La police des migrants

La Police des Migrants sous la direction de Michel Agier

collection Babels editions le passager clandestin

Pour qui s’intéresse, fréquente, soutient les migrants ici en France, la police, l’intervention de la police d’Etat est un motif de colère, de dégoût, d’incompréhension la plupart du temps. Il est facile de comprendre, sur le terrain, que ce n’est pas le fait de telle ou tel policier. Il était temps de réfléchir à ce qu’est la police dans un état européen comme le nôtre, quels rôles elle tient en réalité. Ce petit livre y contribue de manière assez heureuse. Comme les autres opus de la collection Babels il est le fruit du travail de chercheurs de terrain1, de leur réflexion et de leurs confrontations, sous la direction et l’orientation de Michel Agier. A quoi s’ajoutent des références bienvenues à des travaux sociologiques dans des domaines voisins2, qui permettent d’élargir encore le point de vue. Cela donne un livre court, ramassé, agréable à lire et qui ouvre la réflexion.

Que les personnes migrantes franchissent les frontières de manière régulière ou non, les forces de police sont les 1ères représentantes de l’Etat qu’elles rencontrent. Violences, contrôles répétés, destruction des campements ce sont les réalités des frontières de l’Europe.

La recherche historique permet de pointer que la gestion policière des migrations est précédée au XIX ème siècle par la gestion des mobilités des « indigents, des criminels, et des vagabonds » d’abord autochtones. La création de fichage permet de surveiller les exclus de la citoyenneté en même temps que la distinction entre nationaux et étrangers. Au XXeme siècle , à la suite de la décolonisation, la régulation des migrations se fait à travers les régularisations jusque dans les années 70. La PAF devient chargée de lutter contre l’immigration irrégulière à cette période. L’accord (1985)puis la convention(1990) de Schengen, en renforçant le contrôle aux frontières de l’Europe entraîne un épaississement de la frontière : moyens de contrôle renforcés, visas obligatoires, technologies biométriques pour les documents, d’où l’apparition de voies d’entrée différentes et dangereuses. Dans le vocabulaire, l’étranger devient le travailleur immigré, puis le sans papier, le réfugié et maintenant le migrant, le mot révélant le caractère transitoire de sa présence et la menace que constitue « le potentiel migratoire » de l’Afrique en particulier. Les pratiques policières changent d’échelle, le contrôle de l’immigration commence dans le pays d’origine, ou dans les pays limitrophes de l’Europe.

Le répertoire d’action de la police et les expériences des personnes migrantes s’organise autour du tryptique «  Filtrer, disperser, harceler », c’est ce qu’on retrouve sur les différents lieux d’enquête.

Pour filtrer à la frontière en un temps qui n’entrave pas le flux des voyageurs, les forces de l’ordre doivent déterminer le plus efficacement possible les personnes à contrôler. Cela est laissé à leur propre appréciation, leur « flair », et aboutit à ce qu’on observe : une différenciation selon l’apparence, l’âge, le genre, la couleur de peau des voyageurs et voyageuses, une logique de racialisation. Les pratiques de filtration relèvent aussi du contexte politique frontalier : ainsi, à la frontière entre la république tchèque et l’Autriche, lutter contre l’immigration irrégulière et contre les formes de criminalité engendrées par elle est une façon de s’européaniser, et d’effacer son passé communiste.Ailleurs, la mise en scène du refoulement des étrangers ou de leur expulsion sert également des objectifs de politique intérieure. Les pratiques de filtration sont aussi sous la pression des nécessités économiques : laisser passer les touristes,les travailleurs transfrontaliers, et les personnes ukrainiennes, bulgares et roumaines recrutées par le ministère des affaires sociales. Contrôler les autres et les refouler.

A la frontière maroco-espagnole, c’est le tri selon un système carrément raciste et genré. Les personnes sub-sahariennes , noires, n’ont absolument pas accès aux bureau de demande d’asile. Si elles arrivent à franchir l’entrée dans les territoires espagnols, elles sont encore discriminées ensuite pour accéder à l’Espagne.

Une fois la frontière franchie, à l’intérieur du territoire, les contrôles sont les outils du quotidien notamment dans les grandes villes. Associés à la menace d’expulsion, ils amènent les personnes migrantes à des pratiques d’évitement, de dissimilation, voire de réclusion. Il ne s’agit pas seulement de mener à une expulsion, mais aussi d’imposer un ordre social, pas seulement de délimiter des territoires, mais séparer des populations.

Les expulsions, qu’elles soient vers le pays d’origine, ou vers le pays de « première frontière », ou même de dispersion à travers le territoire sous couvert de protection et de mise à l’abri, contribuent ainsi à balloter les personnes, les insécuriser, les humilier, et parfois les mettent en danger vital , tant la notion de « pays sûr » est discutable.

Aux côtés des agents des forces de l’ordre, un nombre croissant d’acteurs est impliqué dans le contrôle des migrant.e.s : agents de la CPAM, contrôleurs SNCF, sociétés de transport ( ferries, bus,) employeurs, écoles et collèges, agents de sécurité en tous genres. Sans compter les milices ou comités de quartier parfois. Dans ce contexte, les migrants intériorisent l’idée que certains lieux leur sont interdits, et alors, jusqu’où les logiques du contrôle policier vont-elles ? Et alors, comment faire confiance ? Ce qui entrave la vie relationnelle, mais aussi l’accès aux soins, à la justice …

Expulser ou au moins disperser les migrant.e.s, les invisibiliser, faire du chiffre, c’est aussi une arme électorale. Refouler « à chaud » sur certaines frontières est parfaitement admis, c’est une violence terrible en même temps qu’un déni du droit d’asile. En mer la surveillance frontalière comporte une injonction contradictoire de sauvetage en mer et de limitation d’arrivée, donc de refoulement. Et de mise en danger.

Les interventions répétées sur les lieux de vie, la destruction d’effets personnels, les contrôles répétés permettent aux forces de l’ordre d’exercer une emprise, de contribuer à invisibiliser, à empêcher tout lien social et ainsi à marginaliser les personnes migrantes.

La violence réduit ceux et celles qui la subissent au statut de migrant, escamotant les singularités . Il est rare qu’elle détourne les personnes de leur projet migratoire, mais il est habituel que cela leur rende la vie impossible et insupportable. Parfois elle décourage, parfois aussi elle précipite l’engagement de migrant.e.s et de leurs soutiens. Il y a donc un répertoire des actions de soutien et de résistance des divers lieux.

Confier à la police le traitement de questions sociales amène inévitablement à la violence, telle est la conclusion. Parler de police des migrants, c’est cerner une nouvelle figure de l’étranger : le migrant, mobile, précarisé, errant. Il ne faut pas oublier la place qu’il prend dans l’économie, du fait même de sa précarité et de sa mobilité. Mais le régime policier de contrôle s’accompagne aussi d’un gouvernement humanitaire des populations migrantes. Ce qui signifie que les mesures sécuritaires sont recouvertes d’un vernis humanitaire : ainsi les expulsions se font souvent sous prétexte de mesures d’hygiène, et sont nommées « mises à l’abri ». La surveillance des eaux territoriales passe pour du secours en mer. Les autorité européennes développent des programmes visant à protéger les candidats à la migration contre leur propre volonté de tenter une traversée périlleuse alors que ce sont les règlements européens qui créent le danger. Présenter les migrant.e.s comme inconsicents et irresponsables, au mieux victimes, et les empêcher de se constituer comme sujets politiques, voilà l’enjeu.

1Les terrains sont les frontières : franco-anglaise dans le Nord de la France, maroco-espagnole à Ceuta et Melilla, austro-tchèque, et les îles grecques.

2Pratiques de contrôles au facies ailleurs qu’à la frontière, Expulsions des personnes roms depuis 2014, souffrances à la frontière et santé mentale.

Itinérance Cherbourg dénonce

Le 13 mars Itinérance Cherbourg convoquait une conférence de presse.

Devant la presse régionale et une cinquantaine de personnes, nous avons dénoncé :

Les dérives de la loi asile publiée au JO le 11 septembre 2018 et sa mise en application,

Le durcissement constaté des conditions d’accueil et de la situation des exilés.

A partir de ce qui se vit à Cherbourg.

Le non hébergement des demandeurs d’asile : Des personnes arrivées seules en France 40, mais aussi des familles 5 soit 20 personnes

Des hébergements précaires qui coûtent très chers (nuitées d’hôtel en moyenne 40 euros par nuit !

Des hébergements indignes

Les obstacles administratifs

L’allongement des délais entre la PADA et le GUDA.

Actuellement 2 mois. C’est-à-dire deux mois de non droit, sans CMU, sans Hébergement, sans aide financière

Avec des démarches centralisées à Rouen à 250km de Cherbourg (train 3H)

Parcours d’un migrant résidant à Cherbourg placé sous convocation Dublin.

 ROUEN FTDA convocation pour la domiciliation tous les jours à partir de 14H

ROUEN FTDA convocation pour ouverture des droits CMU un autre jour (mardi ou jeudi entre 9H et 10H30).

 ROUEN : tous les 15 jours pour le courrier

ROUEN : Préfecture Convocation dans le cadre de la procédure Dublin, délai variable.

 Coût moyen pour une personne sur 1 mois :

En train                                                                                                            475 euros

A l’heure du tout numérique et de la transition écologique ces mesures nous semblent ridicules.

Les Conditions de vie « à la rue » sur le « camp », dans la « jungle ». L’existant : Des migrants, hommes seuls, vivent (« survivent ») dehors toute l’année dans des conditions inacceptables : sans eau, sans sanitaire, juste quelques tentes.

Des solutions ont été proposées et chiffrées (document rédigé par un collectif d’associations locales : Itinérance, CCFD, Pastorale des migrants, Conscience humanitaire, Welcome, La Chaudrée, l’Oasis du savoir)

Une manifestation publique le samedi 16 mars à 11 heures, sur le terre- plein des ELEÏS, place Jacques Hébert, sous forme d’un thé de la solidarité.

 

 

Le forum de la PSM

  • Le Forum de la PSM s’est déroulé le 30 mars dernier. Une cinquantaine de participant∙e∙s ont pu échanger toute au long de la journée sur la thématique de l’hébergement des personnes exilées. Après un accueil ponctué de lectures chuchotées du dernier Journal des Jungles, réalisé à Cherbourg, un point sur le droit à l’hébergement a été réalisé par Marie Rothhahn, juriste à la Fondation Abbé Pierre. Cette intervention a soulevé les manquements de l’Etat vis à vis de l’hébergement et sur la nécessité d’agir contre les expulsions de lieux de vie des personnes exilées à la frontière franco-britannique, de les visibiliser notamment via l’Observatoire des expulsions.Autour d’une table ronde, deux initiatives pour l’hébergement des personnes exilées et/ou des demandeur∙euse∙s d’asile ont ensuite été présentées : le RAIL, un réseau d’hébergement solidaire de la métropole lilloise et le KASS, un collectif amiénois luttant pour le droit à l’hébergement pour tou∙te∙s. Ces deux interventions nous ont permis de prendre du recul sur les actions que l’on pouvait mener au sien du réseau mais surtout d’échanger sur des pratiques et des moyens d’action.

    L’après-midi, trois ateliers ont été proposés, le premier sur la négociation, le second sur l’hébergement solidaire et le dernier sur la construction de solutions autonomes au sein du réseau. Lors des restitutions, quelques conseils ont pu être établis sur la façon dont on pouvait mener une négociation avec les pouvoirs publics ou encore sur les conditions les plus propices pour héberger des personnes exilées. La question du projet de la Maison du Migrant est également revenu sur la table. Nous avons ensuite pu écouter deux contes sur l’hospitalité, raconté par Nathalie de Terre d’Errance Norrent-Fontes. La journée s’est conclue par un super DJ set de sudanese beat par Shishani.

Les chiffres des expulsions des squats et bidonvilles publiés par Romeurope

Communiqué des 48 associations et collectifs du CNDH Romeurope

Expulsions de bidonvilles et squats :
le discours et les actes

Aujourd’hui, les 48 associations et collectifs du CNDH Romeurope publient les chiffres sur les expulsions collectives de squats et bidonvilles, occupés par des personnes originaires d’Europe de l’Est, Roms ou perçues comme telles. En France, en 2018, 9 688 personnes ont été expulsées de 171 lieux de vie différents. Si le nombre de personnes expulsées est en légère baisse, le nombre d’opérations d’expulsion a explosé (+45%), preuve de la « fragmentation » de ces lieux de vie par les expulsions répétées.

Le « en même temps » appliqué aux bidonvilles : un discours volontariste mais des expulsions qui cassent la dynamique de résorption
Si sur le papier, le discours du Président et du Gouvernement va dans le sens d’une réelle politique globale de résorption des bidonvilles, actuellement les actes et les paroles s’opposent.

En effet, d’une part le chef de l’Etat déclarait en septembre dernier vouloir résorber les bidonvilles, après la signature par 8 ministres de l’instruction du 25 janvier 2018 qui précisait qu’« Il s’agit de dépasser l’approche centrée sur les évacuations et d’inscrire l’intervention publique dans une dimension plus large, depuis l’implantation du campement jusqu’à sa disparition (…) ». Nous avons salué la démarche portée par la DIHAL et qui a fixé un objectif clair de résorption des bidonvilles, par l’insertion des personnes et leur accès au logement.

Et dans le même temps les Préfets continuent de procéder sans réserve à des expulsions, brisant la dynamique d’insertion. Ceci y compris en pleine trêve hivernale, suite à des demandes des propriétaires et des mairies, comme à Vigneux (91) le 8 mars dernier où 50 familles ont été expulsées et seulement 6 mises à l’abri temporairement à l’hôtel. Le préfet a pourtant le pouvoir de décaler dans le temps ces opérations pour trouver des solutions concertées et dignes pour les habitants, comme le préconise l’instruction du 25 janvier 2018.

Au moins 8 189 personnes (soit près de 85 %) n’ont eu aucune proposition de mise à l’abri, d’hébergement ou de relogement suite à leur expulsion en 2018. Les conséquences sont dramatiques pour ces personnes : retour à la rue, errance et reformation d’un autre bidonville, plus petit, plus isolé, plus fragile. Une façon indigne de multiplier et de faire perdurer les bidonvilles plutôt que de les faire « disparaitre ».

La région parisienne, championne de France des expulsions
L’accélération des expulsions est particulièrement notable à la fin de l’année scolaire (juillet) et peu avant le début de la trêve hivernale (octobre). Sans surprise, c’est en Ile-de-France que les expulsions sont les plus nombreuses : en 2018, on comptabilise 79 expulsions mettant à la rue au moins 6 132 femmes, hommes et enfants (63 % du total des personnes expulsées). C’est ensuite dans les Pays de la Loire (905 personnes) et en Auvergne-Rhône Alpes (885 personnes) que le nombre de personnes expulsées est le plus élevé.

Des solutions alternatives à l’expulsion existent
Certains territoires, qu’il faut saluer, démontrent que des solutions alternatives à l’expulsion sont possibles. Cependant elles restent trop peu nombreuses et les projets sont souvent sous-dimensionnés par rapport aux besoins des territoires. Des solutions stables ont ainsi été proposées aux habitants de bidonvilles à Haubourdin (59), Saint Denis (93), Toulouse (31), Ivry (94), Villeurbanne (69), Montpellier (34) etc. Ces opérations sont d’autant plus réussies lorsqu’elles sont concertées en amont avec les personnes concernées et les associations, en application de l’instruction du 25 janvier 2018.

Nous appelons le Président de la République et le Gouvernement à respecter leurs engagements afin d’inverser cette tendance dramatique des expulsions. Il est grand temps de les remplacer par des opérations de résorption avec des propositions de relogement stable, adaptées aux besoins et qui impliquent dès le départ les personnes concernées et les associations.

Contact presse :
Manon Fillonneau – 06 68 43 15 15  –
manon.fillonneau@romeurope.org
Twitter : @CNDH_Romeurope

Chiffres : lire la note d’analyse détaillée

lettre ouverte concernant la situation au 5 étoiles

Préfecture du Nord 12, rue Jean Sans Peur

CS 20003 – 59039 Lille Cedex

A l’attention de M. Michel Lalande, Préfet du Nord 

Copie à : Madame Martine Aubry, Maire de Lille

Monsieur Jean-René Lecerf, Président du Conseil départemental du Nord Monsieur Max-André Pick, Président de Partenord Habitat, Monsieur Damien Castelain, Président de la MEL, Monsieur Emmanuel Richard, Directeur de la DDCS du Nord, Monsieur Sylvain Mathieu, Délégué interministériel pour l’hébergement et l’accès au logement, Mme Sophie Kapusciak, Directrice territoriale de l’OFII, Monsieur Daniel Barnier, Préfet délégué pour l’égalité des chances Monsieur Jacques Toubon, Défenseur des droits

 Lettre ouverte concernant la situation des habitants du squat situé 25 rue de Valenciennes

 A Lille, le 19/03/19

Monsieur le Préfet

Nous revenons une nouvelle fois vers vous concernant la situation des personnes occupant les locaux du 25 rue de Valenciennes à Lille.

Environ 200 personnes, dont un tiers de mineurs non accompagnés en situation de grande vulnérabilité, continuent d’y vivre dans des conditions extrêmement précaires et indignes.

Si elles sont présentes dans ces lieux insalubres, ce n’est nullement par choix, mais parce que leurs appels au 115 ne débouchent que très rarement sur une proposition d’hébergement. En outre, contrairement à ce que votre représentant a pu avancer devant le Conseil d’Etat dans le cadre des recours que vous avez formulés contre les ordonnances du tribunal administratif de Lille du 16 novembre 2018 vous enjoignant à installer, avec la Ville de Lille, des toilettes et un point d’eau, les personnes présentes sur ce site n’ont nullement « les moyens de se tirer d’affaire eux-mêmes »1.

Seuls les demandeurs d’asile en cours de procédure peuvent toucher une allocation pour demandeur d’asile (ADA) mais tous ne l’ont pas et son montant2 est bien trop faible pour permettre l’accès à un logement, rendu encore plus difficile par la précarité de leur situation administrative. Les autres, mineurs ou en situation administrative instable, ne bénéficient d’aucune aide financière.

1 Propos repris par La Voix du Nord dans son édition du 11 janvier 2019

2 6.8€/jour pour notamment se nourrir et un complément de 7.4€/jour si aucune place d’hébergement n’est proposée. Soit pour une personne seule au total 426€/mois.

La fin de la trêve hivernale approche et nous craignons l’expulsion prochaine des personnes présentes dans le bâtiment. Aussi, nous vous demandons quelle prise en charge vous avez prévue pour protéger ces personnes vulnérables et en détresse, et leur permettre d’accéder à leurs droits fondamentaux. La loi prévoit en effet le droit à l’hébergement pour toute personne en situation de détresse sociale, et un dispositif spécifique d’hébergement pour des personnes en demande d’asile. Le département devrait quant à lui mettre à l’abri les mineurs au titre de la protection de l’enfance.

Alors que les juges des référés du tribunal administratif de Lille vous ont enjoint à procéder à une évaluation sociale des situations en vue de rechercher une solution d‘orientation adaptée dans un délai de quinze jours, il ne nous semble pas qu’une telle action de diagnostic ait été réalisée.

Des recours DAHO (Droit à l’hébergement opposable) ont par ailleurs été déposés ces derniers mois par des habitants du squat et une soixantaine de personnes ont pu être reconnues prioritaires pour un hébergement par la commission de médiation. La plupart de ces personnes n’ont pas reçu de proposition d’hébergement stable et adapté dans le délai de 6 semaines. Si certaines personnes ont pu être hébergées dans le cadre de la veille saisonnière, elles risquent de se retrouver à la rue à compter du 1er avril et ce alors même que la loi prévoit un « droit au maintien » en hébergement3. Elles n’auront alors pas d’autre alternative que d’aller rejoindre le bâtiment de la rue de Valenciennes, ou le prochain squat qui se créera si celui-ci est expulsé sans que de véritables solutions d’hébergement soient proposées.

Pour toutes ces raisons, nous sollicitons à nouveau l’organisation d’une réunion en urgence avec toutes les parties concernées.

Espérant recevoir une réponse favorable de votre part, nous vous prions de bien vouloir agréer, Monsieur le Préfet, l’expression de notre considération distinguée.

P remiers signataires : APU Fives APU Moulins, APU du Vieux Lille, Association La Cloche – Carillon de Lille ATD Quart Monde Hauts-de-France BANTA!,  CASA – Coordination d’Actions Solidaires et d’Accompagnement CNL 59, CSP59, Centre de la Réconciliation Collectif des Olieux

3 Article L345-2-3 du CASF : « Toute personne accueillie dans une structure d’hébergement d’urgence doit pouvoir y bénéficier d’un accompagnement personnalisé et y demeurer, dès lors qu’elle le souhaite, jusqu’à ce qu’une orientation lui soit proposée. Cette orientation est effectuée vers une structure d’hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation. »

Collectif des SDF de Lille, Collectif Solidarité Roms de Lille Métropole, Conseil Régional des Personnes Accueillies/Accompagnées des Hauts-de-France La Cimade Nord Picardie, Ecole sans frontière, Entraide de l’Eglise Protestante Unie de Lille Emmaüs Hauts-de-France, Fédération des Acteurs de la Solidarité Hauts-de-France Fondation Abbé Pierre, Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP) Groupe de réflexion inter-religieux d’aide aux migrants (GRIAM) INDECOSA-CGT 59,

Ligue des droits de l’Homme de Lille L’île de Solidarité

La Sauvegarde du Nord Magdala

Médecins Solidarité Lille MRAP

La Pastorale des Migrants RAIL

Secours Catholique Nord-Lille Société de Saint-Vincent-de-Paul

Uriopss Hauts-de-France Nord Pas-de-Calais Utopia 56

Wambrechies Entraide Réfugiés

 julie Gommeaux, avocate au Barreau de Lille, Présidente de la commission droit des étrangers Emilie Dewaele, avocate au Barreau de Lille

Père Christian Berton, doyen de la ville de Lille et responsable du Conseil œcuménique Pasteur Christian de la Roque, Eglise de « La Réconciliation »

Michel Ruef, diacre, Collectif Mémoire Fraternité

Clotilde Delbecque, Service Evangélique des Malades du Doyenné Adrien Quatennens, député de la première circonscription du Nord Ugo Bernalicis, député de la seconde circonscription du Nord Julien Poix, candidat France insoumise aux élections européennes Julie Nicolas et Maroin Al Dandachi, porte-parole d’EELV Lille Jérémie Crépel, président du groupe des élus EELV de la MEL Stéphane Baly, président du groupe des élus EELV de Lille

Hugo Vandamme, secrétaire du PCF Lille

Laurence Perrault-Lefebvre, directrice du Centre d’Information et d’Orientation de Lille Christine Carlier, secrétaire générale de l’UL CGT de Lille et Environs

France insoumise de Lille UNEF Lille

Solidaire Étudiant·e·s Lille SUD Santé Sociaux du Nord

People’s Health Movement Nord de France Collectif le social déchaîné

Les habitants du 5 étoiles

Le 5 étoiles n’est pas un choix d’habitation pour nous qui sommes contraints d’y vivre. L’existence de ce squat et de sa longévité n’est que le résultat de l’(in)action des autorités. Ce lieu nous l’occupons depuis novembre 2017 après l’expulsion de la gare de Saint Sauveur pour éviter que l’on se disperse dans la ville. Cela fait des années que les autorités ne respectent presque jamais leur obligation légale d’hébergement. Ainsi en théorie, l’ensemble des demandeur.es d’asiles devrait être loger par l’État quand le département pour sa part doit prendre en charge les mineur.es isolé.es. Mais le manque de place dans les structures est leur excuse depuis toujours, le fait que personne n’y remédie laisse penser qu’il s’agit d’une volonté. Avec la fin de la trêve hivernal, comme l’année passée, nous allons voir le retour au squat de quelques uns de nos amis logés pour l’hiver.

Comment pourrait-on consciemment choisir de vivre dans un lieu avec des conditions de vie aussi compliquées? Nous dormons dans un hangar sous des tentes ou alors dans les quelques bureaux désaffectés. L’eau et les toilettes sont présents simplement parce que cet été nous nous sommes mobilisés avec nos soutiens et l’aide d’associations pour réclamer ce droit le plus simple. L’électricité coupe régulièrement alors qu’elle nous permet de nous chauffer et de cuisiner un peu. Les associations humanitaires qui passent nous donnent bien souvent de la nourriture périmée (depuis 2016 dans certains cas) qui ne nous convient pas. On se débrouille alors pour faire nos propres préparations. Après 17h, nous sommes obligé.es de rentrer dans les tentes tant le froid fait sentir sa présence. Dans ces conditions, c’est avec tristesse et révolte que nous voyons certains de nos amis se comporter de manière perdue.

Pour nous, il nous semble évident que c’est à partir d’un logement décent que l’on peut construire notre futur dans ce pays. Nous avons tous ici envie d’avancer dans nos démarches administratives, d’aller à l’école ou de faire une formation, de faire des activités associatives ou sportives. Comment cela peut-il être possible sans un endroit tranquille où nous reposer ? Nous pensons que c’est à partir de l’hébergement, quand nous ne vivrons plus dans la rue, que nous pourrons nous en sortir. D’ailleurs quel drame pour nous de voir ce qu’est en réalité la France. Pour la plupart d’entre nous nous sommes francophones suite à l’histoire coloniale de nos pays. La France était à nos yeux un pays de droit et d’égalité. Mais quelle est cette liberté de choisir entre un hangar et la rue ? On ne peut être libre en vivant à la rue sans ressource.

Aujourd’hui, les rumeurs courent que l’expulsion approche. Nous sommes obligé.es d’accepter ce fait car c’est leur loi. S’il y a expulsion, nous espérons que des lieux d’hébergement seront proposés. Sans cela, nous ne comprenons pas que l’on puisse nous expulser pour nous mettre à la rue. Nous sommes inquiets pour la suite de nos procédures et des activités que nous avons entamé. Nous voulons rester à Lille. Nous voulons un hébergement pour tout le monde. Nous voulons la scolarisation et la formation pour tout.es et tous.

Pour s’entraider, lutter, chanter, danser, partager un repas, vivre, s’organiser collectivement, n’hésitez pas à nous rejoindre à l’assemblée ouverte chaque dimanche 15h au 5 étoiles (15rue jean Jaurès).

PARTOUT CHEZ NOUS !!

 

Des informations du CAMO

 

Petit historique CAMO

Cela fait maintenant près de 20 mois que le collectif d’aide aux migrants de Ouistreham (CAMO) agit pour venir en aide aux exilés présents sur cette commune.

Créé en septembre 2017 par une poignée de citoyens nous sommes désormais près de 300 bénévoles présents sur le terrain tout au long de chaque semaine pour venir en aide aux migrants que nous appelons ici les copains.

Nous avons créé en parallèle du CAMO une association qui s’appelle le Mouvement Ouistrehamais de Collecte Associative (MOCA).

Celle-ci permettant au CAMO de pouvoir bénéficier d’aides financières et ainsi de soulager les bénévoles de nombreux achats (nourriture, vêtements, produits d’hygiène, médicaments, recharges Lycamobile, mais aussi tout ce qui concerne la logistique des distributions).

Nous organisons des repas chauds les lundis soir, mercredis matin, jeudis soir, vendredis midi, samedis soir et dimanches soir. Les samedis matin ce sont des petits déjeuner améliorés.

Les mardis soir et mercredis soir les distributions de nourriture sont assurées par les Restos du Cœur qui distribuent des repas froids. Les lundis matin, mardis matin et dimanches matin, des groupes ou associations indépendantes prennent aussi le relai. Ainsi les copains bénéficient de 2 repas par jour à Ouistreham, sauf le jeudi.

A titre d’exemple, de septembre 2017 à août 2018, c’est environ 34000 repas qui ont été distribués par le CAMO.

Nous avons une équipe qui gère les vêtements et qui les distribue le samedi matin.

Nous distribuons aussi duvets, couvertures, couvertures de survie, produits d’hygiène.

3 fois par semaine une équipe d’infirmières et de médecins est aussi présente sur le terrain durant les distributions pour les consultations et soins médicaux avec un ancien camion de pompier généreusement prêté par l’association « Itinérance Dieppe ». Nous réalisons parfois jusqu’à 150 consultations par mois.

Nous possédons également un camion généreusement prêté par l’association Coup de Main de Ouistreham. Celui-ci nous permet de transporter tout le matériel logistique pour l’organisation des repas (tables, vaisselle, barnums, générateur avec table multiprises etc.)

Durant l’hiver 2017 nous avons créé le Camododo et fédéré plus de soixante-dix familles pour permettre aux copains d’être hébergés un ou plusieurs soirs.

Grace à Emmaüs, 8 copains peuvent-être hébergés tous les soirs.

Situation actuelle

Les migrants présents sur Ouistreham sont d’origine Soudanaise de la région du Darfour.

Présence de mineurs et d’une majorité de jeunes majeurs pour la plupart sous le régime de Dublin.

Ils étaient environ au nombre de 180 il y a 5 mois, puis 130 il y a 2 mois et maintenant environ 70.

La baisse de la population peut s’expliquer par le fait que certains arrivent à passer de l’autre côté de la Manche, d’autres repartent ailleurs durant l’hiver, certains sont hébergés à temps plein et un turnover moins important est également dû aux blocages des frontières dans le Sud et la forte diminution des secours en Méditerranée.

A noter qu’à Ouistreham nous n’avons aucune aide de la municipalité, il n’y a pas d’accueil de jour et encore moins de nuit. Nous faisons toutes nos distributions à ciel ouvert sur une place à l’entrée du chemin du halage à côté du canal, le long du quai Charcot.

Quand les copains ne sont pas hébergés ils dorment sous le centre socio-culturel situé dans le bourg de Ouistreham, certains au rond-point sous les arbres situé à côté de la maison du maire, certains sous le préau de l’école primaire. D’autres se réfugient dans des maisons abandonnées, garages ou autres abris de fortune.

Nous organisons régulièrement des maraudes les soirs d’hiver.

La présence de gendarmes et de compagnies de gardes mobiles est permanente de jour comme de nuit. Ils sont souvent stationnés sur le port, embarcadère du car-ferry et rond-point de la maison du maire.

La volonté des forces de l’ordre est de « dégager » les migrants hors du port et de les empêcher de s’introduire dans les camions. Il arrive parfois et trop régulièrement que les copains se fassent matraquer et gazer par les gardes mobiles (gendarmes en noirs – « black police »). Les copains se font réveiller aussi parfois à 5h du matin sous le centre socio-culturel de manière virulente avec de la lacrymo. Tout cela sans compter la violence verbale et la confiscation de leurs affaires (sacs de couchage, duvets, sacs à dos). Face à cette dernière injustice nous avons trouvé quelques habitants bienveillants qui acceptent de laisser des malles dans leur jardin pour qu’ils puissent y laisser leurs affaires en toute sécurité la journée. Et tout récemment une violence supplémentaire s’est ajoutée à la liste déjà longue des exactions commises par les gardes mobiles : la destruction de leurs téléphones portables.

Quand de tel faits inacceptables se produisent nous les dénonçons (voir notre page CAMO sur Facebook : https://www.facebook.com/CollectifAideMigrantsOuistreham/)

Le député de notre circonscription, Christophe Blanchet (LREM), a obtenu du Parlement un décret autorisant les forces de l’ordre à interpeller les personnes ne possédant pas de papiers d’identité dans un rayon de 5 kms autour du port. Ainsi depuis 2 mois, plusieurs copains ont été embarqués, et certains même envoyés en centre de rétention.

Depuis mi-janvier la mairie de Lion-sur-mer, commune à 6 kms de Ouistreham a ouvert un lieu d’accueil de nuit pour 10 copains et ce durant toute la période hivernale. Cela leur permet de bénéficier de lits confortables et de douches. Le CAMO s’occupe de la logistique pour amener les copains et gérer ce lieu.

Depuis le 23 février une permanence d’accueil juridique s’est ouverte à Ouistreham grâce à l’initiative de la CIMADE. Ce sera tous les samedis de 12h30 à 14h30 à la salle paroissiale de Ouistreham. Dorénavant nos copains migrants pourront savoir précisément et en toute confiance et confidentialité quels sont leurs droits. Il y aura à chaque fois des personnes compétentes sur le plan juridique et au moins un traducteur en français-arabe.

People not walls

Depuis octobre 2018 des réunions sont régulièrement organisées  à Calais ou à Douvres pour échanger autour d’une éventuelle coopération entre les associations situées des deux cotés de la Manche.

 Durant ces réunions 3 axes de travail sont proposés : 
 – Partager les informations 
 – Organiser une action commune le 20 juin 2019 (journée mondiale des réfugiés) des deux cotés de la mer  
 – Travailler sur une action de plaidoyer pour dénoncer les violences de toutes sortes commises à l’encontre des personnes exilées de passage 
 
Les associations travaillant en France  et participant à ces réunions sont les suivantes : L’Auberge des migrants, La Cabane juridique, Help refugees, la Communauté de Marie Skobtsova, le Secours Catholique, Utopia 56, etc.

De l’autre coté de la Manche nous trouvons : Justice and Peace Commissions of the Westminster and Southwark dioceses. 
 
La prochaine rencontre aura lieu au local du Secours Catholique au 47, rue de Moscou à Calais le samedi 23 mars à 14h00.

 Ces réunions sont ouvertes à toutes les associations – deux représentants  pour chaque association-.

 Merci d’ informer le Secours Catholique en amont de votre présence.

La situation à Grande Synthe

A Grande-Synthe, le nombre de personnes dans les structures ouvertes et gérées par la municipalité évolue peu, entre 150 et 200 personnes à l’intérieur du Gymnase du Moulin et 50 personnes dans la base de voile du Puythouck (CCP), cette deuxième structure étant réservée aux familles.
L’évolution géographique de la situation à Grande-Synthe est assez marquée : début Janvier, une trentaine de tentes étaient plantées aux abords du gymnase, soit environ 70 personnes, et de nombreux petits campements étaient recensées sur toute la commune. Depuis fin Janvier et sur le mois de Février, ce sont 200+ tentes, soit entre 200 et 400 personnes, qui sont autour du gymnase en fonction des périodes. Les personnes qui sont dans ces tentes n’ont pas accès à l’intérieur du gymnase, ni pour y dormir ni pour bénéficier des douches. A noter que depuis mi Février, l’accès aux toilettes est possible. Ces tentes n’ont subi qu’une seule opération de police depuis leur installation, ce qui peut expliquer, peut-être, leur augmentation rapide.
Les autres exilés présents sur la commune, notamment la communauté Pakistanaise qui est sur la zone naturelle du Puythouck, vivent dans des conditions particulièrement dégradées. Cette communauté se dit victime d’opérations d’expulsions à répétitions, jusqu’à 4 fois par semaine, avec destruction des effets personnels.
Les exilés, même ceux installés dans le gymnase et à ses abords, continuent de venir sur le parking principal du Puythouck pour bénéficier de l’aide indispensable des associations : distribution alimentaire, soins, vêtements, recharge téléphonique,… Les maraudes et mises à l’abri de l’AFEJI vers les CAO et CAES se font d’ailleurs uniquement depuis le Puythouck.