La préfecture du Pas-de-Calais interdit depuis le 14 août aux associations non mandatées par l’Etat de distribuer eau et nourriture au niveau de deux quais du centre-ville, un arrêté reconduit lundi jusqu’au 6 septembre.
L’Auberge des migrants et le Secours catholique, associations d’aide aux migrants, déplorent le « retour » des interdictions de distributions alimentaires dans le centre-ville de Calais et dénoncent une « politique du harcèlement » récurrente et « inefficace ».
Après quelques mois sans arrêtés préfectoraux, la préfecture du Pas-de-Calais interdit depuis le 14 août aux associations non mandatées par l’Etat de distribuer eau et nourriture au niveau de deux quais du centre-ville, un arrêté reconduit lundi jusqu’au 6 septembre. Des arrêtés similaires, mais sur une zone plus vaste de trente et une rues, avaient été pris entre septembre 2020 et avril 2022, provoquant l’ire des associations. La mesure avait alors pour but « de prévenir les risques liés au Covid-19 et aux troubles à l’ordre public », selon la préfecture.
Le nouvel arrêté a cette fois « vocation à répondre aux difficultés faisant suite à l’implantation récente et dangereuse de tentes de migrants sur cette zone où la circulation de poids lourds et de véhicules est particulièrement importante et où a été constatée l’accumulation de déchets », argue la préfecture. « On est dégoûtés. On pensait qu’on en avait fini avec ça », a réagi auprès de l’Agence France-Presse Pierre Roques, coordinateur à Calais de l’association l’Auberge des migrants. « Ça nous prouve que la politique du nouveau préfet, qui a pris ses fonctions début août, va dans la droite ligne de son prédécesseur », regrette-t-il.
Politique de harcèlement
Jusqu’au printemps, « quand on lisait les arguments utilisés, au fil des mois ça paraissait de plus en plus absurde. Au début, le prétexte était le Covid-19. Petit à petit, ils égrenaient des faits divers sordides. Puis ça s’est arrêté parce que ça devenait ridicule. Aujourd’hui, ils recommencent ». Les deux rues concernées, « c’est là où les personnes arrivent le plus en ce moment, et ont le moins accès aux services » et aux distributions organisées par l’association La Vie active, mandatée par l’Etat, a-t-il dit.
« Il y a une centaine de personnes là-bas, parmi lesquelles des familles, des mineurs non accompagnés. L’Etat n’y intervient pas », a renchéri Juliette Delaplace, chargée de mission au Secours catholique. « L’idée, c’est d’affamer, [de] couper les vivres pour dissuader les personnes de rester. » « On est, de façon récurrente, dans des arrêtés complètement stupides, inefficaces », car ces gens « qui fuient les attentats, la guerre, continueront de venir », a jugé Jean-Claude Lenoir, président de l’association Salam, dénonçant ce « harcèlement comme seule politique ».
Nombre record de traversées, lundi
Quelque 1 295 migrants ont réussi la traversée, lundi, à bord de 27 embarcations, selon les chiffres publiés mardi par le ministère de la défense britannique. Le pic de traversée de lundi est « dû aux conditions météo, optimales pour traverser en ce moment », a relevé Pierre Roques. Pour Jean-Claude Lenoir, « c’est tous les jours comme ça dès qu’il n’y a pas de vent » et « c’est comme ça toute cette semaine ». Les migrants « ne restent pas en France, car les conditions de vie sont déplorables, a estimé de son côté Juliette Delaplace. Il y a toujours, l’été, une hausse saisonnière, car c’est très difficile de survivre à la rue à Calais en hiver ».
Les traversées de lundi portent à 22 670, selon le décompte de l’agence Press Association, le nombre de migrants ayant effectué ce voyage depuis le début de l’année, contre seulement 12 500 à la même date en 2021.