Amnesty // Les dessous du projet de loi asile et immigration

https://www.amnesty.fr/refugies-et-migrants/actualites/les-dessous-du-projet-de-loi-asile-et-immigration

Les dessous du projet de loi « asile et immigration »

 Publié le 22.03.2018.

Nouveau gouvernement, nouveau projet de réforme de la loi sur les étrangers. Cette réforme de trop ne va rien résoudre, pire elle met en danger les droits humains des réfugiés et migrants.

Moins de deux ans après les réformes engagées par le précédent gouvernement, le nouvel exécutif entend à son tour modifier les règles relatives à l’asile et au droit des étrangers. Depuis 1980, 16 lois majeures sont venues modifier les conditions d’entrée et de séjour ou d’asile.

Le droit des étrangers, et le droit d’asile, sont soumis, peut être plus que toute autre branche du droit, aux fluctuations politiques. Il va sans dire que les droits des étrangers ne sont ni les motivations ni les objectifs premiers de ces réformes.

Les droits humains sacrifiés au nom de l’efficacité

Cette nouvelle réforme vise l’efficacité. La procédure d’asile et les mesures d’éloignement doivent ainsi être accélérés.

Un objectif avant tout politique et qui ne devrait pas conduire à porter atteinte aux droits humains des personnes concernées.

Or, à la lecture du projet de loi, l’efficacité prend clairement le dessus .

Pendant la procédure d’asile, tous les délais seront réduits. Certes, voir sa demande d’asile examinée rapidement est important pour celles et ceux qui cherchent une protection. Cependant, ces personnes ont besoin de temps pour formuler leur demande dans de bonnes conditions.

L’accélération prévue de la procédure, ne tient pas compte de la situation spécifique de ces personnes qui souvent sont loin de maitriser la langue ou les démarches. Cette accélération est une menace pour le respect de leurs droits

Réfugiés vs migrants

Le nouveau projet de loi oppose dangereusement les réfugiés et les migrants. Il indique clairement que pour protéger les réfugiés, il faut renvoyer des migrants. Rogner les droits des migrants, comme les priver de liberté, est cyniquement légitimé par une fin ‘’humanitaire’’.

Les migrants comme les réfugiés sont des personnes. Un Etat a certes la possibilité de décider si une personne migrante peut ou non demeurer sur son territoire ,mais, dans tous les cas, l’Etat est tenu de respecter leurs droits humains.

Lire aussi : les 3 mesures les plus dangereuses du projet de loi

Une réforme dangereuse qui ne résoudra rien

Le système d’asile en France dysfonctionne depuis de nombreuses années, malgré la multiplication des réformes. Ces dysfonctionnements, tels que des délais très longs pour enregistrer les demandes, l’insuffisance de places d’accueil, ne sont pas exclusivement imputables à la récente hausse des demandes d’asile. Cela fait plus de vingt ans que ces problèmes existent, à des degrés divers et que nous n’avons pas cessé de les dénoncer.

Et ces différentes réformes ne visent jamais les vrais problèmes et n’apportent pas de réponses permettant de garantir et de respecter les droits des personnes.

Le respect des droits humains implique de faire des choix. Ces choix passent par davantage de moyens pour accueillir et héberger les personnes, pour enregistrer les demandes d’asile et pour réaliser des auditions.

Plus globalement, la question des migrations, ou de l’immigration, est toujours posée comme un problème, une menace, un mal. Pour sortir de l’impasse, il faut changer d’approche : la migration a toujours existé et elle existera toujours. C’est une réalité. Ce n’est pas un « problème », mais un défi et une opportunité à bien des égards.

A propos du « délit de solidarité »

La loi française n’est toujours pas en conformité avec les dispositions du Protocole de Palerme. C’est à dire qu’il ne doit pas exister de poursuites pénales possibles en cas d’aide à une personne en situation irrégulière dès lors que cette aide n’a pas donné lieu à un avantage financier ou un autre avantage matériel.

Non aux attaques contre les droits des réfugiés et des migrants !

Interpellez les Présidents de Groupe à l’Assemblée Nationale sur le projet de loi Asile et immigration

Signez la pétition

 

Décision du Conseil Constitutionnel sur la rétention des dubliné.e.s

Décision n° 2018-762 DC du 15 mars 2018 – Loi permettant une bonne application du régime d’asile européen

Par sa décision n° 2018-762 DC du 15 mars 2018, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la loi permettant une bonne application du régime d’asile européen, dont il avait été saisi par plus de soixante sénateurs. La portée de sa décision est à appréhender au regard des seules dispositions de la loi dont il était saisi.
Les requérants contestaient certaines dispositions des articles 1er et 3 de la loi, modifiant les conditions de placement en rétention administrative et d’assignation à résidence des demandeurs d’asile relevant du règlement européen du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (règlement dit « Dublin III »).
Les dispositions contestées modifient le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile afin de définir les conditions dans lesquelles le demandeur d’asile présentant un risque non négligeable de fuite peut être placé en rétention. Elles définissent douze critères en fonction desquels ce risque peut être regardé comme établi. Elles réduisent de quinze à sept jours le délai de recours contre la décision de transfert vers l’État responsable de l’examen de la demande d’asile, lorsque l’étranger ne fait pas l’objet d’une mesure de placement en rétention ou d’assignation à résidence.
Trois séries de griefs étaient formulés contre ces dispositions.
En premier lieu, il leur était reproché de méconnaître l’objectif à valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, faute de permettre de déterminer le moment à partir duquel l’étranger relevant du règlement européen dit Dublin III pourra désormais être mis en rétention.
Le Conseil constitutionnel écarte ce grief en jugeant qu’il résulte des dispositions contestées que le placement en rétention ne peut concerner qu’un demandeur d’asile faisant l’objet soit d’une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge par un autre État, soit d’une décision de transfert vers l’État responsable de l’examen de sa demande. Il en va de même pour le placement en rétention d’un demandeur d’asile qui était auparavant assigné à résidence.
En deuxième lieu, il était soutenu que les dispositions contestées méconnaissaient la liberté individuelle en autorisant, même en l’absence de menace pour l’ordre public ou de nécessité de bonne administration de la justice, le placement en rétention de demandeurs d’asile alors que ceux-ci ne font pas nécessairement, à ce stade de la procédure organisée par le règlement du 26 juin 2013, l’objet d’une mesure d’éloignement, et en autorisant le placement en rétention d’un étranger sans caractériser un risque de fuite de celui-ci.
Le Conseil constitutionnel relève à ce titre, d’une part, que le placement en rétention intervient à un stade de la procédure où l’autorité administrative dispose d’indices sérieux que l’examen de la demande d’asile échoit à un autre État en application du règlement européen du 26 juin 2013. Le placement ne peut être décidé qu’à l’encontre d’un étranger qui présente un risque non négligeable de fuite, alors qu’il est susceptible d’être transféré vers un autre État. Cette mesure est donc motivée par la sauvegarde de l’ordre public. Il appartient à l’administration d’apprécier, sous le contrôle du juge, les situations caractérisant un risque non négligeable de fuite sur la base d’une évaluation individuelle prenant en compte l’état de vulnérabilité de l’intéressé et de tenir compte d’éventuelles circonstances particulières ne permettant pas de regarder le risque allégué comme établi. Si au nombre des situations pouvant caractériser un tel risque de fuite comptent l’altération de ses empreintes digitales pour empêcher leur enregistrement, la fraude aux titres d’identité, de séjour ou de voyage, la dissimulation de son identité, de son parcours ou de sa situation, notamment vis-à-vis de l’asile, l’appréciation du caractère volontaire de ces altérations, fraudes ou dissimulations est placée sous le contrôle du juge.
D’autre part, le placement en rétention n’est susceptible d’intervenir qu’en dernier ressort, si une mesure d’assignation à résidence n’est pas suffisante pour parer au risque de fuite. La mesure de rétention, qui ne peut être prolongée au-delà de quarante-huit heures qu’avec l’accord du juge judiciaire, ne peut durer plus de quarante-cinq jours.
De l’ensemble de ces éléments, le Conseil constitutionnel déduit que l’atteinte portée à la liberté individuelle doit être regardée comme nécessaire, adaptée et proportionnée à l’objectif poursuivi par le législateur.
Enfin, selon les sénateurs requérants, la réduction du délai de recours contre la décision de transfert lorsque l’étranger ne fait pas l’objet d’une mesure de placement en rétention ou d’assignation à résidence portait atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif.
Le Conseil constitutionnel écarte ce grief en relevant notamment que, lorsque l’intéressé n’est pas assisté d’un avocat, les principaux éléments de cette décision lui sont communiqués dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend, que la décision de transfert ne peut pas faire l’objet d’une exécution d’office avant l’expiration d’un délai de quinze jours et que le recours contre cette décision a un caractère suspensif.
Pour ces motifs, le Conseil constitutionnel juge conformes à la Constitution le premier alinéa et les 5° à 8° du paragraphe II de l’article L. 551-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le second alinéa de l’article L. 554-1 et les 1° bis et dernier alinéa du paragraphe I de l’article L. 561-2 de ce même code, dans leur rédaction résultant de l’article 1er de la loi permettant une bonne application du régime d’asile européen, ainsi que le mot « sept » figurant au premier alinéa du paragraphe I de l’article L. 742-4 du même code, dans sa rédaction résultant de l’article 3 de cette même loi.

Communiqué de la Cimade // Rétention des personnes dublinées

RÉTENTION DES PERSONNES DUBLINÉES : PUBLICATION DE LA LOI PERMETTANT SA GÉNÉRALISATION

21 mars 2018
https://www.lacimade.org/retention-personnes-dublinees-publication-de-loi-permettant-generalisation/

Publication de la loi permettant de nouveau et de façon massive la rétention des personnes Dublinées. Explication.

Après l’arrêt de la Cour de cassation du 27 septembre 2017 qui a considéré que la rétention des personnes Dublinées n’était pas applicable, faute d’une définition par loi du risque de fuite, le Gouvernement n’a pas tardé à réagir en demandant aux groupe les constructifs de déposer une proposition de loi. Après une adoption à l’Assemblée le 7 décembre et un durcissement au Sénat, la proposition a été définitivement adoptée en deuxième lecture le 15 février par l’Assemblée et a été publiée au journal officiel après une décision de conformité  du Conseil Constitutionnel le 15 mars. Elle va conduire à un usage massif de la rétention pour ces personnes y compris  une rétention sans décision d’éloignement pendant la période de détermination et de saisine .

LES DOUZE CAS DE RISQUE PRÉSUMÉ DE FUITE

La loi relative à la bonne application du régime d’asile européen  prévoit donc qu’une personne qui fait l’objet d’une procédure selon le règlement Dublin peut être placée en rétention après un examen individuel et en tenant compte de sa vulnérabilité s’il existe  risque non négligeable de fuite, risque qui est présumé dans les cas suivants :

  1. la personne a fui un premier pays pendant l’examen de détermination C’est le cas d’une personne arrivée par exemple en Autriche qui entame une procédure vers la Hongrie. Plutôt que d’y être à terme transférée, elle quitte le pays et demande asile dans un autre.
  2. la personne a été déboutée dans un premier État-membre. Ce cas est  un motif de reprise en charge et son nombre serait en forte augmentation selon le  ministère,  notamment des Afghans en provenance d’Allemagne.  En  2016, seuls 5 % des  personnes Dublinées étaient dans ce cas et  15 % pour l’Allemagne)
  3. la personne est de retour après un transfert dans un État-membre, c’est le cas notamment des personnes transférées vers l’Italie qui ne peuvent pas toujours voir enregistrer leur demande. Si leur nouvelle demande est enregistrée, elles sont privées des conditions d’accueil par l’OFII et pourraient donc être placées très rapidement en rétention ;
  4. la personne s’est soustraite à une précédente mesure d’éloignement ;
  5. la personne refuse le relevé des empreintes. La loi de 2015 prévoit dans ce cas une procédure accélérée  à l’OFPRA mais les préfets ont développé une pratique de convocation ad libitum sans possibilité de de saisir l’OFPRA. Une nouvelle étape serait donc un placement en rétention pour la contraindre à accepter le relevé ;
  6. La personne a utilisé un document falsifié (passeport, carte d’identité, acte de naissance);
  7. la personne a dissimulé son identité, des documents, son parcours  migratoire et ses précédentes demandes. Là encore, il s’agit d’un cas de procédure accélérée(par le préfet et par l’OFPRA) .
  8. La personne qui ne bénéficie pas des conditions d’accueil ne peut justifier d’une résidence permanente ou effective. Il peut s’agir de celles qui ont enregistré leur demande d’asile plus de 120 jours après leur entrée irrégulière et qui font l’objet d’un refus des conditions d’accueil à qui serait exigé de disposer d’une résidence (et non d’une adresse de domiciliation dont elles sont exclues);
  9. La personne a refusé l’hébergement proposé par l’OFII, refuse d’y aller ou l’abandonne. Dans le cadre de la réorganisation du dispositif national d’accueil par la circulaire du 4 décembre 2017  (DNA), l’OFII propose l’envoi vers un centre d’accueil et d’étude de situation ou vers des PRAHDA. Si la personne refuse cette offre, elle pourrait être placée en rétention.
  10. la personne ne se rend pas aux convocations des autorités. Cela concerne les rendez-vous en préfecture, les pointages d’assignation mais également les rendez-vous à l’OFII. C’est l’indice de la fuite mais il est vraisemblable que les préfectures se contenteront d’’une seule absence pour considérer que le risque est établi et le placement en rétention possible
  11. la personne s’est soustraite aux obligations de l’assignation, notamment en n’allant pas pointer ou en quittant le périmètre  fixé par le préfet  (en général une commune, un canton ou un département)
  12. last but not least, la personne a déclaré explicitement refuser le transfert.

Avec une telle liste, il est clair que la plupart des personnes Dublinées  pourront être enfermées en rétention, même si la loi prévoit que cela n’est  possible que si une saisine des autorités de l’Etat-membre a été faite (dans un délai ne pouvant excéder trois mois après la présentation dans les structures de premier accueil) et que les familles  ne le soient qu’après une décision de transfert et pour une brève durée. Un décret devra également permettre de signaler des vulnérabilités.

POSSIBILITÉ DE PLACER EN RÉTENTION PENDANT LA PROCÉDURE DE DÉTERMINATION

Véritable revirement dans la philosophie de la rétention, et jusqu’à présent limitée aux préfectures du littoral, la loi permet de placer en rétention une personne Dublinée,  pendant toute la procédure de saisine(s)  et sans qu’aucune  mesure d’éloignement soit prise . Cela légalise une pratique courante dans certains centres de rétention (Coquelles, Rennes) et  après que le Conseil d’État en juillet  puis de nouveau en mars et la Cour de cassation le 7  février ont, de conserve, considéré que cela n’était pas possible. Sachant que le règlement prévoit qu’en cas de rétention, la saisine se fait dans un délai d’un mois, la réponse dans un délai de quinze jours et le transfert en six semaines, et que le projet de loi  Collomb prévoit une durée de rétention de 60 jours pour les personnes Dublinées (avec trois fois quinze jours supplémentaires en cas d’obstruction), on pourrait voir des personnes séjourner pendant des semaines dans les CRA sans aucune décision d’éloignement alors que cette privation de liberté n’était prévue jusqu’alors que  pendant le temps strictement nécessaire à l’exécution d’une décision d’expulsion.

La loi prévoit  également que si une personne retenue demande asile et que sa demande relève de Dublin , le préfet n’aura pas à prendre une décision de maintien en rétention, pourtant rendue obligatoire par le droit européen.

EXTENSION DE LA DURÉE DE L’ASSIGNATION (EN ATTENDANT CELLE DE LA RÉTENTION)

Pour permettre le placement en rétention, la loi prévoit un remplacement de l’assignation au titre  de l’article L. 742-2 du CESEDA (pendant six mois renouvelable) par celle  au titre de l’article L. 561-2 du CESEDA (pendant 180 jours). Le. Le seul avantage que l’on peut y trouver est que l’assignation à résidence L. 561-2 du CESEDA est contestable en recours urgent devant le TA qui peut donc examiner à chaque renouvellement des moyens contre la procédure de détermination et de saisine  (notamment si la personne peut invoquer des liens en France). La loi prévoit que si une décision de transfert est prise après le début d’une assignation à résidence, le juge statue dans les soixante-douze heures à compter de la notification de l’assignation.

RÉDUCTION DU DÉLAI DE RECOURS NORMAL

Enfin le Sénat en a profité pour réduire le délai de recours  contre les décisions de transfert à sept jours au lieu de quinze. Il s’agit des recours formés alors que la personne n’est ni assignée, ni retenue.  Pour réduire encore le délai à quarante huit heures,  les préfets ont massivement utilisé l’assignation à résidence et la rétention.  Ainsi en 2017 , selon des données du Conseil d’Etat, 60% des 9 000 recours contre des décisions de transfert ont été formulés dans un délai de quarante huit heures alors qu’en 2016, cette part était de 21% pour  2 600 recours.

 

DES PRÉFECTURES QUI ANTICIPENT SON APPLICATION

La loi a été présentée comme réparant une faille juridique mais les préfectures n’ont jamais cessé de placer en rétention des personnes Dublinées alors même qu’elles n’en avaient plus le droit.

Entre le 28 septembre 2017 et le 19 mars 2018, dans les seuls centres où la Cimade exerce la mission d’aide à l’exercice des droits,  au moins 451 personnes  dont 60 enfants ont été placées en rétention pour l’exécution d’une décision de transfert et au moins 171 ( dont 15 enfants) ont été transférées vers un autre État Dublin. Pour contourner les décisions des juridictions suprêmes, les préfets ont placé les personnes le soir pour un vol dès potron-minet, les empêchant de saisir les juges. 85% des personnes ont ainsi été placées pendant un ou deux jours. Dans d’autres lieux, ce sont les juges des libertés et de la détention qui ont prolongé la rétention  sous prétexte que les personnes étaient en fuite . Les tribunaux administratifs de Melun et de Montreuil ont enjoint au préfet de mettre fin à la rétention de personnes pour qui la procédure Dublin était éteinte

 

La Voix du Nord // Etat et département du Nord toujours pas d’accord sur les MNA

http://www.lavoixdunord.fr/334174/article/2018-03-13/etat-et-departement-du-nord-toujours-pas-d-accord-sur-les-mineurs-etrangers-non

Las, «  les propositions ont été très minimales. On a vraiment l’impression que le gouvernement n’a plus un rond…  ». Un paradoxe, alors que l’on annonce de meilleures rentrées fiscales grâce à une amélioration de la conjoncture.

Sur les MNA, l’État souhaite que leur accueil reste une compétence départementale, dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance, tout en proposant de reprendre à sa charge la mise à l’abri et l’évaluation. «  Le Premier ministre propose de mieux lutter contre les filières, un fichier biométrique pour éviter que des personnes évaluées majeures à Pau soient évaluées mineurs à Lille. Il veut aussi mettre en place une procédure nationale d’évaluation et donner aux préfets de région l’arbitrage pour répartir dans les départements les MNA en cas d’afflux  ».

Le gouvernement confirme aussi son aide d’urgence pour 2018 de 30 % d’une somme de 40 000 € par MNA. «  Nous souhaitions que cette somme soit maintenue pour les années suivantes voire améliorée en cas d’afflux. Mais il n’y aura pas de pérennisation au-delà de 2018. Or si 30 000 personnes obtiennent le statut de MNA en France en 2019, il y en aura environ 1500 en plus pour le seul Département du Nord, soit 75 millions d’euros par an. En plus des 40 millions que nous payons actuellement, cela fait 115 millions d’euros  ».

Bras de fer

Soit deux mois de budget RSA pour le Département. Du lourd au moment même où l’État ne met « que » 200 à 250 millions d’euros sur la table pour mieux compenser le déséquilibre historique État-Départements dans le paiement des allocations sociales, «  alors qu’il en faudrait de 500 millions à un milliard  ».

Tout cela mis bout à bout fait dire à Jean-René Lecerf : «  C’est une équation budgétaire qui ne tient pas. Si on en reste là, nous ne pourrons pas payer correctement l’accueil des mineurs en danger, étranger ou non, en 2019  ». Et de prévenir : «  S’il n’y a pas d’accord acceptable avant la fin du mois, nous n’aurons aucune raison de signer le contrat pour contenir les finances publiques que l’État nous propose  ». Le bras de fer continue.

Rassemblement pour un MNA décédé à Paris

Action collective

Un mineur isolé pris en charge par l’ASE de Paris meurt faute d’un suivi adapté
Rassemblement à Paris mercredi 21 mars 2018, dès 18 heures, place de l’Hôtel de Ville

Il se prénommait Malik Nurulain mais préférait qu’on l’appelle Nour. Nour est mort le 14 février 2018, retrouvé noyé dans la Seine à Paris. Il avait 17 ans. Victime de tortures, il avait fui le Pakistan à l’âge de 15 ans.

En France depuis un an, sous la responsabilité de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) de Paris, il bénéficiait depuis peu de la protection subsidiaire accordée par l’OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides).

Depuis cinq mois, il était pourtant logé seul à l’hôtel sans encadrement adéquat et en grande détresse psychique. Il avait déjà été pris en charge à deux reprises en hôpital psychiatrique avant que l’ASE ne décide de le mettre à l’hôtel faute de place adaptée en foyer.

Quelques mois après son placement à l’hôtel, il est sauvé d’une première tentative de suicide dans la Seine et pris en charge pour la troisième fois en hôpital psychiatrique. À sa sortie, il est à nouveau relogé à l’hôtel, seul face à ses traumatismes. Son corps inerte est repêché sept jours après sa sortie de l’hôpital.

Seule responsable légale de ce mineur non accompagné, l’ASE l’a maintenu à l’hôtel, dans un environnement manifestement inadapté pour assurer sa protection et ce malgré les risques avérés de suicide et les signalements répétés de l’entourage (amis, associations, administrateur ad hoc). En conséquence, nous dénonçons l’inaction de l’ASE de Paris qui, selon nous, relève d’une situation manifeste de non assistance à personne en danger.

Interrogée par l’entourage de Nour cinq jours après sa sortie de l’hôpital, l’ASE affirmait n’avoir aucune nouvelle de lui. Le signalement de la disparition à la Brigade des mineurs ne sera fait que douze jours après sa sortie de l’hôpital. Au moment du signalement de sa disparition par l’ASE, il était déjà mort depuis cinq jours. Sans la mobilisation d’associations et d’individus qui ont croisé le chemin de ce garçon, la mort de Nour serait probablement passée sous silence.

Le système actuel de la prise en charge de ces jeunes est totalement inadapté. Il est inadmissible qu’un mineur, qui relève de la protection de l’enfance, reste seul dans un hôtel sans l’accompagnement régulier de professionnels, alors qu’on connaît, de surcroît, sa vulnérabilité puisqu’il sort d’un séjour en hôpital psychiatrique. L’ASE a failli à son obligation de protection.

Comme de nombreux autres exilés, Nour avait risqué sa vie pour venir chercher la protection de la France. Ce n’est pas l’exil qui l’a tué, mais la défaillance du système de prise en charge des mineurs non accompagnés à Paris.

Le 15 mars 2018

À LA MÉMOIRE DE NOUR ET POUR DÉNONCER LES DÉFAILLANCES DE LA PRISE EN CHARGE DES MINEURS NON ACCOMPAGNÉS À PARIS

Rassemblement à Paris mercredi 21 mars 2018
dès 18 heures, place de l’Hôtel de Ville

Organisations signataires :

  • Adjie (Accompagnement et défense des jeunes isolés étrangers)
  • Admie (Association pour la Défense des Mineurs Isolés Étrangers)
  • Asmie (Association de Solidarité avec les Mineurs Isolés Étrangers)
  • Collectif de vigilance du 12ème pour les droits des étrangers
  • Fasti (Fédération des Associations de Solidarité avec Tou⋅te⋅s les Immigré⋅e⋅s)
  • Fédération de Paris de la Ligue des Droits de l’Homme
  • Gisti (Groupement d’information et de soutien des immigré⋅e⋅s)
  • Hors la Rue
  • La Voix de l’enfant
  • Melting passes
  • Mrap (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples)
  • Parcours d’Exil
  • Resf (Réseau Éducation Sans Frontières)
  • SUD Conseil départemental de Seine-Saint-Denis
  • Utopia 56

Le Monde // Un migrant retrouvé mort poignardé à Calais

http://www.lemonde.fr/societe/article/2018/03/17/un-migrant-retrouve-mort-poignarde-a-calais_5272650_3224.html#8WAhFhq87bwrPs5U.99

Quelque 500 à 600 migrants errent dans le Calaisis, où ils tentent la nuit de rejoindre la Grande Bretagne.

LE MONDE |  Mis à jour le  | Par Maryline Baumard

Un jeune Afghan de vingt-cinq ans a été retrouvé mort à Calais à 17 h 20 samedi 17 mars sur une aire de covoiturage. Le jeune homme a été tué samedi en fin d’après-midi d’un coup de couteau. Il est décédé à proximité de l’hôpital où une association assure depuis le 6 mars des distributions de repas aux migrants. Son décès a été confirmé par la préfecture. « Aucun élément ne permet de penser qu’il y a un lien entre cet événement tragique et la distribution de repas aux migrants », a précisé Fabien Sudry, préfet du Pas-de-Calais.

Quelque 500 à 600 migrants errent dans le Calaisis. Ils tentent la nuit de passer en Grande Bretagne et ont du mal à se reposer car la police a pour ordre d’éviter tout point de fixation. Ces jeunes gens, majoritairement Érythréens, Éthiopiens et Afghans sont extrêmement fatigués. Le Monde a pu constater sur place début mars leur état d’exaspération face à la destruction récurrente de leurs effets personnels. À l’époque, ils refusaient la nourriture proposée par l’Etat, situation qui semble s’être arrangée depuis.

 Lire aussi :   A Calais, les migrants refusent les repas de l’Etat

Un bilan qui s’alourdit

Déjà le 1er février, une rixe impliquant une centaine de migrants de nationalité afghane et érythréenne avait éclaté après la distribution de repas. Vingt-deux avaient été blessés, dont quatre blessés par balles. Si l’état de santé de trois des blessés s’est depuis largement amélioré, le quatrième, lui, restera tétraplégique.

Cette mort du jour est à ajouter au bilan qui s’alourdit dangereusement ces dernières semaines. Le 14 février, un Pakistanais de 17 ans a été retrouvé mort noyé dans la Seine. Il était pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance, et avait obtenu la protection subsidiaire de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), mais souffrait de graves troubles psychiques. Les associations d’aide aux migrants ont dénoncé le manque de suivi de l’Aide sociale à l’enfance de Paris et le fait qu’un jeune en grande difficulté psychologique soit laissé dans un hôtel.

Lire aussi :   Calais : une information judiciaire ouverte à la suite des rixes entre migrants

Le 8 février, c’est un Soudanais de trente ans qui a été retrouvé mort devant le Centre de premier accueil de la Porte de la Chapelle à Paris. « Mort de froid, de manque de soin et d’humanité », ont dénoncé les bénévoles qui depuis des mois se relaient pour faire vivre la solidarité et permettre aux migrants de survivre autour d’une action de distribution de petits-déjeuners. Des fleurs ont été déposées sur les blocs de pierre installés l’an dernier par la Ville de Paris pour empêcher les réfugiés de dormir là.

À Paris, les différents comptages évaluent les migrants à 1 500 dans les rues. Le Centre de la Chapelle qui était né sur l’idée d’un accueil inconditionnel va fermer ses portes cette semaine et laisserplace à des centres où sera établie une évaluation administrative des situations. La question reste de savoir si les migrants qui ne sont ni demandeurs d’asile, ni réfugiés, ni en situation régulière rejoindront ces centres.

 

Pays tiers surs : la France au centre du jeu européen?

http://www.europeanmigrationlaw.eu/fr/articles/points-de-vue/pays-tiers-surs-la-france-au-centre-du-jeu-europeen

28/02/2018

Par Yves Pascouau

Au mois de décembre 2017, le gouvernement français a décidé de retirer la notion de «pays tiers sûr» du projet de loi pour une immigration maitrisée et un droit d’asile effectif. Cette annonce a été reçue avec satisfaction par les parties prenantes opposées au concept. Cependant, ce retrait ne marque pas la fin des discussions. En effet, une proposition de règlement actuellement négociée au niveau de l’Union européenne prévoit l’adoption d’une liste européenne commune de «pays tiers sûrs».

In December 2017, the French government decided to remove the notion of « safe third country » of the draft Law for a managed immigration policy and an effective right of asylum. This announcement was received with satisfaction by the stakeholders who were against the concept. However, this removal does not mark the end of the discussions. Indeed, a proposal of regulation currently under negociation at the European level plans the adoption of a common European list of « safe third countries ».

Au mois de décembre 2017, le gouvernement français a décidé de retirer la notion de « pays tiers sûr » du projet de loi pour une immigration maitrisée et un droit d’asile effectif. Si cette notion avait été maintenue, elle aurait permis aux autorités nationales de déclarer une demande d’asile irrecevable au motif que le demandeur d’asile aurait pu ou aurait dû déposer sa demande dans un pays tiers jugé sûr.

Cette annonce a été reçue avec satisfaction par les parties prenantes opposées au concept. Cependant, ce retrait de la loi en préparation ne marque pas la fin des discussions. En effet, une proposition de règlement actuellement négociée au niveau de l’Union européenne (UE) prévoit l’adoption d’une liste européenne commune de « pays tiers sûrs ».

Donner d’une main pour reprendre de l’autre ?

Le gouvernement français a-t-il accepté de retirer le concept du projet de loi en sachant que ce dernier réapparaitrait dans un règlement de l’UE sous la forme d’une liste européenne commune ? C’est une hypothèse, mais elle semble peu convaincante.

D’une part, la société civile est bien informée des procédures en cours à « Bruxelles ». Toute tentative de contourner les oppositions nationales par la voie européenne serait immédiatement repérée. Une telle approche aurait pour effet d’ajouter de la tension et de la suspicion dans un dossier qui n’en manque pas.

D’autre part, la notion de « pays tiers sûr » pose un problème juridique. De nombreux rapports ont souligné que cette notion est incompatible avec la Constitution. Cette dernière dispose que « les autorités de la République ont toujours le droit de donner l’asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif ». User du concept de « pays tiers sûr » pour déclarer une demande irrecevable, c’est-à-dire rejeter la demande sans l’examiner au fond, reviendrait à méconnaître une garantie essentielle du droit d’asile inscrite dans la Constitution.

Enfin, le maniement de cette notion est en pratique assez complexe. Si celle-ci fonctionne pour les États membres de l’UE qui partagent des règles et des valeurs communes en matière d’asile, les pays tiers doivent de leur côté présenter un haut niveau des garanties et de protection. Or, cela impose de s’assurer que le cadre juridique du ou des pays tiers soit conforme à ces exigences mais également que ces règles soient effectivement et correctement mises en œuvre.

Une nouvelle donne

Sauf à pêcher par excès de naïveté, ces éléments autorisent à valider l’hypothèse que le retrait du concept de « pays tiers sûr » du projet de loi s’appuie sur des motifs sérieux et ne repose pas sur une stratégie politique de contournement.

La logique voudrait donc que la France conserve cette position dans la négociation européenne. Si elle ne pourra vraisemblablement pas obtenir le retrait du concept de « pays tiers sûr » du futur règlement européen, elle pourra a minima plaider pour l’adoption d’une liste optionnelle et non pas obligatoire de « pays tiers sûrs » comme le propose la Commission européenne.

Compte tenu du poids de la France dans le dispositif européen, il est évident que l’annonce du retrait de la notion de « pays tiers sûr » du projet de loi n’est pas passée inaperçue. Cette donne peut contribuer à modifier les rapports de force dans la négociation.

Au niveau du Conseil, les États qui expriment des doutes sur la constitutionnalité de la notion de « pays tiers sûrs », comme l’Italie et la Suède, peuvent se fédérer autour de la France. La position française peut également permettre à certains États, qui sont jusque-là restés silencieux, de prendre position sur cette question et défendre l’adoption d’une liste optionnelle. Cet effet d’entraînement peut s’étendre au Parlement européen et à la société civile, qui pourraient trouver dans ce retrait un motif de remise en cause de la notion et de son utilisation.

Les enjeux de clarifications

Mais au-delà de la question du caractère obligatoire ou optionnel de la liste européenne de « pays tiers sûrs », la négociation de la proposition doit aussi permettre de clarifier certains points sensibles.

Cela concerne en premier lieu la question du lien de connexion. Le renvoi de la personne vers un « pays tiers sûr » peut-il s’exercer parce que la personne a simplement transité par ce pays ou parce que la personne a un lien de connexion suffisant avec ce pays ? En fonction du choix, on privilégiera le simple renvoi de la personne ou on prendra en considération les perspectives de son intégration dans le pays tiers.

La seconde clarification porte sur la question de la nature de la protection offerte dans un « pays tiers sûr ». Les États européens peuvent-ils accepter de transférer des demandeurs d’asile dans des pays où ils jouissent d’une protection « suffisante », comme le propose la Commission, ou doivent-ils exiger que la protection accordée dans ces pays soit « effective », comme le prévoit le droit français ?

Loin d’être un simple débat de qualification juridique, cette question est déterminante car elle sous-tend toute la logique, pour ne pas dire toute la philosophie, du concept de « pays tiers sûr ». Si l’on convient que cette notion permet aux États européens de « sous-traiter » l’asile à des pays tiers, ce transfert de responsabilité ne peut en aucun cas se faire « au rabais ».

Ce n’est qu’à la condition que le pays tiers accorde une protection « effective » que ce transfert de responsabilité peut s’opérer. En pratique cela signifie, d’une part, que ce pays dispose d’un cadre juridique qui garantit l’examen de la demande d’asile et l’octroi du statut de réfugié et, d’autre part, qu’un juge indépendant puisse contrôler l’application correcte et effective de ces règles.

Autrement dit, les États membres de l’UE ne peuvent transférer leur responsabilité en matière d’asile qu’à la seule condition que la protection qui est accordée dans les pays tiers soit identique à celle qui est accordée dans l’UE.

Si l’on considère avec le président Emmanuel Macron que le droit d’asile est « sacré », il faut alors hisser la notion de « pays tiers sûr » à la hauteur de cette exigence. C’est à la préservation du droit d’asile dans toutes ses dimensions que les autorités françaises doivent désormais œuvrer dans le cadre des négociations européennes.

Yves Pascoua

Voix du Nord // Le démantélement de la jungle examiné au TA de Lille

http://www.lavoixdunord.fr/330391/article/2018-03-08/le-demantelement-de-la-jungle-examine-au-tribunal-administratif

Trois cents exilés et douze associations poursuivent la préfecture du Pas-de-Calais devant le tribunal administratif de Lille. Ils contestent les modalités du démantèlement de la zone sud du camp de la lande, en mars 2016.

Bruno Mallet | 08/03/2018

La situation migratoire s’invite à nouveau devant le tribunal administratif ce jeudi, deux jours après une audience consacrée au mur anti-intrusions le long de la rocade portuaire. Il va être question du démantèlement de la zone sud de la « jungle », en mars 2016. À l’époque, selon les associations de soutien aux migrants, 3 450 personnes avaient été délogées, 2 500 d’entre elles se « relogeant » illico dans la zone, qui sera démantelée en novembre de la même année.

Les associations de soutien aux migrants avaient contesté les conditions de ce démantèlement, décidé par la préfète, Fabienne Buccio. Douze d’entre elles (Auberge des migrants, Help Refugees, Utopia 56…) ont entamé une procédure. Elles figurent au rang des demandeurs comme 301 réfugiés, qui vivaient dans cette zone.

Quel est l’enjeu ?
« L’enjeu n’est évidemment pas de demander la reconstitution de ce camp, explique l’avocat des associations et des exilés, Lionel Crusoé. Mais de fixer un cadre jurisprudientiel dans lequel les autorités peuvent organiser de tels démantèlements, et de garantir les droits des occupants. » Le jugement sera scruté pour les démantèlements qui pourraient intervenir dans le futur. Une procédure similaire est en cours d’instruction concernant le démantèlement de la zone nord de la lande.

Nord Littoral // Longuenesse, le nouveau campement démantelé dans quelques jours

http://www.nrjnordlittoral.com/longuenesse-le-nouveau-campement-demantele-dans-quelques-jours/

 

> Il y a quelques semaines de cela  , le camp ‘ de la bergerie ‘ à Tatinghem était démantelé … A l’arrivée des forces de l’ordre le camp était vide … Quelques semaines plus tard un autre campement est reformé à une centaine de mètres de là .

Le nouveau campement de Longuenesse ( Photos Philippe SOUNY )> Une vingtaine de migrants !

> Depuis fin Janvier et comme il fallait le prévoir , c’est un autre campement qui prend forme à Longuenesse près du nouveau cimetière de la ville . Nullement agressifs, les migrants qui y séjournent n’ont qu’une seule idée en tête ..rejoindre l’Angleterre . Un campement positionné sur un terrain du centre hospitalier de la région de ST OMER ( qui a d’ailleurs déposé plainte pour cette occupation illégale . 2 autres plaintes également déposées par des agriculteurs qui ont vu leur plantation mises à mal ) a finalement vu les migrants arriver. De quelques uns au départ,( 3 ont été interpellés, placés en garde à vue et condmané à 150€ d’amende avec sursis ) ,  ils sont une vingtaine désormais à attendre des jours meilleurs sur ce terrain de Longuenesse.

> Démantelé dès que les températures le permettront

> ‘ST OMER n’a pas vocation à devenir annexe de Calais‘ s’exprime à notre micro le Sous Préfet de la région de ST OMER  Jean Luc BLONDEL :

http://www.nrjnordlittoral.com/wp-content/uploads/2018/02/SS-PREFET-28-02.mp3> Pas de repas non plus distribués comme à Calais . Des propositions d’hébergements sont régulièrement proposées aux migrants , visiblement ceux ci ne souhaitent pas en bénéficier.

Jean Luc BLONDEL – Sous Préfet> Parking fermé

> Depuis 1 semaine on  notera que le parking  du péage de Setques est interdit aux poids lourds comme d’autres aires il y a plusieurs mois de cela .Un objectif : dissuader les migrants de monter à bord des ensembles routiers à destinations de l’Angleterre et peut être ainsi les faire quitter le secteur de ST OMER ….  Le parking restera fermé sur direction préfectorale jusqu’en Juin prochain .

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Tribune d’universitaires spécialistes de l’asile

Tribune d’universitaires spécialistes de l’asile – Non à une procédure d’asile au rabais ! – Administratif | Dalloz Actualité

Par Collectif d’universitairesle 23 Février 2018

Au moment même où le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, présentait ce 21 février son projet de loi « pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile effectif », les personnels de Cour nationale du droit d’asile (CNDA) et de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) manifestaient afin de revendiquer le retrait de cette réforme qui ne vise en réalité pas à rendre le droit d’asile plus effectif mais à en restreindre davantage l’accès.

En notre qualité d’universitaires spécialisés dans les questions de droit d’asile, nous partageons le constat des agents de la juridiction de l’asile en grève depuis le 13 février.

Les agents de l’asile ne défendent en effet pas que leurs intérêts corporatistes, mais l’exercice effectif de ce droit fondamental, durement menacé par la réforme en cours et la logique du chiffre dans le traitement des dossiers – déjà en cours.

Certes la dernière réforme de l’asile de juillet 2015, qui a fait passer les délais d’examen des demandes d’asile de 24 à 9 mois, était nécessaire. Mais l’objectif du gouvernement d’une procédure bouclée en moins de 6 mois, soit en 2 mois pour l’OFPRA et en 4 mois pour la CNDA, n’est pas humainement souhaitable ni administrativement réaliste.

Ce n’est pas humainement souhaitable car cela se fera au détriment des demandeurs d’asile qui n’auront pas le temps, peu après leur arrivée en France, souvent après un périple traumatisant, de se poser et de construire leur récit d’asile dans de bonnes conditions et avec les soutiens nécessaires.

Ce n’est pas réaliste car cela suppose de contracter les délais d’examen des demandes d’asile en augmentant les cadences déjà infernales dans les auditions à l’OFPRA et à la CNDA, au détriment de la qualité de l’examen des dossiers.

Le système français est pourtant déjà l’un des plus « productif » en Europe.

Alors qu’en 2017, l’OFPRA a été saisi de plus de 100 000 demandes d’asile, l’Office a traité plus de 115 000 décisions et accordé une protection internationale à près de 43 000 personnes. En 2017, le taux de protection s’établit à 27 % à l’OFPRA et à 36 % en prenant en compte les décisions de la CNDA. De ce fait, le délai moyen d’attente pour les demandeurs à l’OFPRA est tombé à près de 3 mois (114 jours), deux fois moins qu’en janvier 2015.

Quant à la CNDA, elle a enregistré en 2017 près de 54 000 recours, contre 39 986 en 2016, et elle a traité près de 48 000 décisions, dont plus de 18 000 en juge unique ou par voie d’ordonnances. Le délai moyen de jugement est d’un peu plus de 5 mois et la protection accordée à un peu plus de 8 000 personnes. Les 214 rapporteurs de la CNDA traitent déjà chacun 2 à 3 dossiers par jour.

Pour parvenir à son objectif, le gouvernement envisage, par le projet de loi Collomb, des mesures qui visent en réalité à entraver l’accès au droit d’asile :

  • réduction de 120 à 90 jours du délai pour déposer une demande d’asile une fois arrivé sur le territoire ;
  • réduction du délai de recours devant la CNDA à 15 jours au lieu d’un mois, généralisation des audiences vidéos, comme cela se pratique déjà outre-mer, y compris sans le consentement de l’intéressé ;
  • suppression dans certains cas (pays d’origine sûr, etc.) du recours suspensif devant la CNDA avec en contrepartie une demande de sursis à exécution devant le tribunal administratif dont l’issue serait très aléatoire ;
  • multiplication des cas de retrait des conditions matérielles d’accueil ;
  • etc. etc.

Cette réforme risque de multiplier les cas d’étrangers ni « expulsables », ni éligibles à l’asile en raison de ces entraves procédurales.

Une proposition de loi « Warsmann », que le gouvernement a soutenu et qui vient d’être adoptée, a parallèlement multiplié les cas dans lesquels les « Dublinables » pourront être placés en rétention, et ce dès le début de la procédure.

On sait aussi que cette réduction des délais se fera au prix de la multiplication des cas d’examen des dossiers en procédure accélérée et avec une multiplication des ordonnances dites de « tri » ou du traitement en juge unique. Cela concerne déjà près de 50 % des dossiers, dont l’examen ne bénéficie pas de la garantie apportée par une formation collégiale composée d’un magistrat mais aussi d’un assesseur du HCR et d’un assesseur du Conseil d’État.

Dans son avis du 13 février, le Conseil d’État critique d’ailleurs sévèrement, sur un ton peu habituel pour le Palais-Royal, la méthode utilisée par le gouvernement et la pertinence même d’un tel projet de loi bricolé à la va vite, moins de deux ans après l’adoption de la dernière réforme, sans réelle évaluation de celle-ci. À plusieurs reprises dans cet avis, le gouvernement est mis en garde sur les risques de contrariété avec la Constitution et avec les engagements européens de la France. Il recommande aussi « instamment » de renoncer à certaines restrictions procédurales « contraires aux exigences d’une bonne administration de la justice ».

Pour toutes ces raisons, nous partageons les inquiétudes des agents de l’asile en grève. Nous appelons de nos vœux d’une part à une évolution du statut de l’OFPRA qui pourrait être utilement transformé en autorité administrative indépendante afin de renforcer son efficacité et son indépendance et en donnant davantage de garanties statutaires et de perspectives de carrière aux officiers de protection. D’autre part, il serait souhaitable de faire évoluer le statut des personnels de la CNDA, qui est devenue une vraie juridiction rattachée au Conseil d’État depuis 2007. Ses agents, particulièrement ses rapporteurs, qui sont des contractuels pour 170 d’entre eux, n’ont pas de réelles perspectives de carrière. Les autorités gestionnaires doivent cesser de multiplier les recrutements sous contrats à durée déterminée et doivent tout mettre en œuvre pour ouvrir des perspectives de titularisation.

Enfin à raison de l’attentisme – pour ne pas dire la surdité – du ministère de l’Intérieur et du vice-président du Conseil d’État face à la mobilisation des agents de l’asile, la nomination d’un médiateur s’impose, comme cela avait déjà été le cas avec la nomination de Jean-Marie Delarue, l’ancien contrôleur général des lieux de privation de liberté, lors du dernier conflit à la CNDA.

 

 

Premiers signataires :

Serge Slama, Professeur de droit public, université Grenoble-Alpes
Marie-Laure Basilien-Gainche, Professeure de droit public, université de Lyon 3
Ségolène Barbou des Places, Professeure à l’Ecole de droit de la Sorbonne, université Paris 1 Panthéo -Sorbonne
Myriam Benlolo-Carabot, Professeure de droit public, université Paris Nanterre
Caroline Lantero, Maître de conférences en droit public, université Clermont Auvergne
Guillaume Le Blanc, Professeur de philosophie à l’université Paris Est Créteil
Anne-Laure Chaumette, Maître de conférences HDR en droit public, université Paris Nanterre
Christel Cournil, Maîtresse de conférences HDR en droit public, université Paris 13
Laurence Dubin, Professeure à l’Ecole de droit de la Sorbonne, université Paris 1 Panthéon Sorbonne
Marina Eudes, Maître de conférences HDR en droit public, université Paris Nanterre
François Julien-Laferrière, Professeur émérite de droit public, université de Paris Sud
Marion Tissier-Raffin, Maître de conférences en droit public, université de Bordeaux
Catherine Wihtol de Wenden, directrice de recherche émérite au CNRS