Communiqué de presse 02/06/2022
Face à la criminalisation de la solidarité à Calais, lancement du #SolidaritéEntravée
Sur les différentes périodes de confinement pour raison de Covid, au moins 130 verbalisations pour « déplacement illicite” ont été dressées à l’encontre des membres de Human Rights Observers (projet soutenu par L’Auberge des Migrants) et d’Utopia 56 – deux associations opérant auprès des personnes exilées à Calais – les condamnant ainsi à payer près de 20 000 € d’amende cumulés.
Ces contraventions dressées alors que les membres de ces associations étaient dans l’exercice de leur activité professionnelle ont été contestées, sachant que ces membres étaient toujours munis de l’attestation de déplacement professionnel requise, avec pour motif dérogatoire « l’assistance aux personnes vulnérables et précaires ».
Le 20/04/2021, Mme Stella Dupont, une députée LREM, interroge le ministre de l’Intérieur, M. Gérald Darmanin, sur la base légale de ces verbalisations. Un an plus tard, le 19/04/2022, le ministre de l’Intérieur présente sa réponse, dans laquelle il avance “qu’il est arrivé […] que le motif de déplacement, à savoir « l’assistance aux personnes vulnérables et précaires », soit manifestement détourné”. Selon lui, “les membres d’associations n’exerçaient aucune action humanitaire mais se posaient en revanche en « censeurs » d’opérations de police, pourtant menées en application et dans le respect de la loi”.
Or l’observation, la documentation et la dénonciation des expulsions de terrain où sont installées les personnes exilées est essentielle et leur donne accès au droit de se défendre face aux violences d’Etat que sont ces expulsions, par ailleurs illégales. A titre d’exemple, dans une affaire toute récente, la Cour d’appel de Douai a pu qualifier de voie de fait une opération d’expulsion à Calais grâce aux attestations et aux vidéos établies lors de l’expulsion par les stagiaires et bénévoles de HRO (Arrêt de la Cour d’appel de Douai du 24 mars 2022).
Aussi, une part importante des verbalisations a visé des membres d’associations qui menaient des maraudes d’accès au droit et à l’information ou dans le cadre de distributions alimentaires et matérielles, ainsi que d’accompagnements vers des services essentiels d’accès au soin, à la santé, à l’hébergement ou encore à la protection de l’enfance, ce que M. Darmanin fait semblant d’ignorer.
Que M. Darmanin se rassure, toutes ces contraventions ont effectivement été contestées malgré une procédure légale particulièrement dissuasive pour des associations ayant peu de moyens. La première audience pour s’opposer à la culpabilité de deux membres de Human Rights Observers a d’ailleurs eu lieu le 9 mai et le verdict est attendu pour le 20 juin.
Ces contraventions abusives s’inscrivent dans un contexte général d’entraves et d’intimidations policières et institutionnelles contre les associations et leurs membres, condamnant l’aide aux personnes exilées précaires et dégradant toujours plus leurs conditions de vie. À croire qu’il existe une volonté politique de maintenir le statuquo à Calais, zone de non-droit en France. Nous avons lancé sur nos réseaux un #SolidaritéEntravée afin de visibiliser les entraves subies par les associations au quotidien, qui constituent des atteintes à la liberté d’association, impensables dans un État de droit.