Grande-Synthe : évacuation prochaine des migrants, un nouveau coup d’épée dans l’eau
La France est le pays de la Déclaration des Droits de l’Homme. Elle n’est plus le pays des Droits de l’Homme. C’est le constat que l’on fait actuellement, car depuis des décennies « l’Etat a pris un ensemble de décisions privilégiant le rejet des étrangers plutôt que leur accueil » (citation du Gisti).
Sur un plan général en effet on constate que notre pays n’est pas, de beaucoup s’en faut, celui qui accueille sur son sol le plus de réfugiés. Au prorata du chiffre de sa population (67 millions d’habitants), il ne se situe à l’échelle européenne qu’à la 15ème place : 200.000 étrangers sont admis chaque année en France pour 100.000 qui en repartent. Ceci dit pour couper les ailes de la surenchère de ceux de tous bords qui invoquent « l’appel d’air » ou « la submersion migratoire .»
Depuis une 20ne d’années, la région littorale Manche-Mer du Nord qui fait face à la Grande-Bretagne voit arriver un grand nombre de réfugiés anglophones ou ayant des proches établis outre-Manche. Or faute d’une application par l’Etat qui l’a signée de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et de son article 13 affirmant que « toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’une Etat »,ces exilés se trouvent confrontés à la politique de non-droit cogérée par la France et la Grande-Bretagne. Elle se matérialise par une multiplicité d’obstacles juridiques et matériels, une contrainte policière qui transforment la fin de leur périple en un véritable parcours du combattant.
Ainsi côté français, les exilés se trouvent bloqués pendant des mois, voire des années dans des conditions de grande précarité dans l’attente d’un passage aléatoire outre-Manche lourdement monnayé auprès de passeurs. Dans ces temps extrêmement pénibles pour eux, ils sont aidés par de trop rares collectivités comme Grande-Synthe, ville hospitalière, et par des associations et des bénévoles intervenant chaque jour pour qu’ils aient nourriture, vêtements, couvertures, soins, assistance juridique. Leur survie est ainsi assurée.
Mais dans le même temps, ils se trouvent en butte à des mesures attentatoires à leur dignité, leur liberté prises par des représentants de l’Etat. Et c’est pourquoi il arrive aux associations de saisir avec succès le Conseil d’Etat, les Tribunaux Administratifs quand dans un Etat dit « de droit » comme la France, la loi n’est pas respectée. Les plus graves de ces mesures répressives, comme ce devrait être le cas bientôt à Grande-Synthe, sont les expulsions, les évacuations forcées des exilés de leurs campements de fortune, ce qui les plonge dans une plus grande précarité encore. Ces opérations onéreuses nécessitant un grand déploiement de forces de l’ordre sont depuis toujours, chacun le sait, vouées à l’échec. A plus ou moins brève échéance, les « évacués » reviennent décidés à rejoindre la résidence de leur choix. Les associations engagées quotidiennement sur le terrain réclament l’arrêt de ce processus tel qu’il est appliqué et la mise en place de conditions d’accueil humaines et pérennes à la hauteur des valeurs et des potentialités qui sont celles de notre pays.
Fédération du Nord,
Section de Dunkerque de la
Ligue des Droits de l’Homme (LDH)