« Non, la majorité d’entre eux se dirigent vers la péninsule arabique, les pays du Golfe, ainsi que le Liban. Les gens traversent la Mer Rouge par le détroit de Bab-al-Mandeb, qui est d’ailleurs au moins aussi meurtrier que la Méditerranée. Puis ils traversent le Yémen à pied où là, ils sont bien souvent victimes de la guerre civile qui s’y déroule. Sinon, il n’y aucun lien particulier entre ces pays et la Grande-Bretagne. S’ils veulent s’y rendre, c’est parce qu’ils espèrent y trouver plus facimement du travail ».

Réaction de Dominique, Tatinghem

Réaction de Dominique, soutien aux exilés de passage à Tatinghem, suite à l’interpellation du Préfet par les mairies environnantes du camp.

 » Le 20 juillet, le maire de Saint Martin lez Tatinghem, le maire de Longuenesse et le maire délégué de Tatinghem ont sollicité l’intervention du préfet pour le démantèlement du camp de Tatinghem.

Comme toujours dans une telle situation, les arguments sont les mêmes :

– Le camp est vu comme « un repère de passeurs », « le démantèlement permettrait de faire sauter ce point de fixation et de désorganiser la filière ». Est ce vraiment si facile ?

– Les maires agissent bien sûr pour la tranquillité de la population « qui s’interroge sur les conditions d’existence de ces hommes », et pour la tranquillité des « exploitants agricoles ».

– Ils agissent aussi pour la sécurité des exilés qui pourraient rencontrer des moissonneuses dans les champs en cette saison de récoltes et aussi pour le bien être de « ces personnes en grande souffrance et en grande détresse ».

– Les maires proposent une solution : ils demandent au préfet de « procéder au démantèlement de ce camp et d’envoyer les personnes qui s’y trouvent dans un Centre d’Accueil et d’Orientation où elles pourront être prises en charge ».

Tout le monde serait content : les maires qui n’auraient pas à faire le sale boulot avec un arrêté municipal, la population qui n’aurait plus à s’interroger, les agriculteurs, pardon, les exploitants agricoles qui moissonneraient joyeusement, et les exilés rassurés dans un CAO ou CAES, je ne sais plus…

Et si les maires arrêtaient de penser, de parler à la place de ces hommes de passage à Tatinghem ?

Et s’ils leur demandaient leur avis ?

Et s’ils les écoutaient ?

Alors ils entendraient notamment que certains sont déjà passés par la case CAO et l’ont fui, que s’ils sont à Tatinghem, c’est pour mieux réaliser leur projet d’aller en l’Angleterre. »