RISQUE DE VIOLATIONS DES DROITS DE L’HOMME POUR LES DEMANDEURS D’ASILE RENVOYES EN HONGRIE

Conseil de l’Europe | Risque de violations des droits de l’homme pour les demandeurs d’asile renvoyés en Hongrie
En ligne depuis le 16 janvier 2016
Communiqué du Conseil de l’Europe, du 13 janvier 2016. Cliquez ici pour lire le communiqué sur le site du Conseil de l’Europe.
«En raison des changements radicaux apportés ces derniers mois en Hongrie à la législation et à la pratique relatives à l’asile, les demandeurs d’asile qui sont renvoyés dans ce pays courent un risque considérable de subir des violations des droits de l’homme», a déclaré aujourd’hui le Commissaire Muižnieks, en rendant publiques les observations écrites qu’il a présentées le 17 décembre 2015 à la Cour européenne des droits de l’homme du conseil de l’Europe dans deux affaires contre l’Autriche qui concernent le transfert des requérants de l’Autriche vers la Hongrie en vertu du règlement « Dublin III».
Sur la base des constats qu’il a faits lors de sa visite en Hongrie, du 24 au 27 novembre 2015, le Commissaire souligne que, ces derniers mois, une proportion considérable des personnes renvoyées en Hongrie en vertu du règlement « Dublin III » ont été placées dans des centres de détention administrative pour demandeurs d’asile – où s’applique un régime de détention restrictif – sans réel accès à des recours effectifs contre cette détention.
ConseilEurope_VisiteHongrie
Le Commissaire note aussi que les demandes d’asile déposées par les personnes renvoyées actuellement en Hongrie en application du règlement «Dublin III» ne sont généralement pas examinées quant au fond. Cela est imputable au fait que la législation hongroise considère la Serbie – pays par lequel ont transité la grande majorité des demandeurs d’asile avant leur première arrivée en Hongrie – comme un pays tiers sûr.

«Cette situation, qui prive les demandeurs d’asile du droit à ce que leur demande soit dûment examinée, les expose aussi à un risque très élevé d’expulsion vers la Serbie et de refoulement vers d’autres pays, et donc au risque de traitement contraire à la Convention européenne des droits de l’homme.»

Les interventions en qualité de tierce partie constituent un outil supplémentaire dans la panoplie dont dispose le Commissaire pour soutenir la promotion et la protection des droits de l’homme. Les interventions du Commissaire, prévues par la Convention européenne des droits de l’homme, sont fondées sur ses activités thématiques et de suivi par pays. Elles ne contiennent aucun commentaire sur les faits ou le bien-fondé de la requête, mais donnent à la Cour des informations objectives et impartiales sur des aspects constituant un motif de préoccupation pour le Commissaire.

Lire les observations écrites présentées à la Cour européenne des droits de l’homme du Conseil de l’Europe dans des affaires contre l’Autriche
En savoir plus sur les activités du Commissaire concernant les droits de l’homme des migrants et des demandeurs d’asile

LA CRISE MIGRATOIRE INVISIBLE DANS LES STATISTIQUES FRANCAISES

LE MONDE | 16.01.2016 à 09h30 | Par Maryline Baumard

Lors du dépôt d’une demande d’asile, à Calais, en août 2015. Lors du dépôt d’une demande d’asile, à Calais, en août 2015. REGIS DUVIGNAU / REUTERS
S’il y a bien une crise que la France ne connaît pas, c’est la « crise migratoire ». Rendues publiques vendredi 15 janvier par la Direction générale des étrangers en France (DGEF), les statistiques de 2015 portent à peine trace du million de réfugiés qui a franchi les portes de l’Europe cette année-là. Preuve que l’importance des migrants dans le débat public est bien inversement proportionnelle à leur présence sur le territoire.
Seul indice d’une année hors du commun, le nombre de demandes d’asile déposées dans l’Hexagone a crû sensiblement. Cette hausse du nombre de dossiers enregistrés s’est faite en septembre et sur le dernier semestre. Au 31 décembre, la France comptabilisait 22 % de demandeurs supplémentaires par rapport à 2014. Mais elle plafonne à 79 100 dossiers quand l’Allemagne en a enregistré plus de 400 000 fin novembre (source Eurostat) et en escompte beaucoup plus, une fois le retard rattrapé. Même si elle est réduite, cette hausse est le seul indicateur concret en France qu’une crise migratoire majeure se déroule à nos portes. Pour le reste, les statistiques sur les étrangers en France restent sur la même ligne que les années précédentes.
Alors que près de 4 000 migrants sont morts sur les routes de l’exil en 2015, la France n’a pas multiplié sa délivrance de visas d’asile. Octroyés dans le but de permettre aux futurs réfugiés de venir déposer une demande d’asile en France, ceux-ci n’ont bénéficié qu’à 1 800 Syriens et 2 286 Irakiens. La DGEF précise qu’« elle a offert d’autres voies d’entrées comme l’octroi d’autres types de visas classiques » aux Syriens. Reste que le ministère de l’intérieur préfère ne pas dire lesquels, comme il tait les nationalités qui ont majoritairement essuyé les 358 771 refus de visas en 2015 (en hausse de 17,6 % par rapport à 2014).
Tapis rouge
A l’inverse, les expulsions d’étrangers en situation irrégulière (hors Union européenne) ont augmenté de 11 % en 2015, avec un peu plus de 6 300 personnes renvoyées vers leur pays. Quelques-uns proviennent de la « jungle » de Calais et certains ont été, en 2015, renvoyés vers le Soudan, alors que la France avait arrêté les expulsions vers ce pays depuis plusieurs années, après une condamnation de cette pratique par l’Europe. Si on ajoute les renvois vers un autre pays de l’Union européenne, 15 485 personnes ont été concernées par un éloignement, soit 2 % de plus qu’en 2014.
2 734 413 personnes vivent en France avec un titre de séjour
Globalement, 2015 n’a pas été non plus une année différente des précédentes pour la délivrance de titres de séjour. Leur nombre s’est élevé à 212 365 (contre 210 940 en 2014). La majorité de ces titres concerne des motifs familiaux (90 000), auxquels s’ajoutent 66 520 étudiants. Le ministère de l’intérieur se félicite des 2,3 % d’augmentation de cette dernière catégorie.
Les étudiants sont en effet un maillon fort au sein du pôle des « immigrés choisis ». Si le gouvernement réfute ce concept trop marqué à droite, certains entrants voient tout de même le tapis rouge se dérouler sous leurs pieds. Même s’ils ne sont pas nombreux, c’est le cas des 230 personnes entrées avec la carte de séjour « compétences et talents », des 3 810 qui ont obtenu un visa « scientifique » et des 185 sous visa « artiste ». Trois catégories que la nouvelle loi sur les titres de séjour, qui sera discutée en commission des lois de l’Assemblée nationale mercredi 20 janvier, veut encore choyer un peu plus.

Aujourd’hui, 2 734 413 personnes vivent en France avec un titre de séjour. Avec les ressortissants de l’Union européenne, qui ne sont pas comptabilisés là, ce sont quelque 4 millions d’étrangers qui évoluent sur le territoire, selon la DGEF. Et la nationalité française, qui était acquise par 90 000 personnes chaque année en 2009 et 2010, n’a été octroyée qu’à 86 608 personnes en 2015.

LE DEMANDEUR D’ASILE EN FRANCE, UN TOIT SOUS CONDITIONS

http://www.housingrightswatch.org/fr/content/le-demandeur-dasile-en-france-un-toit-sous-condition

Par Alain Couderc, Avocat (Lyon)

La récente réforme du droit d’asile en France, entrée en vigueur le 1er novembre 2015, marque une nouvelle étape dans l’assimilation du demandeur d’asile au migrant de droit commun et révèle de façon éclatante le climat de suspicion généralisée à l’encontre de ceux qui sollicitent une protection internationale.

Il n’est qu’à lire l’exposé des motifs du projet de loi selon lequel le dispositif antérieur crée une « incitation au détournement de la procédure d’asile à des fins migratoires ».

Dès lors, la nouvelle procédure d’asile française, bien que comportant certaines avancées, offre à l’Etat de meilleures possibilités de contrôler ceux qui vont, dans leur grande majorité, être prochainement déboutés d’asile, par la création de dispositifs qui permettent « plus facilement d’écarter rapidement la demande d’asile infondée » (exposé des motifs du projet de loi) et bien évidemment d’expulser au plus vite celui qui sera bientôt qualifié de fraudeur[1].

Parmi ces dispositifs il en est un dont l’ambigüité permet tout à la fois de revendiquer officiellement une avancée dans l’accueil des demandeurs d’asile tout en restreignant ses droits.

Partant du constat bien réel de la saturation totale du système d’accueil des demandeurs d’asile (en 2014 la France disposait de 24689 places en centre d’accueil pour demandeur d’asile soit de quoi accueillir seulement 33% des demandeurs) la réforme, se présentant comme une transposition de la directive « accueil » (2013/33/UE du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013) met en place un dispositif d’hébergement directif et contraignant.

La nouvelle loi prévoit un schéma national d’hébergement des demandeurs d’asile fixant la répartition des hébergements sur l’ensemble du territoire national, qui doit être ensuite décliné en schémas régionaux par les préfets.

Concrètement, le demandeur d’asile se présentera auprès de l’OFII (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration) qui lui imposera un hébergement parmi les places disponibles, dans le département et à défaut sur tout le territoire national. Le demandeur d’asile aura cinq jours, pour rejoindre cet hébergement.

Si l’idée, à supposer que le système fonctionne, d’offrir un toit à tout demandeur d’asile est évidemment louable, les moyens juridiques utilisés ne sont pas sans soulever de véritables interrogations quant aux atteintes à certains droits fondamentaux qu’ils impliquent.

Ainsi le caractère contraignant, obligatoire et sans exception du principe de l’hébergement imposé est constitutif d’une atteinte à la liberté d’aller et venir.

La question est de déterminer si cette atteinte pourrait être justifiée eu égard aux motifs pour lesquelles elle est portée à savoir offrir des conditions matérielles d’accueil digne de ce nom.

Or force est de constater que le consentement préalable du demandeur d’asile n’est pas requis.

La loi ne prohibe pas non plus la séparation des familles, se remettant à cela à la bonne appréciation des agents de l’Etat.

Il n’est pas non plus prévu d’exception possible pour les demandeurs d’asile souhaitant être hébergés par des tiers. Or il est de notoriété publique, et le législateur aurait dû en principe en être informé …, que les demandeurs d’asile, nouveaux arrivants, vont, pour d’évidentes raisons matérielles, affectives et phycologiques privilégier l’hébergement par des membres de famille, ou issus de leur communauté.

Cette absence de souplesse dans le dispositif est révélée par la dureté de la sanction en cas de non respect de l’affectation d’hébergement.

D’une part le demandeur d’asile perd le bénéfice des conditions matérielles d’accueil, à savoir aide financière et possibilité de bénéficier d’un autre hébergement, et d’autre part risque de voir sa demande d’asile clôturée par l’OFPRA s’il n’a pas fourni d’adresse « dans un délai raisonnable » (SIC) que l’OFPRA appréciera vraisemblablement souverainement.

Ce dispositif d’hébergement directif est également porteur d’un risque de rupture d’égalité des demandeurs d’asile dans le traitement de leur demande.

D’une part, compte tenu de la totale saturation du dispositif d’hébergement existant et nonobstant l’engagement de l’Etat de créer 11000 places d’hébergement pour le mois de janvier 2016, en l’impossibilité d’offrir une place en centre d’accueil pour demandeur d’asile à chaque demandeur, l’Etat va multiplier la création d’HUDA (hébergement d’urgence pour les demandeurs d’asile). Ces hébergements vont être débloqués par l’agrément donné à des associations offrant déjà des places d’hébergements d’urgence et vont entrainer une disparité dans le suivi des demandeurs d’asile.

Les HUDA comme les CADA ont certes pour mission d’assurer l’accompagnement social des personnes hébergées ainsi que l’accompagnement juridique par la constitution et le suivi du dossier d’asile, il n’en demeure pas moins que d’une part les personnels ne sont pas formés à cette matière particulière et qu’en tout état de cause le taux d’encadrement est plus faible en HUDA qu’en CADA.

Il pourrait être opposé le fait que l’accompagnement offert en HUDA est meilleur que le néant prévalant jusqu’à lors pour les demandeurs d’asile non hébergés.

La différence est que ce qui résultait jusqu’alors d’un disfonctionnement du système (non prise en charge d’un demandeur d’asile en violation d’ailleurs de la directive « accueil » précédemment citée) est désormais officialisé par les textes.

Se pose en outre la question du délaissement territorial par les associations spécialisées en droit des étrangers et en droit d’asile au profit des grandes métropoles.

Or l’aide de ces associations dans la constitution des dossiers, que ce soit par une expertise juridique, une connaissance des situations géopolitiques ou une spécialisation médicale auprès des demandeurs d’asile est essentielle quant au taux d’octroi de la protection.

Or un dispositif législatif touchant de près ou de loin à des droits fondamentaux et qui, dans sa philosophie globale comme dans ses modalités de mises en œuvre, permet une interprétation liberticide ne peut, par essence, être approuvé.

Ce n’est pas faire preuve de machiavélisme que d’imaginer que tel ou tel demandeur d’asile, ès qualité, ou provenant de tel ou tel pays pourrait se voir contraint à l’isolement dans une région peu propice à l’élaboration d’un suivi efficace de son dossier.

Car, et il s’agit là d’une dernière objection majeure, le système mis en place permet une surveillance généralisée de chaque demandeur d’asile sur le territoire français, s’apparentant à une assignation administrative à résidence, dont l’état d’urgence actuel prononcé suite aux attentats de Paris démontre d’ores et déjà le dévoiement possible par un Etat en recherche de la mise en œuvre d’une politique exclusivement sécuritaire.

Il a déjà été exposé que le demandeur d’asile n’aurait que cinq jours pour rejoindre le lieu d’hébergement qui lui a été affecté, faute de quoi il sera considéré comme ayant refusé l’offre d’hébergement et perdra le bénéfice des conditions matérielles d’accueil, avec l’accompagnement corolaire.

Mais encore, il sera considéré comme ayant abandonné son lieu d’hébergement s’il s’en absente plus d’une semaine sans justification valable, ce qui évidemment dans la pratique correspond à une obligation de pointage au moins une fois par semaine. S’il ne respect pas cette obligation il perdra là encore le bénéfice des conditions matérielles d’accueil et pourra vraisemblablement se voir opposer une clôture par l’OFPRA faute d’avoir produit une adresse.

Afin de rendre le système plus efficace le gestionnaire du lieu d’hébergement aura même l’obligation d’informer l’OFII.

C’est ainsi que les structures dédiées à l’aide aux demandeurs d’asile se retrouvent en première ligne de la lutte contre ce quasi présumé fraudeur que constitue l’étranger en demande de protection.

Sachant par ailleurs que les associations bénéficiaires d’un agrément pour accueillir les demandeurs d’asile seront partiellement financées sur le budget de l’OFII, qui est également l’organisme qu’elles devront obligatoirement prévenir si le demandeur d’asile manque à l’appel, on comprendra que tout a été pensé.

Qu’il soit donc rappelé qu’au terme des dispositions de l’article 2 du protocole additionnel n°4 à la Convention Européenne des Droits de l’Homme, la liberté d’aller et venir et de circulation ne peut faire l’objet de restriction que si elle « constitue une mesure nécessaire, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sureté publique, au maintien de l’ordre public, à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et liberté d’autrui. »

Il appartiendra aux juridictions nationales puis internationales de déterminer si les obligations imposées au demandeur d’asile rentrent dans ce cadre.

Il est communément admis que le droit des étrangers constitue souvent le laboratoire de dispositions visant à être généralisées à l’ensemble de la population. Reste à espérer que cette idée qui pourrait conduire un Etat à imposer un lieu d’hébergement au prétexte de la nécessaire protection d’une personne vulnérable dépendante pour partie et au moins temporairement de la solidarité de la Nation, soit cette fois ci-erronée.

______
[1] Extrait des statistiques EUROSTAT sur le pourcentage des demandes d’asiles acceptées en première instance, en Europe en fonction des pays : Suède 76,80%, Pays-Bas 70,45%, Suisse 70,68%, Danemark 68,03%, Norvège 64,20%, Italie 58,49%, Allemagne 46,83%, Belgique 39,56%, Royaume-Unis 38,84%, France 21,74%, pour une moyenne globale de 45,24%.

Entrée en vigueur de la nouvelle loi asile au 1er novembre 2015

Article de la Cimade du 16 juillet 2015

Publiée au Journal officiel,  la loi relative à la réforme du droit d’asile va considérablement modifier les procédures et le dispositif d’accueil. Petit inventaire. 

 

CE QUE LA RÉFORME VA CHANGER DANS LE PARCOURS DU DEMANDEUR D’ASILE

 

1. Asile à la frontière

 

Ce qui change : en plus de la demande manifestement infondée qui est pour la première fois définie par la loi (obligation qui existe pourtant depuis 2005), le ministre de l’intérieur, peut rejeter la demande si elle relève de la responsabilité d’un autre État-membre selon le règlement Dublin  ou si elle est irrecevable (voir plus loin).

L’avis de l’OFPRA après une audition où un avocat ou un membre d’une association peut être présent, lie le ministre, sauf en cas de trouble grave à l’ordre public.
Le maintien en zone d’attente peut être interrompu si l’OFPRA le demande en raison de la vulnérabilité de la personne ou s’il s’agit d’un mineur (sauf s’il est d’un pays sûr, a menti sur son identité et constitue une menace grave à l’ordre public).

Ce qui ne change pas : le recours contre le refus d’entrée au titre de l’asile (RATATA) doit toujours être formulé dans le délai très bref et non prorogeable de 48 heures et le juge unique du TA statue dans un délai de soixante douze heures.

Ce qui doit être fixé par voie réglementaire: les modalités d’audition par l’OFPRA avec la présence d’un tiers et les modalités d’évaluation et de signalement des personnes vulnérables.

 

2. L’accès à la procédure et l’enregistrement des demandes d’asile et au dispositif d’accueil

Ce qui change :Les plateformes d’accueil des demandeurs d’asile (PRADA) sont chargées de saisir un formulaire simplifié qui est transmis à la préfecture qui donne un rendez vous dans le délai obligatoire de trois jours ouvrés (au maximum 5 jours).

Le préfet se borne à identifier le demandeur qui n’a pas besoin d’une domiciliation , à enregistrer sa demande et de lui délivrer une attestation de demande d’asile , sauf si le règlement Dublin permet d’écarter la responsabilité de la France. L’ attestation de demande d’asile est valable jusqu’à la décision CNDA (sauf pour  les Dublinés, les demandes en rétention, les demandes irrecevables en particulier les réexamens et les personnes faisant l’objet d’un mandat définitif d’extradition).
L’OFII, qui est présent dans les mêmes locaux que la préfecture dans un guichet unique des demandeurs d’asile (GUDA) , fait une proposition à tous les demandeurs consistant en un hébergement et une allocation. L’OFII oriente directement le demandeur d’asile vers un CADA ou un lieu d’hébergement adapté si une vulnérabilité est détectée par lui ou par l’OFPRA. Pour tous ceux qui ne sont pas directement hébergés, ils sont orientés vers la PRADA qui assurent 7 missions (domiciliation,  complément du forumulaire OFPRA, orientation vers un hébergemenent d’urgence, aide matérielle d’urgence, accompagnement pour accès à la scolarisation, aux soins et à l’assurance maladie, sortie)

Ce qui ne change pas : le préfet de région est toujours compétent pour enregistrer les demandes et procède au relevé EURODAC.
Ce qui doit être fixé par voie réglementaire: le délai pour déposer sa demande d’asile à lOFPRA en procédure normale et accélérée; les modalités de domiciliation après le premier passage au GUDA..

 

3. Procédure Dublin : un recours suspensif

 

Ce qui change : le demandeur  Dubliné bénéficie d’un droit au maintien jusqu’à son transfert effectif vers l’autre Etat membre. Il peut cependant être assigné à résidence pendant la détermination de l’État membre responsable de l’examen de sa demande d’asile (pendant six mois)  et après la notification de la décision de transfert.
Un recours suspensif peut être exercé contre la décision de transfert dans un délai de quinze jours. Le juge statue dans un délai de quinze jours. Si la personne est assignée à résidence ou retenue dans un centre de rétention, les délais sont de quarante huit heures et de soixante-douze heures.
Il bénéficie des conditions d’accueil pendant la procédure mais n’a pas accès au CADA.
Ce qui ne change pas : le préfet reste compétent pour déterminer l’Etat responsable de l’examen de la demande d’asile, l’OFPRA n’est pas saisi de la demande d’asile et n’est pas compétent pour examiner la demande.

ce qui doit être fixé par voie réglementaire : les modalités de délivrance de l’attestation, des assignations à résidence et du recours contre la décision de tranfert.

 

4. Condition d’examen des demandes d’asile à l’OFPRA

 

Ce qui change : la procédure prioritaire est remplacée par les procédures accélérées et les procédures d’irrecevabilité.
L’OFPRA les met en œuvre quand il y est obligé par la loi (pays d’origine sûrs, réexamens présentant un fait nouveau) par le constat du préfet (refus de relevé EURODAC, dissimulation d’identité, dépôt d’une demande après 120 jours de séjour en France si entrée irrégulière, demande déposée pour faire obstacle à une mesure d’éloignement, menace grave à l’ordre public) mais aussi de sa propre initiative (dissimulation d’identité de nationalité ou d’itinéraire, demande sans pertinence ou manifestement infondée).
Il peut néanmoins revenir sur cette accélération si la personne est vulnérable (notamment les mineurs isolés) ou si l’instruction de la demande ne peut pas se faire dans le délai de quinze jours.
L’OFPRA peut déclarer irrecevables les demandes relevant de Dublin, celles d’un bénéficiaire de la protection internationale effective  dans un pays de l’UE ou d’un réfugié dans un pays tiers qui lui assure une protection effective et surtout les réexamens sans faits nouveaux. Il peut clore l’instruction d’une demande si la personne n’adresse pas les éléments de sa demande ou ne se rend pas à l’entretien personnel ou ne dispose pas d’une adresse.
Il peut mettre en œuvre une procédure par priorité si la demande est  manifestement fondée ou la personne est vulnérable.

Ce qui ne change pas : le préfet joue un rôle important dans le déclenchement de la procédure accélérée dans 5 cas. Les délais d’examen seront sensiblement les mêmes qu’aujourd’hui (15 jours trois semaines).
Ce qui doit être fixé par voie réglementaire: les délais d’instruction des demandes et modalités d’information de la procédure;

5. Conditions d’entretien

Ce qui change : le demandeur est entendu (sauf s’il est malade ; a un très bon dossier ou si sa demande de réexamen est considérée comme irrecevable) en présence d’un interprète et s’il le souhaite, un avocat ou une association habilitée. Le demandeur doit coopérer et répondre aux questions de l’officier de protection. L’entretien fait l’objet d’une transcription qui peut être fournie avant la décision (sauf pour les procédures accélérées) et d’un enregistrement sonore (qui n’est consultable qu’après la décision). L’OFPRA peut faire procéder à un examen médical.

Ce qui ne change pas : l’officier de protection reste anonyme et assure seul l’entretien.
Ce qui doit être fixé par voie réglementaire: les modalités de la présence d’un tiers (avocat et associations),  de la transcription (enregistrement ou compte-rendu), de la notification des décisions

 

6. Critères de protection

 

Ce qui change : les actes et les motifs de persécution selon la convention de Genève sont ceux de la directive européenne dite « directive qualification »en particulier les demandes d’asile liées au genre ou l’orientation sexuelle. L’OFPRA est tenu de retirer la protection si une clause de cessation ou d’exclusion peut être mise en œuvre. Le statut peut être refusé ou retiré si la personne a porté une atteinte à la surêté de l’Etat, a été condamnée pour terrorisme ou constitue une menace pour la société.

Ce qui ne change pas : Il y a toujours deux statuts (réfugié et protection subsidiaire).  la demande peut être rejetée s’il existe une protection d’une organisation internationale ou d’un parti ou la possibilité d’un asile interne.

 

7. Recours CNDA

 

Ce qui change : les recours devant la CNDA sont suspensifs sauf s’il s’agit d’une décision d’irrecevabilité, de clôture ou en rétention. La CNDA statue dans un délai de cinq mois s’il s’agit d’une procédure normale. S’il s’agit d’une procédure « accélérée », un juge unique statue sur le recours en cinq semaines mais il peut à tout moment considérer que la procédure accélérée a été mal appliquée ou qu’il existe une difficulté sérieuse et replacer le recours en procédure normale.
Il y a davantage de présidents permanents et le mode de désignation des assesseurs est modifié.
Ce qui ne change pas : le délai de recours reste d’un mois pour toutes les procédures. Cependant le délai pour déposer une demande d’aide juridictionnelle  isolée afin qu’un avocat le rédige est réduit à quinze jours.

La CNDA statue en plein contentieux et ne peut annuler et renvoyer la demande à l’OFPRA que s’il n’y a pas eu d’examen particulier ou d’entretien (hors des exceptions prévues). Le juge unique peut toujours rejeter par une ordonnance après étude par le rapporteur.

Ce qui doit être fixé par voie réglementaire : les modalités de dépôt des recours et le fonctionnement des audiences à juge unique.

 

8. Asile en rétention

 

Ce qui change : le préfet peut par une décision écrite et motivée, maintenir le demandeur en rétention si, en se fondant sur des critères objectifs, il estime que la demande n’a pas pour seul but de faire échec à l’exécution de la mesure d’éloignement.  La demande d’asile est alors examinée en procédure accélérée (96 heures). Si l’OFPRA reconnaît une protection ou s’il considère qu’il ne peut statuer dans le délai , la personne est libérée.

Il est créé un recours de plein droit suspensif (sauf s’il s’agit d’une demande de réexamen après OQTF ou d’un deuxième réexamen)  qui doit être exercé dans un délai de quarante huit heures après la notification de la décision de maintien et un juge unique statue dans un délai de 72 heures après la notification de la décision OFPRA. Si le juge annule la décision du préfet, le demandeur est admis à se maintenir en France avec l’attestation délivrée aux demandeurs d’asile.

Ce qui ne change pas : les délais (96 heures) et l’absence de recours suspensif contre la décision OFPRA. Le recours suspensif n’est pas applicable dans les départements d’outre-mer où le recours contre l’OQTF n’est pas de plein droit suspensif.

Ce qui doit être fixé par voie réglementaire : les modalités de dépot et de transmission des demandes d’asile ainsi que les délais pour statuer

 

9. Dispositif d’accueil

 

Ce qui change : tous les demandeurs d’asile ont accès aux CADA (sauf les Dublinés) ou à un lieu d’hébergement et c’est l’OFII qui décide de leur entrée, d’un changement de lieu ou d’une sortie au niveau national ou régional.
Les demandeurs d’asile se voient verser par l’OFII une allocation de demandeur d’asile qui est calculée en fonction de leur mode d’hébergement et de leur composition familiale. Ils ont tous accès à une assurance maladie. Le demandeur doit rester dans le centre jusqu’à la décision définitive. Le préfet peut l’en faire sortir avec un référé mesure-utile.
Cependant, si le demandeur refuse l’offre d’hébergement ou le quitte de façon prolongée et sans justification, il peut se voir limiter le bénéfice des conditions d’accueil. C’est également le cas s’il a menti sur ses ressources, s’il s’agit d’une demande de réexamen de son dossier ou s’il a déposé sa demande tardivement.

Ce qui ne change pas : Les CADA sont toujours inscrits dans le code de l’action sociale et des familles mais ne relèvent plus de l’aide sociale d’Etat.

Ce qui doit être fixé par voie réglementaire : le schéma national et régional d’hébergement (et le nombre de places à créer), les modalités d’évaluation de la vulnérabilité, de suspension ou de limitation des condiitions d’accueil et  le montant et le barème de l’allocation.

 

10. Droits des bénéficiaires de la protection

 

Ce qui change : le droit à un titre de voyage et à la réunification familiale est affirmé. La procédure de vérification de l’état civil des familles rejoignantes est simplifiée.
Le titre de séjour des personnes bénéficiant d’une protection subsidiaire est renouvelé pour deux ans. S’il y a un retrait ou une renonciation de la protection au cours des cinq premières années, possibilité de retirer la carte de résident ou de séjour.

Ce qui ne change pas : les mesures d’intégration (qui sont seulement déplacées dans le CESEDA).

Ce qui doit être fixé par voie réglementaire : le délai de délivrance des titres.

Pour aller plus loin

Analyse de la loi adoptée par l’Assemblée nationale

CALAIS – Démarches juridiques avant et après l’expulsion du lieu de distribution « Salam » le 02 juillet 2014

Le 28 mai 2014, à Calais, a lieu l’expulsion de deux camps de migrants installés dans le centre ville. En réaction à cette expulsion, la plupart des migrants se réfugie dans le lieu de distribution des repas, rue de Moscou, lieu appelé Salam en référence à une des associations qui y sert des repas aux exilés.

Ce lieu de distribution est géré par la mairie, sur délégation du conseil régional, propriétaire du terrain. Les autorités, préfecture et mairie, accordent aux migrants présents sur les lieux le droit d’y rester pendant une ou deux nuits mais après ce délai, ils devront aller s’installer ailleurs. Une négociation s’ouvre entre les migrants et les représentants de l’État, mais celle-ci est stoppée net par l’État qui déclare ne rien avoir de plus à proposer aux exilés. Les migrants qui cherchent à aller s’installer ailleurs (terrains vagues, camping municipal inoccupé) sont délogés par les forces de l’ordre. Ils reviennent donc s’installer sur le lieu de distribution.

Le 26 juin 2014, à 16h30, la mairie affiche sur le lieu de distribution un dossier de plus de 70 pages (photo ci-dessus). Il s’agit d’un référé « toute mesure utile » dans lequel la mairie demande au tribunal administratif de constater l’insalubrité du camp sur le lieu de distribution des repas ainsi que la gêne occasionnée pour les riverains en termes de bruits et de violence. Elle demande au tribunal de décider de l’expulsion du campement et de la destruction des tentes et couvertures qui servent d’abris aux exilés. L’audience au tribunal est prévue pour le lendemain, à 9h.

A 17h30, la PSM contacte plusieurs avocats spécialisés en droit des étrangers afin d’en trouver un disponible pour l’audience de demain. Maître Norbert Clément et Maître Ludivine Herdewyn, son associée, du cabinet d’avocats Pôle juridique acceptent de se charger du dossier. S’ensuit une course contre la montre :

  • Convaincre les habitants du lieu de distribution de se lancer dans une procédure juridique pour essayer d’éviter l’expulsion et donc les convaincre de remplir des documents permettant à Me Clément de s’occuper de cette affaire
  • Demander aux responsables d’associations d’expliquer la situation sur le camp : ce qui importe le plus est que les autorités ont elles-mêmes accepté que les exilés s’installent sur le camp mais aussi que l’insalubrité du lieu est pour grande partie due à la mairie qui ne ramasse pas les poubelles du lieu, ne nettoie pas les toilettes qu’elle a mises à disposition, etc.
  • Constituer un dossier sur la situation des exilés qui vivent dans le campement (demandeurs d’asile, femmes, enfants).

Les avocats et les associations travailleront jusque minuit pour que tout cela soit prêt pour l’audience du lendemain matin. Toutefois, le lendemain après-midi (l’audience avait été mise en délibéré), le tribunal administratif ordonne l’expulsion du lieu mais n’autorise pas la mairie à détruire les biens des exilés (tentes, couvertures, vêtements).

Deux suites juridiques sont alors envisagées par les avocats : saisir le Conseil d’État mais cela ne pourra pas arrêter ou retarder l’expulsion et pourra juste servir dans le futur, dans le cas où d’autres expulsions similaires seraient demandées ; et puis saisir la Cour européenne des droits de l’Homme en demande de mesures provisoires : on demande à la Cour de faire retarder l’expulsion tant que des solutions appropriées, en matière de relogement, ne sont pas prévues pour les exilés présents sur le camp.

Me Clément se chargera de la saisine de la Cour européenne des droits de l’Homme. Celle-ci demandera à la France de justifier des mesures prises pour reloger les 600 migrants, femmes, enfants et demandeurs d’asile, présents sur le camp. Le mardi soir, la Cour annonce dans un communiqué que la réponse de la France est suffisante et qu’elle ne prendra pas de mesures provisoires. L’expulsion peut avoir lieu.

Le 2 juillet 2014, militants, bénévoles, journalistes et migrants, se trouvent ensemble sur le lieu de distribution des repas. Les forces de police arrivent vers 6h du matin et entrent dans le lieu de distribution en usant de gaz lacrymogène. Les militants, les bénévoles et les journalistes, toutes les personnes de couleur de peau blanche, sont emmenés en dehors du lieu. Les migrants qui s’enfuient sont ramenés à l’intérieur. Les migrants sont ensuite classés par nationalités. Des bus scolaires arrivent et les emmènent. Les derniers d’entre eux partiront du lieu de distribution aux alentours de 18h. Les mineurs seront envoyés en-dessous de Boulogne-sur-Mer. Certains seront emmenés au poste de police de Coquelles, d’autres à Saint Omer, d’autres à Lille, pour bientôt se retrouver en centre de rétention aux quatre coins de la France (Lille, Metz, Paris, Rennes, Rouen) avec l’obligation de quitter la France. Certains seront renvoyés en Italie car ayant des titres de séjour italiens, tous les autres seront relâchés au bout de quelques jours et de retour à Calais aussitôt.

Grâce aux vidéos, photos et témoignages des bénévoles, des militants, des migrants, qui se trouvaient là le jour de l’expulsion, Me Clément et Me Herdewyn vont constituer un dossier à destination de la Cour européenne des droits de l’Homme. Car les conditions dans lesquelles cette expulsion a eu lieu sont bien loin de répondre aux exigences de la convention européenne des droits de l’Homme. Si vous avez assisté à l’expulsion et que vous souhaitez témoigner de ce que vous avez vu, contactez-nous.

Pour aller plus loin…

ASILE – La France mise en demeure de respecter la directive sur les conditions d’accueil des demandeurs d’asile

En juin 2011, Maître Calonne, avocate au barreau de Boulogne-sur-Mer a introduit une plainte auprès de la Commission européenne au nom de trois demandeurs d’asile vivant dans un squat à Calais. Elle y soulignait l’impossibilité pour les demandeurs d’asile d’obtenir un hébergement ainsi que des conditions matérielles d’accueil couvrant leurs besoins fondamentaux. Le système d’accueil des demandeurs d’asile français est saturé, obligeant les demandeurs d’asile à s’installer dans des locaux qui ne leur appartiennent pas.

Sur la base des observations de Me Calonne, et d’autres rapports allant dans le même sens, la Commission européenne a demandé à la France ce qu’elle compte faire afin de résoudre le problème du manque d’hébergement pour les demandeurs d’asile. Les autorités françaises ont promis la création de 4000 nouvelles places d’hébergement avant la fin de l’année 2014.

Pour autant, la Commission européenne a trouvé cette mesure insuffisante et a donc envoyé une lettre de demeure à la France le 20 novembre 2013. C’est ce qu’elle explique ici.

Quelles pourraient être les conséquences d’une telle mise en demeure ?

Le système d’hébergement des demandeurs d’asile en France compte un peu plus de 20 000 places. Or, plus de 60 000 personnes ont demandé l’asile rien qu’en 2013. Sachant qu’une demande d’asile prend en moyenne 18 mois, les hébergements des demandeurs d’asile sont en permanence saturés. Il est peu probable que la France arrive rapidement à héberger tous les demandeurs d’asile de son territoire. La mise en demeure de la France est une première étape. Si la Commission européenne constate que rien n’est fait pour améliorer les conditions de vie des demandeurs d’asile, elle pourrait saisir la Cour de justice de l’Union européenne qui elle pourrait condamner la France pour non-respect de la directive européenne fixant les règles de l’accueil des demandeurs d’asile. Cette condamnation, qui peut être pécuniaire, obligerait la France à respecter ces règles avec, potentiellement, si elle ne les respecte pas, des astreintes à payer.

ASILE – La Cour de justice de l’Union européenne donne des précisions sur les conditions matérielles d’accueil des demandeurs d’asile

La Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) est venue préciser, dans un arrêt du 27 février 2014, ce que doivent être les conditions matérielles d’accueil* des demandeurs d’asile.

Dans cette affaire, la famille Saciri avait demandé l’asile en Belgique. Les centres d’hébergement belges étant saturés, elle avait été renvoyée vers le centre public d’action sociale, qui lui-même ne leur avait pas trouvé de solution d’hébergement. Les membres de cette famille avaient donc trouvé un logement loué par un propriétaire privé. Les demandeurs d’asile n’étant pas autorisés à travailler en Belgique (comme en France d’ailleurs), la famille a sollicité une aide financière pour le paiement de son loyer au centre public d’action sociale. Mais cette aide leur a été refusée en raison de leur qualité de demandeurs d’asile.

La question posée à la Cour dans cette affaire est de savoir si l’Etat belge devait rembourser le montant des loyers de la famille Saciri. La Cour condamne l’Etat belge à ce remboursement et en profite pour poser une règle de droit, qui s’applique partout en Europe : le montant de l’allocation financière donnée aux demandeurs d’asile doit être « suffisant pour garantir un niveau de vie digne et adéquat pour la santé ainsi que pour assurer la subsistance des demandeurs d’asile, en leur permettant notamment de disposer d’un hébergement ». Cela signifie qu’en cas de saturation des dispositifs publics d’hébergement, l’allocation doit permettre aux demandeurs d’asile de trouver un logement dans le parc locatif privé. Reste à voir désormais si le montant de l’allocation temporaire d’attente*, donnée aux demandeurs d’asile en France, répond à ces critères…

* Conditions matérielles d’accueil : lorsqu’une personne arrive dans un pays européen et qu’elle souhaite y déposer une demande d’asile, le pays dans lequel elle se trouve doit lui fournir des « conditions matérielles d’accueil », qui permettent de garantir un niveau de vie adéquat pour la santé et d’assurer la subsistance du demandeur d’asile. En pratique, elles correspondent à un hébergement et une allocation financière (pour couvrir les frais de restauration, vestimentaire, etc.).

* L’allocation temporaire d’attente est la somme versée aux demandeurs d’asile qui ne sont pas hébergés dans des centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA). Elle est censée leur permettre de subvenir à leurs besoins en matière de logement et de nourriture par exemple. Son montant est de 11,35€/jour, soit entre 340 et 350€ par mois.