Paroles de mineurs et demandeurs d’asile du « squat des cinq étoiles »

Lille, le 11 décembre 2018

« Pourquoi quand un mineur arrive en France, à Lille, on n’a pas confiance en ce qu’il raconte, pourquoi on le soupçonne de mentir au lieu de le prendre en charge, l’héberger, le scolariser ?

Quand on se présente à EMA, le service du département d’évaluation de la minorité et de mise à l’abri, ils nous donnent une date de rendez-vous lointaine, souvent une quinzaine de jours après. Ils ne nous proposent pas d’hébergement, comme l’oblige pourtant la loi, nous disant qu’il n’y a pas de place. Ils nous envoient au squat du 5 étoiles ou nous disent d’aller voir la police. Depuis quand la police est responsable de l’hébergement des mineurs en France ?

Même quand on va voir l’avocate et que le tribunal ordonne de nous héberger, en réaffirmant la loi, on nous dit encore qu’il n’y a pas de place. Le département préfère payer des astreintes plutôt que de trouver des solutions d’hébergement.

L’entretien d’évaluation de minorité dure plusieurs heures, parfois jusqu’à 5h sans manger et sans boire. On nous pose énormément de questions, auxquelles nous ne savons pas toujours répondre. Ils essayent de savoir avec qui on est en contact, ils prennent notre numéro de téléphone et notre facebook pour tout vérifier. Ils jugent notre physique, nos vêtements, nous trouvent parfois trop propres ou trop bien habillé.e.s pour être isolé.e.s. C’est un vrai interrogatoire de police !

Ils ne justifient pas toujours pourquoi ils refusent notre minorité. C’est même déjà arrivé qu’un jeune reçoive un appel avant son jour d’évaluation lui disant qu’il devait venir chercher le résultat alors même qu’il n’avait pas passé l’entretien : il a été refusé directement…

Lorsque certains d’entre nous sont reconnu.e.s mineur.e.s, après cette longue période d’attente à la rue, le dispositif TRAJET, que M Lecerf juge si efficace, leur demande d’attendre à nouveau pour un hébergement. Une fois l’hébergement trouvé, la prise en charge éducative est loin de satisfaire leurs besoins. D’ailleurs, comment voulez-vous avec 65 euros par jour au lieu de 170 euros pour un mineur français, dit « jeunes de nos quartiers » par Mr Lecerf ?!

Lorsque notre minorité n’est pas reconnue par le département, nous sommes complètement abandonné.e.s. Nous n’avons aucun moyen de prouver ce qu’ils nous demandent, dans les conditions où nous sommes. Faire venir ses papiers ou se déplacer pour les faire légaliser à Paris coûte très cher, nous n’avons rien. Aucune administration française ne nous prend en charge car nous ne sommes considéré.e.s ni mineur.e.s ni majeur.e.s.

Nous souhaitons que le Département et l’Etat prennent de nouvelles dispositions pour que nous soyons protégé.e.s. Nous souhaitons avant tout aller à l’école, être formé.e.s, dans les meilleures conditions possibles, comme la loi le dit. Ce sont les droits de l’enfant : droit à l’éducation, droit aux loisirs, droit à la paix et à la sécurité, droit à la protection ! »

Infos et contacts : collectifolieux@gmail.com , https://olieux.herbesfolles.org