La Voix du Nord, le 25 Octobre 2022, par Arnaud Stoerkler
Refus d’un accès à l’eau potable, pose de blocs en béton, multiplication des évacuations… avec la volonté de tout faire pour « éviter les points de fixation » des exilés sur le littoral, l’État et ses relais aggravent encore leurs conditions de vie à Loon-Plage, selon les associations.
Un accès à l’eau refusé par l’État
Médecins du monde, Roots et Utopia 56 avaient lancé une action surprise le 30 juin devant le siège de la communauté urbaine de Dunkerque (Cud), afin de demander le retour d’un accès à l’eau potable en faveur des exilés présents sur son territoire. Ces derniers en sont privés depuis novembre 2021, un « non-respect du droit » selon Médecins du Monde évoquant l’article L210-1 du code de l’environnement. « Depuis, la CUD nous a informés que la préfecture ne l’autorisait pas à réaliser un raccordement d’eau potable sur le camp », révèle Diane Léon, coordinatrice de Médecins du monde sur le littoral. Un fait confirmé par l’association Roots et que les services de l’État n’ont pas souhaité commenter. Ce manque d’eau entraîne au quotidien « maladies, surinfection de plaies, problèmes dermatologiques et troubles intestinaux ».
Du béton qui bloque les associations
Début septembre, des blocs en béton ont été disposés à l’entrée du principal camp de Loon-Plage, interdisant son accès aux véhicules. Destiné officiellement à lutter « contre les passeurs », ce dispositif constitue surtout « une nouvelle entrave aux activités de solidarité des associations », constate Diane Léon. Clinique mobile, douches portatives et tables de repas ne peuvent plus être amenées au plus près des 600 personnes en exil, qui doivent « se concentrer à l’avant du camp ». « Nous nous retrouvons les uns sur les autres, avec plus d’insécurité pour tout le monde. » Selon l’association Roots, seule entité dispensant chaque jour de l’eau sur le camp, ce blocage l’a forcé à « réduire » son nombre de cuves, et donc « la capacité totale en eau du camp ».
La violence continue des évacuations
« Depuis la mi-septembre, le camp est évacué deux fois par semaine. Nous ne pouvons plus fournir de tentes à tout le monde », alerte Karim, de l’association Solidarity Border. Ces expulsions par les forces de l’ordre entraînent la saisie des tentes, voire des bidons d’eau distribués aux réfugiés. « Nous ne pouvons les remplacer qu’au compte-gouttes », se désole un membre de Roots, qui évoque aussi la présence de « trous de couteau » réalisés « sur le côté » de leurs cuves lors des démantèlements. « L’État dit lutter contre l’installation de camps sur le littoral. Mais ces évacuations sont une réponse sécuritaire, alors qu’il y a un besoin humanitaire », fustige Diane Léon.