France et Royaume-Uni tentent d’endiguer les traversées irrégulières de la Manche par les migrants. Un nouveau plan de coopération doit être annoncé dans les prochaines semaines.
71 embarcations ont tenté de rejoindre l’Angleterre par la Manche en 2018. Il n’y en avait eu que 12 en 2017. La grande majorité de ces tentatives pour atteindre les côtes sud du Royaume-Uni ont eu lieu en novembre et en décembre, d’après le ministère de l’Intérieur français.
Son homologue anglais fait état de 539 migrants ayant tenté la traversée en 2018, dont 80 % au cours des trois derniers mois et 230 rien qu’en décembre. Cette recrudescence d’essais est due au renforcement de la sécurité des ports de ferries, d’Eurotunnel, et à la météo : « Les conditions ont été assez clémentes en mer tout le mois de décembre », explique Stéphane Dupré de Meteo France.
Le gouvernement britannique a fait le choix de dépêcher un de ses navires de la Royal Navy. Depuis début janvier, le HMS Mersey patrouille les eaux de la Manche, pour prêter main forte aux deux bateaux garde-côtes anglais déjà présents.
Trois objectifs
« Cette présence navale a trois objectifs : l’interception des embarcations de migrants, l’envoi d’un signal clair de fermeté et, bien sûr, le sauvetage de vies », fait savoir une source diplomatique britannique.
L’utilisation du bâtiment de la marine militaire anglaise doit rester temporaire, le temps que deux autres bateaux garde-côtes remontent de Méditerranée. La faiblesse des moyens de patrouille anglais préoccupe les Britanniques.
Un élu de Douvres, Charlie Ephicke, réclame plus de moyens pour sécuriser toute la côte anglaise : « Deux bateaux pour garder la côte, c’est franchement ridicule », s’est-il récemment alarmé.
Côté français, le discours se veut rassurant. « Le Brexit n’altère en rien la nécessité pour nos deux pays de renforcer notre coopération bilatérale afin de lutter contre l’immigration irrégulière », a rappelé Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur.
Traversée extrêmement dangereuse
Le 4 janvier, il a présenté un plan « zonal et départemental » pour renforcer la lutte contre les passages clandestins. Il doit permettre « de mettre fin à ces traversées de la Manche par des migrants qui sont non seulement illégales mais par ailleurs extrêmement dangereuses ».
La température glaciale de l’eau (en-dessous des 10°C, soit une espérance de vie réduite à deux heures si on y tombe), les forts courants marins et la circulation très dense de bateaux en tout genre rendent l’exercice particulièrement périlleux.
Dans ce plan, la lutte contre les réseaux de passeurs et la sécurisation des ports des ports de Boulogne-sur-Mer et de Calais est mise en avant. Les vols de petites embarcations se sont multipliés ces derniers mois. Mais l’accent est mis sur la coopération franco-britannique.
Des drones pour patrouiller les plages
Sajid Javid, secrétaire d’État à l’Intérieur côté anglais s’est notamment engagé «à poursuivre, dans la continuité du Traité de Sandhurst du 18 janvier 2018, l’appui du Royaume Uni à la gestion conjointe de la frontière commune franco-britannique », fait-on savoir place Beauvau.
La prise en charge financière de drones patrouillant les plages entre Calais et Boulogne est évoquée. « Entre ces deux ports, il y a une douzaine de points de passage et ils sont connus », fait remarquer Maya Konforti, bénévole à l’Auberge des Migrants, une association qui apporte une aide humanitaire dans la région de Calais. Ce qui rendra facile le travail de ces engins volants s’ils sont mis en place.
Malgré tout, il y a encore aujourd’hui plus de 1 000 candidats au passage de l’autre côté de la Manche, entre les camps de Calais et de Grande-Synthe.
Nouveau plan de coopération en vue
« Les camps de migrants sont démantelés tous les jours, ou tous les deux jours, observe Maya Konforti. L’état psychologique de ces gens est préoccupant. » En perpétuelle quête d’un endroit où dormir ou se reposer, « ils discutent entre eux de la prochaine bonne idée pour traverser, et même s’ils la trouvent, ils ne la partageront pas avec nous », explique la bénévole.
Pendant ce temps, les gouvernements des deux côtés de la Manche s’activent pour mettre en place un plan d’action conjoint pour améliorer la coopération . « Il sera finalisé dans les prochaines semaines », dit-on côté britannique.
Christophe Castaner devrait bientôt effectuer un voyage à Londres afin d’officialiser son entrée en vigueur.