Le nombre de migrants accostant au Royaume-Uni en « small boat » en 2022 n’a jamais été aussi important, selon le ministère de l’intérieur britannique, avec près de 17 000 arrivées de plus qu’en 2021.
Le Home Office, ministère de l’intérieur britannique, a diffusé ce 3 janvier les chiffres concernant les migrants illégaux ayant traversé la Manche à bord d’embarcations de fortune (small boats). Le décompte des autorités inclut uniquement les personnes appréhendées à leur arrivée sur les côtes britanniques.
Avec plus de 45 000 passages, le nombre de traversées a atteint un niveau inédit en 2022 et dépassé de 17 000 celui de 2021. Depuis les quatre dernières années, le bilan annuel est chaque année plus important.
Le maximum quotidien de traversées a eu lieu le 22 août avec le passage de 1295 migrants à bord de 27 embarcations. Les pics correspondent généralement à des périodes présentant les conditions météorologiques optimales pour la saison, mais les traversées sont tentées toute l’année, y compris durant les mois les plus froids : 4 082 personnes ont accosté au Royaume-Uni en novembre, et 1 745 en décembre, le dernier enregistrement de l’année ayant été fait pour le 25 décembre.
Naufrages
Quatre personne ont perdu la vie dans le naufrage de leur small boat dans la nuit du 13 au 14 décembre dernier ; les 43 autres occupants du canot pneumatique ont pu être secourus par un bateau de pêche. Un an plus tôt, 27 migrants avaient péri dans un naufrage le 24 novembre 2021. Alex Fraser, responsable des réfugiés à la Croix-Rouge britannique, rappelait au Monde en décembre que « tant qu’il n’y aura pas de routes sûres pour faire une demande d’asile au Royaume-Uni nous risquons d’avoir d’autres accidents de la sorte ».
Côté français, la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord a recensé 1 304 tentatives de traversée impliquant 51 786 personnes en 2022. Pour 2021, ce chiffre s’élevait à 35 382 personnes.
Cette « massification des départs » était déjà soulignée dans son rapport d’activité 2020 par le Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage du cap Gris-Nez (Pas-de-Calais), qui coordonne les sauvetages en mer dans une zone de compétence allant de la frontière belge au cap d’Antifer (Seine-Maritime), à quelques kilomètres au sud-ouest d’Etretat.
Intensification des contrôles
La hausse continue de passages de migrants relevée dans cette zone maritime parmi les plus fréquentées du monde est liée à l’intensification des contrôles sur les voies de passage légales vers le Royaume-Uni, à partir du port de Calais ou par le tunnel sous la Manche.
Les plans du gouvernement britannique, conservateur, pour décourager les traversées se succèdent, jusqu’ici sans succès :
- un accord conclu en avril avec le Rwanda pour y expulser les migrants arrivés clandestinement, sans même examiner leur demande d’asile, a dans un premier temps été suspendu par une décision de la Cour européenne des droits de l’homme. Le gouvernement veut cependant relancer le projet à la suite d’une récente décision favorable de la cour de justice britannique.
- à la mi-novembre, Londres s’est engagé à verser une enveloppe de 72,2 millions d’euros à la France pour la période 2022-2023 pour l’achat de drones et le financement du déploiement de 800 à 900 policiers et gendarmes supplémentaires sur les plages françaises ;
- enfin, le premier ministre britannique, Rishi Sunak, a présenté, le 13 décembre, un plan pour renvoyer plus vite les migrants venant de pays « sûrs » , comprenant un accord avec Tirana pour expulser massivement les Albanais.
Ces derniers constituent le plus important contingent arrivé en small boat. Pour les trois premiers trimestres 2022 (le détail des nationalités pour le dernier trimestre n’est pas encore publié), les Albanais étaient 11 241, devant 4 781 Afghans et 3 594 Iraniens. La part de cette nationalité dans l’ensemble s’est largement accrue depuis le printemps 2022, au point de représenter 44,7 % des migrants ayant traversé la Manche au cours du troisième trimestre.