M. Hervé Tourmente, sous-préfet de Dunkerque
Préfecture de Dunkerque
27 Rue Thiers
59140 Dunkerque
A Dunkerque, le …. janvier 2021
Objet : dispositifs de mise à l’abri pour la période hivernale dans le dunkerquois
Copies à Messieurs le préfet du Nord, le président de la Communauté Urbaine de Dunkerque (CUD), le maire de la commune de Grande-Synthe
Monsieur le sous-préfet de Dunkerque,
Je vous demande d’ouvrir, en urgence, un dispositif de mise à l’abri pérenne, accessible à tous de manière inconditionnelle, durant toute la période hivernale et disséminé le long de la côte.
Les associations venant en aide aux personnes exilées à Grande-Synthe constatent quotidiennement d’innombrables témoignages d’hommes, de femmes et d’enfants épuisés physiquement et mentalement par les conditions hivernales (froid, pluie, humidité, vent etc.). Celles-ci rendent insoutenables les conditions de survie inhumaines que ces personnes sans abri subissaient déjà bien avant l’hiver.
Depuis le 1er novembre, date du début de la trêve hivernale, les associations non mandatées par l’État ont accompagné :
- 652 hommes seuls ;
- 101 familles, équivalent à 282 personnes ;
- 95 femmes, dont 33 femmes seules (dont 11 mères seules), et 7 femmes enceintes ;
- 127 enfants, dont 107 de moins de 12 ans, 39 de moins de 5 ans et 19 de moins de 3 ans ;
- 173 mineurs isolés.
L’instruction interministérielle en date du 3 novembre 2020 concernant la prise en charge des populations précaires pendant la crise sanitaire vous enjoint d’ouvrir : « autant de places que nécessaires en vous fondant sur les demandes non pourvues de SIAO-115 et les données remontées par les maraudes. L’objectif est qu’une solution soit proposée à chacun afin d’éviter la présence de personnes à la rue ».
Conformément, au rapport de l‘IGPN/IGA de 2017, il y a trois ans de cela : « La réduction de la tension sur place passe enfin par une amélioration de la situation humanitaire des migrants, source de risques sanitaires, notamment à l’approche de l’hiver, et facteur d’agressivité. La mission estime que la lutte contre l’immigration clandestine et la réapparition de camps est compatible avec des mesures destinées à garantir le respect de la personne et sa dignité ».
Dans ce même rapport, l’IGPN/IGA invitait les autorités à abriter les personnes sans abri en cas de froid et de forte pluie : « Il convient également, à l’approche de l’hiver, de prévoir un dispositif provisoire d’hébergement à actionner, en cas de grand froid ou de pluies intenses, pour ceux qui persisteraient à refuser d’aller dans une structure d’accueil. A défaut, la situation de ces migrants, en situation d’extrême précarité, pourrait devenir dramatique et placer l’État et les forces de l’ordre présentes sur place dans une situation risquée, tant sur le plan humanitaire que de la sécurité des personnes ».
Plus encore en cette période hivernale, les mineur.e.s isolé.e.s étranger.e.s dans leur totalité, doivent être systématiquement hébergé.e.s au sein de dispositifs d’accueil d’urgence. Conformément à la protection temporaire prévue par l’article L 223-2 du CASF, un double principe de présomption de minorité et de danger doit prévaloir dans l’attente d’investigations ultérieures.
Or, les associations sur place ont pu constater que les dispositifs de mise à l’abri existants, loin de Grande-Synthe, ne suffisent pas à répondre à cette urgence et comptabilisent depuis le 1er novembre 2020, à minima 203 demandes de mises à l’abri refusées par manque de place au 115 pour des hommes seuls adultes.
Le Défenseur Des Droits rappelait, il y a deux ans déjà, en décembre 2018, que « la politique du gouvernement ne doit pas empêcher l’accueil digne ». Seule la mise en place d’un dispositif de mise à l’abri adapté, de façon pérenne et ouvert à tous de manière inconditionnelle peut permettre de garantir un minimum de respect de la dignité humaine.
Compte tenu de tout ce qui précède et afin que les demandes ministérielles soient respectées, je vous demande de permettre la mise à l’abri des personnes exilées durant toute la période hivernale.
Je vous prie de bien vouloir agréer, Monsieur le sous-préfet, l’expression de mes salutations respectueuses.