Communiqué Amnesty International et Anafé sur Martine Landry

 « Délit de solidarité » / Martine Landry relaxée. Le parquet fait appel

Amnesty International France (AIF) et l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) ont appris avec consternation l’appel par le Procureur général d’Aix-en-Provence du jugement du tribunal correctionnel de Nice qui avait prononcé la relaxe de Martine Landry le 13 juillet dernier. Martine Landry avait été relaxée après avoir été poursuivie pour « aide à l’entrée sur le territoire de deux mineurs en situation irrégulière ».

« Cette décision me sidère. Je pensais pouvoir recommencer à vivre normalement, sans épée de Damoclès au-dessus de ma tête. Mon répit est de courte durée. Je reste toutefois déterminée et sûre de la légalité de mes actes », a déclaré Martine Landry.

La procédure devant le tribunal correctionnel de Nice a duré près d’un an du fait de reports demandés notamment par le Parquet.

« Le parquet est garant de l’intérêt public. En première instance, la procureure [du tribunal de Nice] avait demandé la relaxe. Il est assez étonnant que la protection de ce même intérêt public exige une condamnation dix jours après la relaxe obtenue », ont déclaré nos associations.

Alors que le tribunal de Nice avait reconnu la légitimité de l’action de Martine Landry, la décision du parquet de ce jour est un nouveau coup porté à la solidarité et la fraternité aux frontières et nos associations dénoncent un acharnement contre leur militante.

 

Amnesty International France

Créée en 1961, Amnesty International est un mouvement mondial et indépendant de plus de 7 millions de membres et sympathisants qui œuvrent pour le respect, la défense et la promotion de tous les droits inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. Amnesty International a reçu le prix Nobel de la paix en 1977. Amnesty International France (AIF) a été créée en 1971. Son financement repose sur la générosité du public (200 000 donateurs), sur les ventes de produits de soutien et les cotisations de ses 75 000 membres. AIF est agréée par le Comité de la charte du don en confiance.

www.amnesty.fr@amnestypresseAgirFaire un don

 

Anafé (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers)

Depuis 1989, l’Anafé (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers) agit en faveur des droits des étrangers se présentant aux frontières françaises et européennes et dénonce les violations des droits des personnes maintenues en zones d’attente résultant des pratiques de maintien et de refoulement aux frontières. Les actions de l’Anafé sont financées notamment grâce à des subventions de fondations privées ou onusiennes, des cotisations de ses membres et des dons.

 

 

Communiqué Romeurope // L’eau, un droit fondamental pour les habitant.e.s de Choisy le Roi et d’ailleurs

http://www.romeurope.org/leau-droit-fondamental-habitants-bidonville-de-choisy-roi-dailleurs/

Dans une décision du 17 juillet 2018, le tribunal administratif (TA) de Melun a enjoint le préfet du Val-de-Marne et le maire de Choisy-le-Roi de mettre en place à destination des habitants d’un bidonville des toilettes mobiles dans un délai de 48 heures et d’installer des points d’eau potable dans un délai de 15 jours.

Contexte

Cette décision fait suite à un référé-liberté intenté par Me Ambre Benitez au nom de plusieurs habitants du bidonville de Choisy-le Roi, privés d’accès à l’eau courante et de latrines malgré la demande faite à la mairie. Cette demande s’inscrivait dans un contexte particulier lié au fait que l’état de santé de certains habitants, dont des enfants, nécessitait un accès urgent à l’eau. Ce sont 210 personnes, dont 50 enfants enfants mineurs et 10 nourrissons qui vivent dans ce bidonville.

Ce que cela signifie

En reconnaissant l’insuffisance de la prise en compte des conditions de vie particulièrement précaires des occupants par les pouvoirs publics qui « relève une carence de nature à exposer ces personnes, de manière caractérisée, à des traitements inhumains ou dégradants portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale », le juge rappelle avec force l’obligation faite au préfet – en tant que représentant de l’Etat propriétaire du terrain mais aussi en tant qu’autorité de police – et à la mairie d’assurer l’assainissement et l’alimentation en eau pour tous les habitants sur sa commune (article L. 5219-5 du code général des collectivités territoriales) afin de garantir le principe de dignité humaine de ces habitants duquel ces autorités sont garantes.

Surtout, c’est la première fois qu’un tribunal de première instance décide de se saisir et d’appliquer la jurisprudence du Conseil d’Etat sur le droit à l’eau du 31 juillet 2017. Celui-ci avait reconnu dans cette décision historique que l’inexistence ou l’insuffisance d’accès à l’eau pour permettre aux personnes exilées à Calais de se laver, laver leurs vêtements ou de boire de l’eau potable étaient constitutives de traitements inhumains ou dégradants aux yeux du juge et de nature à créer un risque pour la santé publique. C’est à ce titre que le Conseil d’Etat avait confirmé la décision du tribunal administratif de Lille qui faisait notamment obligation à l’Etat et à la commune de Calais de créer dans un délais de dix jours sous astreinte de 100 euros par jour des points d’accès à l’eau accessibles aux migrants, des latrines et d’un dispositif d’accès à des douches.  La décision du TA de Melun du 17 juillet 2018 reprend en grande partie l’argumentaire du Conseil d’Etat.

Vigilance

Si cette décision du tribunal administratif de Melun reconnait enfin le droit à l’eau pour les habitants de bidonvilles et squats et ouvre la voie à une reconnaissance plus large de ce droit fondamental qui devrait être généralisé à l’ensemble des habitants vivants en bidonvilles et squats, il convient de rester vigilant quant à l’application effective par les autorités publiques des mesures prévues par le juge à Choisy le Roi. En effet, le juge n’a pas fait droit à la demande des habitants d’ordonner une astreinte en cas de refus ou de retard dans l’installation des toilettes et des points d’eau. Le CNDH Romeurope restera particulièrement attentif au respect des délais par le préfet du Val-de-Marne et la mairie de Choisy-le-Roi.

Le CNDH Romeurope appelle toutes les municipalités et les préfectures sur le territoire desquelles vivent des femmes, des hommes et des enfants en bidonville ou en squat à leur fournir un accès immédiat à l’eau et à des toilettes, qu’importe leur statut d’occupation, pour garantir le principe fondamental de dignité humaine.

 

 

Politis // Quand le 115 ne répond pas

https://www.politis.fr/articles/2018/07/quand-le-115-ne-repond-pas-39221/

Il faut parfois plus de deux heures pour arriver à joindre au téléphone un écoutant du Samu social. Témoignage d’un Parisien qui a hébergé une femme enceinte de sept mois, à la rue avec son fils de 2 ans.

Comme d’autres Parisiens, et d’autres Franciliens, et d’autres Français, Laurent Coq, pianiste, a hébergé une femme et son petit garçon qui erraient dans les rues de la capitale sans solution d’hébergement et sans ressources. Enceinte de sept mois et mère d’un jeune enfant, Awa répondait pourtant aux critères prioritaires d’accès à une mise à l’abri, en centre d’hébergement d’urgence ou en hôtel meublé. Mais que faire quand le 115, numéro d’appel du Samu social, ne répond pas ? Une femme enceinte peut se tourner vers Solidarité Paris Maman (Solipam), réseau de santé en périnatalité pour les femmes enceintes et leurs enfants en situation de grande précarité en Île-de-France. Ou la mission France de l’ONG Médecins du monde. Encore faut-il les connaître, et arriver à joindre le 115 par qui tout transite, sauf les urgences médicales, en théorie. Laurent Coq a confié son témoignage à Politis.

« En rentrant à pied jeudi 19 juillet au soir après le concert de mes élèves, au niveau de l’avenue Victoria [Ier arrondissement de Paris], je suis tombé sur une maman ivoirienne enceinte de sept mois et son petit garçon de 2 ans, qui erraient dans les rues à la recherche d’un bus. Elle poussait une grosse poussette chargée d’un sac énorme, et je les ai sentis épuisés tous les deux. Ils tournaient dans Paris depuis 9 heures, sans aucun point de chute. Le 115 n’ayant pas trouvé de logement pour eux, elle tentait de rejoindre la gare Montparnasse pour aller y dormir, à même le sol. Ils n’avaient rien avalé depuis le matin. Je les ai ramenés à la maison où ils ont mangé des pâtes avant de s’effondrer sur mon canapé-lit.

« Awa est partie d’Abidjan avec son compagnon pour fuir la famille de celui-ci, qui n’acceptait pas leur union et voulait lui enlever leur fils, Bakary. Mais ils ont été séparés au Maroc au moment de prendre le bateau pour l’Espagne. Depuis, elle n’a plus aucune nouvelle de lui. Pendant la traversée, elle s’est liée d’amitié avec une maman d’un autre petit garçon de 3 ans. Ensemble, ces deux mères et leurs fils ont passé deux mois en Espagne avant de remonter à Paris où elles galèrent depuis un mois à dormir dehors, ou dans le hall d’un hôpital quand celui-ci ne les expulse pas.

« Le 115, c’est le saint Graal ! »

« Vendredi, chaque interlocuteur que j’ai eu au téléphone – associations comme centres d’accueil – n’avait qu’un mot à la bouche : « Appelez le 115 ! » C’est le saint Graal, le 115. Tout passe par ce service qui déploie les sans-abri sur les centres et les hôtels meublés de Paris-Île-de-France. Sauf qu’ils ne sont pas assez nombreux à prendre les appels, et qu’ils manquent de lits pour faire face à la demande, surtout depuis le démantèlement du camp de migrants porte de la Villette, le 30 mai.

« Samedi matin, j’ai laissé Awa et son petit Bakary repartir sous la pluie vers le centre d’accueil de Bonne-Nouvelle, où ils ont pu prendre un petit-déjeuner et une douche, tandis que je partais enregistrer mes élèves à l’Edim (l’école de musique de Cachan où j’enseigne). À mon retour, elle m’a rappelé et ils sont repassés chez moi en début d’après-midi pour qu’ensemble, nous tentions à nouveau d’obtenir un hébergement via le 115. Résultat : presque deux heures d’attente au téléphone. Après quarante minutes d’une première attente, j’ai enfin eu une personne au bout du fil, et lui ai exposé le cas d’Awa, prioritaire normalement puisque enceinte de sept mois avec un enfant en bas âge. La personne m’a répondu de ne surtout pas quitter, elle me transférait à une personne qualifiée… Au bout d’1h30 d’attente, j’ai dû raccrocher parce que je devais partir à une répétition. Sans avoir eu de nouvel interlocuteur…

« Le 115, qui s’adresse exclusivement aux personnes à la rue, c’est une heure d’attente au téléphone minimum, parfois deux, la plupart du temps en vain. Comment une personne à la rue avec un portable à moitié chargé peut-elle patienter si longtemps ? Voilà résumée l’action publique. Un dispositif complètement déshumanisé et inefficace.

« Fiasco d’État ? »

« Mon amie Françoise, qui travaille dans le secteur social depuis trente ans, me dit que ça n’a jamais été pire. Avant, les travailleurs sociaux traitaient directement avec les directeurs des centres d’accueil. Ils les connaissaient et travaillaient en bonne intelligence. Maintenant, tout passe par le 115. Ces liens précieux sont cassés, ce qui a dépossédé autant d’acteurs de terrain de moyens d’agir. C’est un fiasco d’État.

« L’amie d’Awa rencontrée lors de la traversée l’a retrouvée, et ils sont tous partis à Trappes (Yvelines), chez la tante de l’amie qui a accepté de les héberger dans son petit deux-pièces. Awa m’a appelé samedi soir à 22h30, épuisée. Ils étaient enfin arrivés, et j’entendais les enfants qui jouaient. Combien de temps cette situation va-t-elle durer ? Pour l’heure en tout cas, ils ne sont plus à la rue…

« Le petit Bakary est la grâce incarnée. Il fallait le voir jeudi soir quand il est entré chez moi, après une journée passée dans la poussette parce que sa maman avait trop peur de le laisser marcher sur le trottoir avec toutes les voitures… Il courait de la salle de bains au canapé sur lequel il sautait en riant. Vendredi après-midi, il a passé une demi-heure sur le piano, comme un ange.

Séparés…

« Je n’ai pas eu de nouvelles d’Awa pendant le week-end. J’étais inquiet. Quand j’ai fini par la joindre lundi, elle était à l’hôpital. Deux jours plus tôt, elle avait enfin décroché un logement avec le 115, à Corbeil-Essonnes, pour une semaine. Mais, dimanche à 6 heures du matin, alors qu’elle dormait avec son fils, elle a eu des contractions et elle a senti qu’elle perdait ses eaux. Sa poche amniotique s’était rompue. Elle a tout de suite compris l’urgence et a pris le décision de repartir à Paris pour l’hôpital. Elle a dû descendre son gros sac (l’appartement était situé au deuxième étage), puis la poussette, puis son fils, pour aller prendre le bus, puis le RER. Arrivés enfin à l’hôpital, la décision du personnel qui l’a prise en charge a tout de suite été de la garder au service des grossesses pathologiques et de placer Bakary dans une pouponnière. C’est la première fois qu’il est séparé de sa mère depuis sa naissance, avec des personnes qui ne parlent pas sa langue. Première nuit seul aussi.

« Mardi, j’ai eu une sage-femme de Solipam au téléphone, vraiment très bien. Si la procédure prendra probablement deux semaines pour que son inscription à l’association soit effective, elle a pris les coordonnées d’Awa et m’a promis de l’appeler dans l’après-midi. La prise en charge consiste en un suivi de la grossesse, de l’hébergement après la naissance et de la scolarité éventuelle des enfants (en l’occurrence Bakary est encore trop jeune) avec l’accompagnement et la coordination de tous les acteurs, dont l’assistante sociale. Ce soir mercredi, en sortant de mes cours, je suis passé la voir. On lui a fait une échographie, Bakary va avoir un petit frère… qui pour l’heure est encore dans le ventre de sa maman. La situation semble s’être stabilisée, il ne manque pas de liquide amniotique.

« Des questions demeurent. Awa va-t-elle rester hospitalisée jusqu’à l’accouchement, deux mois sans son fils ? Comment Bakary va-t-il vivre cette situation, lui qui n’a pas vu sa maman depuis trois jours ? Qu’adviendra-t-il d’eux quand il faudra quitter l’hôpital après l’accouchement ? Auront-ils un logement pérenne ? Qu’est-il arrivé au papa ? Le retrouveront-ils un jour ? Et quid de sa situation au regard de l’État français ? Sera-t-elle renvoyée en Côte d’Ivoire où elle risque à nouveau de se voir retirer la garde de ses enfants ? Des destins comme celui-ci, il en existe des milliers, souvent bien plus tragiques. Combien de femmes seules, avec enfants, et enceintes dormiront dans les gares, les halls d’hôpitaux ou à même le trottoir cette nuit à Paris ? »

 

Référé liberté sur l’eau – Ordonnance du Tribunal Administratif de Lille

L’ordonnance est consultable ici

Le communiqué des associations:

Le Tribunal Administratif rappelle à la préfecture ses engagements et condamne l’Etat à installer de nouvelles latrines à Calais

 Alors que les températures sont à la hausse  à Calais en ce mois de juillet, la situation des personnes exilées est alarmante :

  • les points de distribution d’eau proposés par l’état sont très éloignés des lieux de vie.
  • L’accès à l’eau et aux douches n’est possible que certaines heures de la journée
  • il est impossible de laver et de sécher le linge
  • les exilé.e.s n’ont aucun moyen de stocker l’eau pour y avoir accès 24H/24

La soif, le manque d’hygiène dégradent encore les conditions de vie des exilé.e.s et entraînent des répercussions sur leur santé et leur état psychique.

Nous faisons remonter nos inquiétudes de manière régulières aux autorités, notamment dans le cadre des réunions en sous préfecture de Calais dans des réunions appelées “aide aux migrants” qui sont organisées une fois par mois. Ces réunions présentent toutefois de nombreuses limites : le choix des dates et des ordres du jour, ainsi que la rédaction des comptes rendus, sont effectués à la préfecture, comme la sélection des associations autorisées à y participer. Dans les faits, nous ne sommes pas entendus, et nos remarques lors de ces réunions n’ont pas débouché sur des changements significatifs pour les personnes en situation de transit à Calais.

Nous n’avions alors plus le choix : 11 associations ont invité la préfecture à s’expliquer devant le juge des référés au Tribunal Administratif de Lille.

Le rapporteur spécial de l’ONU Leo Heller est lui aussi intervenu en tierce partie à ce contentieux pour inviter la France à respecter ses obligations en matière de fourniture d’eau.

Le Tribunal Administratif vient de rendre son ordonnance ce 31 juillet 2018.  Celui-ci rappelle les engagements de la préfecture pris à l’audience, invitant ainsi les associations à le saisir de nouveau si les engagements n’étaient pas respectés :

–          l’achat de jerrycanes de 5 litres permettant aux exilé.e.s de transporter de l’eau

–          l’extension des horaires d’accès à l’eau

–          l’installation d’une troisième citerne mobile  et de deux fontaines à eau

–     l’achat de bac permettant de laver le linge

Le juge enjoint également à l’Etat de mettre en place de nouvelles latrines car l’absence de celles-ci dans certains secteurs seraient constitutives d’une atteinte grave et manifestement illégale à la dignité des personnes.

Pour les associations, c’est une victoire : l’accès à l’eau et aux systèmes d’hygiène va être amélioré.

Nous allons rester très vigilantes sur la mise en place de ces différentes annonces dans les semaines à venir.

Nous regrettons de devoir saisir le juge administratif pour que soient respectés les droits les plus élémentaires des personnes migrantes.

L’Auberge des Migrants

La Cabane juridique – The Legal Shelter

Refugee Women Center

Secours Catholique – Caritas France

Communiqué de presse 26 juillet 2018

Communiqué : Face au tribunal, la préfecture du Pas de Calais admet ses manquements et annonce de nouveaux dispositifs

Alors que les températures sont à la hausse  à Calais en ce mois de juillet, la situation des personnes exilées est alarmante :

  • les points de distribution d’eau proposés par l’état sont très éloignés des lieux de vie.

  • L’accès à l’eau et aux douches n’est possible que certaines heures de la journée

  • il est impossible de laver et de sécher le linge

  • les exilé.e.s n’ont aucun moyen de stocker l’eau pour y avoir accès 24H/24

La soif, le manque d’hygiène dégradent encore les conditions de vie des exilé.e.s et entraînent des répercussions sur leur santé et leur état psychique.

Nous faisons remonter nos inquiétudes de manière régulières aux autorités, notamment dans le cadre des réunions en sous préfecture de Calais dans des réunions appelées “aide aux migrants” qui sont organisées une fois par mois. Ces réunions présentent toutefois de nombreuses limites : le choix des dates et des ordres du jour, ainsi que la rédaction des comptes rendus, sont effectués à la préfecture, comme la sélection des associations autorisées à y participer. Dans les faits, nous ne sommes pas entendus, et nos remarques lors de ces réunions n’ont pas débouché sur des changements significatifs pour les personnes en situation de transit à Calais.

Nous n’avions alors plus le choix : 11 associations ont invité la préfecture à s’expliquer devant le juge des référés au Tribunal Administratif de Lille.

Le rapporteur spécial de l’ONU Leo Heller est lui aussi intervenu en tierce partie à ce contentieux pour inviter la France à respecter ses obligations en matière de fourniture d’eau.

Les mesures que nous demandons sont très précises :

  • rapprocher les points d’eau des lieux de vie, faire en sorte qu’ils soient accessibles jour et nuit, et distribuer des récipients pour que les personnes sans-abri puissent stocker de l’eau

  • mettre en place un dispositif pour que les personnes sans-abris puissent laver leurs vêtements, et ainsi améliorer les conditions d’hygiène

  • améliorer l’accès aux douches (plages horaires plus longues, accès spécial pour les femmes et les mineurs)

  • Rapprocher les sanitaires des lieux de vie, et installer des robinets pour que les personnes exilées puissent se laver les mains

  • Mettre en place des bennes à ordure pour que les déchets soient traités

  • Informer les exilés sur ces dispositifs avec des documents traduits


Et cela a payé : le jour de l’audience, la préfecture du Pas de Calais a annoncé de très nombreuses évolutions du dispositif :

  • 2 fontaines à eau vont être présentes 24h/24 rue des Huttes

  • un 3ème lieu de ramassage va être mis en place pour les douches

  • Une 3ème citerne mobile est installé depuis le 23 juillet (veille de l’audience)

  • “plusieurs centaines de jerricans” vont être commandés pour être distribués aux exilé.e.s

  • Des bassines peuvent être commandées pour que les exilé.e.s lavent leur vêtements

La décision sera rendue en début de semaine prochaine.

Pour les associations, c’est une victoire : l’accès à l’eau et aux systèmes d’hygiène va être amélioré.

Nous allons rester très vigilantes sur la mise en place de ces différentes annonces dans les semaines à venir.

Et malgré cela, la situation reste très difficile : les expulsions forcées continuent, la violence et le harcèlement restent la pierre angulaire de la politique de l’Etat à Calais et sur le littoral.

Ce mercredi 25, le matin, une nouvelle opération d’expulsion forcée s’est déroulée sur le camp de la rue des Verrotières, où les exilé.e.s se sont fait confisquer tentes, couvertures et affaires personnelles. Même chose aujourd’hui au bois Chico-Mendès.

Faudra-t-il systématiquement retourner devant le Tribunal Administratif pour réclamer que soient respectés les droits fondamentaux des personnes migrantes?


Auberge des Migrants

Cabane Juridique / Legal Shelter
Gynécologie Sans Frontière
Help Refugees
Refugee Women Center
Utopia 56
Secours Catholique

Calais – boycott des réunions en préfecture

Calais : pourquoi les associations d’aide aux migrants vont boycotter les réunions avec l’Etat

Plusieurs associations d’aide aux migrants de Calais ont annoncé vendredi boycotter à l’avenir les réunions organisées par la préfecture afin de protester contre la « dégradation » de la situation ces dernières semaines.

Par AFP Publié le 14/07/2018 à 09:21

« Jusque-là on avait juste refusé de rencontrer Macron en janvier quand il est venu à Calais, sinon on a participé à toutes les réunions », a souligné auprès François Guennoc, de l’Auberge des migrants, l’une des trois associations signataires. Médecins du Monde et Salam avaient déjà cessé de venir.

« Mais les arrestations déloyales de marcheurs a été la goutte d’eau qui fait déborder le vase« , a-t-il ajouté. Il faisait ainsi référence à l’interpellation de cinq migrants, le 7 juillet à Calais, qui participaient à une « Marche solidaire » reliant Vintimille (Italie) à Douvres (Grande-Bretagne).

Selon M. Guennoc, trois d’entre eux ont été libérés des centres de rétention où ils avaient été placés, un autre allait être renvoyé en Belgique où ses empreintes avaient été enregistrées en vertu de l’accord de Dublin et un dernier va être renvoyé au Mali.

L’Auberge des Migrants, le Secours Catholique à Calais et Utopia 56 ont adressé un courrier au préfet du Pas-de-Calais pour dénoncer « une situation dégradée ces dernières semaines ».

Ils soulignent notamment :

  • une « insuffisance de l’accès à l’eau« 
  • une « insuffisance voire inexistence actuelle du dispositif d’information aux mineurs« ,
  • « pas ou pas assez de traducteurs »
  • une « insuffisance des informations sur les départs vers les centres d’accueil« 
  • des « violences policières persistantes« .

Le préfet « surpris »

Le préfet s’est dit « surpris de ce refus de participer », assurant que les « échanges avec les associations ont d’ailleurs permis de faire évoluer positivement le dispositif humanitaire piloté par l’État sur plusieurs aspects concrets » (maraudes, points d’eau).

« Quant aux interpellations d’étrangers en situation irrégulière à la frontière franco-britannique le 8 juillet 2018, elles viennent d’être reconnues comme loyales par la Cour d’appel de Douai« , a-t-il ajouté dans une réponse écrite adressée à l’AFP, affirmant que « l’État assure un socle humanitaire complet à destination de la population migrante » (distribution de repas, consultations médicales gratuites).

« L’Office français pour l’immigration et l’intégration (OFII) et les associations Audasse et France Terre d’Asile sillonnent le territoire calaisien à la rencontre des personnes migrantes pour leur fournir, dans leurs principales langues maternelles, des informations fiables sur leurs droits et sur le socle humanitaire », précise-t-il.

La préfecture estime qu’entre 350 et 400 migrants vivent à Calais, les associations parlent de 600 à 700 personnes.

Bastamag // Violences contre les migrant.e.s à Calais

À Calais, les violences policières contre les migrants se poursuivent malgré les protestations

par Olivier Favier 24 juillet 2018

À Calais et alentours, les candidats à l’exil vers l’Angleterre continuent à installer des campements de fortune en attendant de réussir à traverser la Manche. Éparpillés dans les dunes, ils survivent dans des conditions extrêmement précaires et doivent faire face à un niveau élevé de harcèlement policier. Destruction de téléphones, fonctionnaires qui urinent sur les tentes, matériel de camping jeté dans l’eau … les associations présentes sur le terrain rapportent des témoignages effarants. Reportage.

C’est une étape importante de « La Marche citoyenne et solidaire avec les migrants », partie le 30 avril de Vintimille en direction de Londres. Sous le soleil de juillet, elle relie Grande-Synthe à Calais par la route de Gravelines. Les marcheur(euse)s longent ainsi la lande qui de 2015 à 2016 a accueilli jusqu’à plus de 10 000 candidats à l’émigration pour l’Angleterre. Depuis lors, le bidonville a été évacué et nombre de ses habitant(e)s ont été emmenés vers des Centres d’accueil et d’orientation (CAO) répartis sur l’ensemble du territoire français. À première vue, dans la région de Calais, la situation semble désormais entièrement contrôlée par les pouvoirs publics. Le matin-même à l’Office du tourisme, une hôtesse d’accueil qui ne semble rien savoir du passage de la « Marche citoyenne » exprime son soulagement : « La crise des migrants c’est fini. Les médias vont enfin pouvoir parler d’autre chose. »

Des migrants de plus en plus vulnérables

Près des dunes situées à sept kilomètres à l’est de la ville, un campement rassemble une cinquantaine de Soudanais. La zone portuaire qui est déjà officiellement en territoire anglais est toujours surveillée et protégée de toute incursion par de hauts grillages. Dans Calais et dans ses alentours, on parle de quelques 700 personnes disséminées sur plusieurs sites. C’est un nombre et une situation assez semblables en apparence avec ce que la ville a connu depuis l’évacuation du centre de Sangatte en 2002. Les associatif(ve)s en témoignent par les appels reçus : chaque semaine, les migrants continuent de passer par petits effectifs. En langage bureaucratique, on dira qu’un « flux discret » empêche que le « stock » devienne un « point de fixation ».

En février dernier, toutefois, une rixe d’abord présentée dans la presse comme un affrontement entre migrants érythréens et afghans — en fait une agression des premiers par des passeurs — a fait cinq blessés par balle. L’un d’eux, touché à la nuque, est resté tétraplégique. Une violence d’une telle ampleur, en plein jour, témoigne d’une situation particulièrement chaotique, où les trafiquants se font plus menaçants par peur d’en perdre le contrôle. D’un côté, les migrants ont plus que jamais besoin de leurs « services ». De l’autre, la dispersion les rend encore plus vulnérables.

Des atteintes aux personnes d’une inédite gravité

Le décor répressif qui s’est pérennisé autour des embarcadères s’accompagne d’un niveau élevé de harcèlement policier. Constamment dénoncé par de nombreuses associations depuis plus d’un an, il est d’abord le fait d’une présence massive des Compagnies républicaines de sécurité — six ou sept compagnies selon Christian Salomé, le président de l’Auberge des migrants — soit un effectif comparable à celui des migrants eux mêmes ! En janvier, cette association s’est jointe au Secours catholique en portant plainte contre X pour « destruction et dégradation de biens ». À l’origine par ailleurs de la Marche solidaire, elle s’est déjà unie à Utopia 56 en juin 2017 dans une lettre envoyée au nouveau président de la république et au ministre de l’Intérieur.

Quelques jours plus tôt, le Défenseur des droits avait évoqué une « sorte de traque » et des atteintes aux personnes « d’une inédite gravité ». En juillet 2017, un rapport de l’ONG Human Rights Watch dénonçait lui aussi « un usage excessif et disproportionné » de la force. En octobre, devant tant de voix concordantes, un rapport de l’Inspection générale de l’administration (IGA), de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) et de l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) diligenté par le ministre de l’Intérieur reconnaît a minima que « l’accumulation des témoignages écrits et oraux, bien que ne pouvant tenir lieu de preuves formelles, conduit à considérer comme plausibles des manquements à la doctrine d’emploi de la force et à la déontologie policière, principalement à Calais ».

Destruction de matériel et violences sur les corps

Des témoignages du même ordre sont encore portés à la connaissance d’un plus large public par le réalisateur Yann Moix, dans son documentaire Re-Calais, diffusé le 9 juin 2018 sur Arte. Professionnelle ou bénévole, chaque personne présente sur le terrain en a long à dire sur le sujet. G., par exemple, de l’association Utopia 56, fait état d’innombrables abus rapportés par les migrants : destruction de téléphones, fonctionnaires qui urinent sur les tentes, matériel de camping jeté dans l’eau, agents se photographiant avec les personnes qu’ils contrôlent comme les colons d’autrefois avec les « indigènes ». Les corps aussi portent des traces suspectes. « Du temps du bidonville, nous emmenions constamment des gens à l’hôpital, un peu moins maintenant, depuis que les médias se sont emparés du sujet. La semaine dernière pourtant, j’ai accompagné un jeune. Lorsque j’ai dit au médecin que la marque sur son dos pouvait être la conséquence d’un coup de matraque, il m’a répondu que ce n’était pas son problème. »

Si les associatif(ve)s apportent ou relaient de très nombreux témoignages, tous soulignent la difficulté — l’impossibilité souvent — de constituer des preuves. Les violences les plus caractérisées se déroulent en effet à l’abri des regards et des caméras. À leur égard, professionnel(le)s et bénévoles dénoncent des contrôles d’identité répétés, des interdictions de filmer, des verbalisations abusives. G. raconte ainsi qu’à la suite d’un contrôle, il a eu une amende pour absence de roue de secours dans son véhicule de service. Elle avait été changée une heure plus tôt suite à une crevaison. Des fonctionnaires recourent à l’intimidation : d’autres associatif(ve)s disent avoir été suivi(e)s jusqu’à leur domicile.

Si la brutalité débridée se cache, le harcèlement constant mené par les forces de police à l’encontre des migrants est visible au grand jour. En mars 2017, la maire Les Républicains Natacha Bouchart interdit les distributions de nourriture dans la zone de l’ancien bidonville, un arrêté aussitôt annulé par le tribunal de Lille. Deux mois plus tard cependant, les associations témoignent d’une distribution empêchée par les forces de l’ordre. En juin, réagissant à une saisie des associations réclamant la création d’un nouveau lieu d’accueil, le tribunal de Lille y oppose une fin de non recevoir. Il oblige néanmoins la ville et l’État à installer sous dix jours des points d’eau et des sanitaires.

Un harcèlement constant et largement documenté

Si l’hostilité affichée par la commune ne faiblit pas, Christian Salomé explique que la situation lui échappe désormais totalement. « Quelle que soit leur position sur le sujet qui peut être radicalement différente, comme à Grande-Synthe et Calais, les maires sont hors-circuit depuis l’arrivée de Macron à l’Élysée. Les préfets et sous-préfets prennent des décisions sans prévenir. » Dans un rapport d’avril 2018 — qui fait suite à un autre de décembre 2017 — L’Auberge des migrants fait état de deux types d’opérations menées très régulièrement par les CRS.

Pour les opérations de « confiscation », elles agissent en convoi de 5 à 12 camions, accompagnées d’une voiture de police du commissariat local. Un périmètre de sécurité est défini, duquel journalistes et associatifs sont tenus à l’écart. Puis les agents de nettoyage de la ville de Calais ramassent l’intégralité ou presque du matériel dévolu au couchage et à la nourriture des migrants. Dans certains cas, des agents de la sous-préfecture sont présents sur les lieux. Interrogés par les associatifs, qui s’efforcent d’être présents à toutes les évacuations, ils expliquent leur présence par la nécessité d’informer sur les possibilités de demande d’asile en France. Dans les faits, ils n’ont avec les occupants qu’une « communication limitée ».

Ce opérations durent entre une demi-heure et plusieurs heures. Elles ont lieu chaque jour ouvré dans les différents lieux de vie des migrants. La fréquence de passage dans un même campement est hebdomadaire. Dans un cas cependant, il ne s’est écoulé qu’un jour et demi entre la distribution de tentes et une nouvelle évacuation. En tout 142 évacuations ont été recensées entre octobre 2017 et avril 2018. L’autre type d’opération est la destruction pure et simple des biens des migrants. Ces actions-là ne durent que quelques minutes, généralement à l’aube ou à la nuit tombée, à l’abri des regards. Les effets personnels sont rendus inutilisables au moyen d’objets coupants, de matraques ou de gaz lacrymogènes. À l’arrivée des associations, il est déjà trop tard. Les responsables ont quitté les lieux.

Des opérations menées au grand jour et dans l’illégalité

Les conséquences immédiates sont évidentes : l’extrême précarisation de personnes se trouvant déjà en situation de grande fragilité et un coût supplémentaire occasionné par le renouvellement incessant du matériel de couchage et de nourriture. Mais l’association alerte aussi sur « l’absence de base légale apparente » pour la mise en œuvre de ces opérations. Dans son rapport, l’Auberge des migrants cite un seul cas où un document a été présenté comme justificatif : une réquisition du procureur de Boulogne-sur-Mer pour procéder à des contrôles d’identité dans différents quartiers de Calais, laquelle n’autorise en rien l’expulsion de terrain ou la confiscation d’effets personnels. Ces actions menées en-dehors de tout cadre juridique clairement établi et signifié correspond à ce que l’ONU définit comme des « évacuations forcées ».

Parmi la population locale, on perçoit parfois une sourde hostilité envers les personnes migrantes. Mais pour G., « les gens en ont surtout marre d’être abandonnés par des gouvernements successifs qui ne font rien. » Au soir du 6 juillet 2018, la « Marche citoyenne » s’approche de la cour du « Channel », la Scène nationale de Calais. Toute la journée, des militants ont préparé un grand repas solidaire pour accueillir les marcheurs. Aux fenêtres, quelques habitant(e)s sourient ou applaudissent. Les forces de l’ordre encadrent le cortège à distance, attentives aux photographes venus couvrir l’événement.

Peu avant d’arriver à destination, quatre militant(e)s vêtus de tee-shirts blancs, avec le mot « police » écrit au feutre indélébile, entament un happening. Ils/elles feignent d’appliquer une nouvelle règle fantaisiste inventée par l’État : « Tous ceux qui font plus d’1 mètre 70 ne passeront pas la frontière ». Les manifestant(e)s se prêtent au jeu, les rires fusent. En dénonçant par l’absurde l’arbitraire de la loi, la saynète dévoile en un instant l’inanité du système derrière son plus visible rouage. Par delà la question « Que fait la police ? » obstinément répétée, s’en pose une autre tout aussi essentielle : « Mais pourquoi agit-elle ainsi ? Au nom de qui et de quoi ? »

Olivier Favier

Photo : Happening de « La Marche citoyenne et solidaire avec les migrants », Calais, 6 juillet 2018. © Olivier Favier.

Référé sur l’accès à l’eau à Calais

Migrants de Calais : les associations saisissent, une nouvelle fois, la justice
lundi 23 juillet 2018 à 16:49 Par Matthieu Darriet, France Bleu Nord et France Bleu
 
Pour améliorer un peu les conditions de vie des réfugiés, à Calais, les associations qui leur viennent en aide saisissent à nouveau la justice, en urgence. Comme il y a un an, elles demandent un accès inconditionnel à l’eau, aux douches et aux toilettes, au nom de dignité humaine.
L'Etat doit fournir de l'eau de façon inconditionnelle aux exilés. Mais à Calais, les associations, comme l'Auberge des migrants, doivent encore distribuer des bidons.L’Etat doit fournir de l’eau de façon inconditionnelle aux exilés. Mais à Calais, les associations, comme l’Auberge des migrants, doivent encore distribuer des bidons. © Radio France – Matthieu Darriet

Calais, France

L’audience est prévue cet mardi, à 14 h, devant le Tribunal administratif de Lille. Il y a un an, la justice avait obligé l’Etat à mettre de l’eau et des douches à disposition des migrants. Mais les bénévoles estiment que le dispositif actuel est volontairement insuffisant. Il y aurait entre 600 et 800 réfugiés, en ce moment, à Calais. Les bénévoles parlent d’une atteinte aux droits fondamentaux des personnes.

Mathilde Robert est bénévole à l’Auberge des migrants : « Il y a tout un système de douches, qui a été mis en place et qui n’existait pas avant. Il y a eu l’installation de points d’eau, qui n’existaient pas avant. Mais, sur le terrain, nous constatons que ce que l’Etat a mis en place n’est pas suffisant. Il y a des migrants qui nous expliquent qu’ils ont des problèmes pour aller se doucher ou qu’ils préfèrent aller aux toilettes dans des bois. »

On se retrouve à amener quotidiennement des centaines de litres d’eau sur les différents lieux de vie des exilés.

Tous les jours, il y a des démantèlements de camp, et tous les jours, les associations doivent distribuer des repas et de l’eau, alors que c’est à l’Etat de le faire, comme l’avait ordonné la justice en juillet de l’année dernière. Les migrants n’osent pas s’éloigner de leur lieu de vie, pendant la matinée, pour aller se doucher, de peur de perdre leurs affaires dans la destruction de leur campement par la police.

Boycott des réunions avec la préfecture

En colère, les associations ont donc décidé de ne plus participer aux réunions de la préfecture. Elles estiment qu’elles ne servent à rien. Une politique chaise vide que le Préfet, Fabien Sudry dit ne pas comprendre : « naturellement, nous ne sommes pas toujours d’accord, mais le dialogue, ce n’est pas être d’accord sur tout. Sur une situation difficile, on a besoin de l’avis de tous et ça me permet de trouver le bon niveau d’équilibre, au regard des directives que le gouvernement se fixe sur la situation de Calais ».

Les associations dénoncent également ce qu’elles considèrent comme du harcèlement des bénévoles, avec des PV répétés et des contrôles d’identités incessants. Ces situations sont aussi constatées dans le Dunkerquois.

Calais : 10 associations d’aide aux migrants saisissent la justice sur la question de l’eau

Dix associations d’aide aux migrants de Calais ont annoncé vendredi déposer une requête devant le juge des référés du tribunal administratif de Lille afin qu’il enjoigne les autorités à renforcer les points d’eau et les sanitaires, à leurs yeux « loin d’être suffisants ».

Par AFP Publié le 20/07/2018 à 19:04

Déjà saisi en référé par 11 associations le 26 juin 2017, le tribunal administratif de Lille avait ordonné la mise en place de mesures pour leur venir en aide, comme la création de points d’eau et de sanitaires. Le Conseil d’État avait validé ces mesures, contestées par le gouvernement, un mois plus tard. « Si des points d’eau, des latrines et un dispositif de douches ont été tardivement installés, ils sont loin d’être suffisants et les modalités d’accès à ces dispositifs en réduisent l’effectivité« , plaident vendredi les 10 associations dans un communiqué.

« Depuis des mois, les associations ne cessent d’indiquer, lors de rencontres avec le préfet du Pas-de-Calais, l’impérieuse nécessité d’augmenter les capacités de ce dispositif en augmentant le nombre de points d’eau et les horaires d’ouverture, et en facilitant les modalités d’accès aux dispositifs de douche« , ajoutent-elles.

« Situation critique »

Les associations, parmi lesquelles l’Auberge des migrants et le Secours catholique, soulignent qu’elles doivent elles-mêmes « apporter de l’eau, énormément d’eau« , en « bidons et bouteilles » pour « pallier les carences de l’État« .

« La situation, depuis plusieurs mois, est critique. L’absence de prise en compte des besoins fondamentaux des personnes a des conséquences graves : la soif, le manque d’hygiène notamment, en plus de l’insécurité matérielle dans laquelle elles se trouvent, ont des répercussions sur la santé des personnes exilées« , écrivent les associations.

Le 13 juillet, plusieurs de ces associations avaient annoncé boycotter à l’avenir les réunions organisées par la préfecture afin de protester contre la « dégradation » de la situation. Elles avaient cité, outre le problème de l’eau, des insuffisances d’information aux migrants, de traducteurs ou encore des « violences policières persistantes« .

Le préfet avait déclaré à l’AFP que « l’État assur(ait) un socle humanitaire complet à destination de la population migrante« , comme des maraudes d’information, la distribution de repas, l’accès à des douches et des consultations médicales gratuites.

 

Communiqué de presse, 20.07.2018 // 10 associations saisissent une nouvelle fois le juge en défense des droits fondamentaux des exilé.e.s présents à Calais

Depuis l’expulsion du bidonville de Calais en octobre 2016, plusieurs centaines de personnes exilées sont présentes sur la commune de Calais et aux alentours.

Ces hommes, femmes et enfants, bloqué.e.s à la frontière franco-britannique, subissent quotidiennement des opérations de destruction de leur lieu de vie qui ont pour but de lutter contre ce que les autorités appellent des « points de fixation ».

Pourtant, malgré tout, ces personnes sont là, comme depuis le milieu des années 90. Elles sont là, à la frontière, qui, seule, est ce fameux point de fixation.

Les conditions de vie de ces personnes que les autorités ne veulent pas voir, sont de plus en plus dégradées. Leurs besoins fondamentaux ne sont pas couverts.


Face à cette situation, des associations et des citoyen.ne.s, apportent un soutien quotidien aux personnes exilées. Elles fournissent des vêtements, des tentes, des sacs de couchage, des bâches, tout ce qui peut permettre de passer la nuit à l’abri du vent, de la pluie, du froid ou de la chaleur. Elles fournissent de la nourriture, en complément des distributions étatiques mises en place en mars 2018. Elles fournissent des soins primaires et orientent les personnes vers les dispositifs de soin existants. Elles fournissent de l’information sur les droits en France. Elles fournissent de l’eau et des moyens d’accéder à un minimum d’hygiène.


Elles fournissent de l’eau, alors que le Tribunal administratif de Lille puis le Conseil d’État avaient, respectivement les 26 juin et 31 juillet 2017, enjoint à l’autorité préfectorale et à la commune de Calais de créer plusieurs points d’eau accessibles permettant aux exilés sans abris de boire, de se laver et de laver leurs vêtements, et d’installer des latrines.

Si des points d’eau, des latrines et un dispositif de douches ont été tardivement installés, ils sont loin d’être suffisants et les modalités d’accès à ces dispositifs en réduisent l’effectivité.

Depuis des mois, les associations ne cessent d’indiquer, lors de rencontres avec le Préfet du Pas-de-Calais et le Sous-préfet de Calais, l’impérieuse nécessité d’augmenter les capacité de ce dispositif en augmentant le nombre de points d’eau et les horaires d’ouverture, et en facilitant les modalités d’accès aux dispositifs de douche par exemple. Malgré quelques modifications à la marge, l’ensemble du dispositif reste sous-dimensionné, et incapable de répondre à l’urgence.

Ce sont donc une nouvelle fois, les associations, bénévoles et militants, qui tentent de pallier les carences de l’État.

Elles apportent de l’eau, énormément d’eau. Elle fournissent des bidons ou des bouteilles pour que les personnes éloignées de plusieurs centaines de mètres et pour certaines près de deux kilomètres des points d’eau, puissent stocker de l’eau. Elles lavent des vêtements…

Malgré cela, elles constatent que la situation, depuis plusieurs mois, est critique. L’absence de prise en compte des besoins fondamentaux des personnes a des conséquences graves : la soif, le manque d’hygiène notamment, en plus de l’insécurité matérielle dans laquelle elles se trouvent, ont des répercussions sur la santé des personnes exilées.

Face à l’urgence, 10 associations ont donc pris la décision de saisir le juge des référé du Tribunal administratif de Lille afin qu’il enjoigne à l’administration de prendre diverses mesures en vue d’assurer l’accès effectif des personnes sans-abris présentes à Calais à des points d’eau, des douches et différents équipements sanitaires.

Parallèlement à cette action urgente, les associations ont également interpellé le Préfet du Pas-de-Calais, en lui rappelant ce qu’elles ne cessent de dire depuis des années : il est indispensable de permettre à toutes les personnes présentes à Calais d’accéder à leur droit fondamentaux. Pour cela, elles demandent la fin immédiate des expulsions et la mise en place rapide de dispositifs d’hébergement à Calais et à proximité. Ces lieux doivent être des espaces de répit, où les personnes accèdent à l’ensemble des droits fondamentaux et à de l’information complète et impartiale. Des lieux de prise en charge effective pour les mineurs non accompagnés doivent également être mis en place.

Nous continuerons à utiliser les moyens en notre possession pour qu’enfin les droits fondamentaux des personnes exilées soient respectés.

Les associations requérantes dans le cadre du référé-liberté

Care4Calais

Gynécologie sans frontières

Help Refugees

L’Auberge des migrants

La Cabane juridique / Legal Shelter

La Cimade

Refugee Women’s Center

Salam Nord/Pas-de-Calais

Secours catholique Caritas France

Utopia 56

Communiqué de presse, 13.07.2018 // Malgré l’abrogation du délit de solidarité, la discrimination des solidaires !

Enregistrement du Refugee Women’s Center daté du 29 juin 2018.

Signataires et contact presse ci-dessous.

Grande Synthe, le 13/07/2018,

A Grande Synthe, aujourd’hui, il est impossible aux bénévoles non-français de venir en aide aux migrant.e.s.

Depuis jeudi 28 juin, à Grande Synthe, les bénévoles britanniques, et souvent l’ensemble des bénévoles non-français, appartenant à des associations britanniques et françaises se voient refuser l’accès au terrain où (sur)vivent des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants dans des conditions indignes.

Sur ce terrain, comme tous les jours, des bénévoles viennent à la rencontre des personnes exilées pour leur distribuer des tentes, des sacs de couchage, de la nourriture, les informer sur leurs droits et les possibilités de mise à l’abri et leur apporter des soins.

Comme souvent, les forces de l’ordre sont présentes à l’entrée du terrain.

Mais depuis le 28 juin, cette présence policière s’accompagne d’un contrôle d’identité quasi-systématique des bénévoles. Un tri est donc opéré au faciès entre suposé.e.s exilé.e.s et bénévoles, puis un second tri par contrôle d’identité entre français.e.s et non-français.e.s. « Seuls les français entrent » peut-on entendre dans la bouche des policiers de faction. Ce contrôle d’identité n’a, en revanche, pas entraîné d’interdiction d’entrée sur le terrain pour les bénévoles étranger.e.s les 11 et 12 juillet. La fin du tri est-elle définitive ?

Le vendredi 29 juin et le lundi 2 juillet, le tri a pris un caractère disproportionné, puisque des bénévoles britanniques ont été interpellé.e.s et emmené.e.s au commissariat de police. Ils et elles ont finalement été relâché.e.s plus de trois heures plus tard, après avoir dû donner leurs empreintes digitales sous la menace d’une garde-à-vue.

Les raisons de cette interdiction sont inconnues. Aucune explication n’est donnée aux bénévoles étranger.e.s lors de leur refoulement.

Tous les représentants des autorités auxquelles nous nous sommes adressés se renvoient la responsabilité de cette décision.

Alors qu’à Calais, le harcèlement et la pression subies par les bénévoles et militant.e.s se poursuit, Grande Synthe devient un terrain supplémentaire de cette politique suspicieuse de la solidarité. Aujourd’hui, l’Etat discrimine les solidaires.

La décision du conseil constitutionnel relative au délit de solidarité ne concerne-t-elle que les ressortissant.e.s français.e ?

Les gestes de fraternité sont-ils interdits aux étranger.e.s ?

Nous poursuivrons nos actions de solidarité, et nous soutiendrons tous les solidaires, qu’ils ou elles soient français.e.s ou non.

Signataires

Associations intervenant à Grande Synthe

ACC Minorités visibles

ADRA France – antenne de Dunkerque

AMiS

ATD Quart Monde Dunkerque

Auberge des migrants

Bethlehem

DROP Solidarité

Entraide de l’Eglise Protestante Unie de Dunkerque

Gynécologie sans frontières

La Cimade Nord Picardie

Ligue des droits de l’Homme – Dunkerque

MRAP Dunkerque

Médecins du Monde

Refugee Women’s Center

Salam Nord/Pas-de-Calais

WISE

Autres organisations

Collectif des Délinquants solidaires

Bagagérue

Collectif Fraternité Migrants Bassin Minier 62

Collectif Justice & Libertés 67

Emmaüs France

Fédération des Associations de Solidarité avec Tous.te.s les Immigré.e.s (FASTI)

Groupe d’Information et de Soutien des Immigré.e.s (GISTI)

Itinérance Dieppe

La Cabane juridique

Sud Education

Syndicat de la Magistrature

Terre d’errance

Union syndicale Solidaires

Utopia 56